À tort, tout le monde se permet de dire : « J’ai été au Congo où j’ai eu à rencontrer les communautés locales. Ces communautés vivent essentiellement de l’exploitation des minerais. La section 1502 de la loi Dodd -Frank Wall Street Reform Act de juillet 2010, affecte leurs moyens de subsistance, et la stabilité économique de la région est menacée par l’interdiction de facto. Cette loi prive des milliers de personnes de leur gagne-pain, etc. ».
Sincèrement, c’est une déclaration simpliste qui énerve. De tels gens ne doivent pas croire qu’ils sont en train de nous aider, mais, au contraire, ils nous détruisent et travaillent contre l’intérêt du territoire de Walikale. Ont-ils vraiment rencontré les communautés locales ou, tout simplement intéressés aux questions minières et ne pouvant atteindre ces communautés, ils se limitent à discuter avec les opérateurs miniers trouvés en milieux urbains et, pour faire passer leurs opinions, ils exploitent leurs propos pour en faire des déclarations officielles qui engagent, sans raison, les communautés locales ?
Quiconque prétend défendre un peuple doit chercher avant tout à connaître ce peuple : son histoire, sa culture, son mode de vie et savoir le localiser. Dans le cas contraire, on se moque de ce peuple. L’expérience a montré que des malins se font passer pour des défenseurs des intérêts du peuple. Ils présentent à la face du monde le malheur de ce peuple et mettent en avant le besoin de l’amélioration de son bien-être. Mais au bout du tunnel on se rend compte qu’ils sont au service de leurs intentions.
Des minerais exploités sans contrepartie
Qui peut aujourd’hui confirmer qu’avant la libéralisation du secteur minier les populations de Walikale ne mangeaient pas à leur faim ? Walikale est un territoire riche non seulement en ressources minières, mais aussi, en vastes étendues de terres arables très riches. C’est un territoire à vocation agricole. Avant 1985, on comptait de nombreux pâturages en territoire de Walikale. Le riz était produit à Walikale en très grande quantité. On comptait beaucoup de plantations de bon café, de cacao, de bananes plantains et de maïs pour ne pas citer les cultures de rente, les cultures maraîchères, les légumineuses à graines et l’huile de palme.
Toutes ces richesses n’ont pas disparu. Par conséquent, les populations de Walikale ne peuvent, en aucun cas, mourir de faim parce qu’il y a suspension des activités minières. Ce sont les exploitants miniers artisanaux qui n’ont pas d’espace où cultiver qui se lamentent pour dire que l’arrêt des activités minières fait souffrir, mais pas les communautés locales de Walikale.
Nul n’ignore qu’au cours de la dernière décennie, les grandes puissances, des dictateurs, des sociétés privées, des réseaux criminels et des forces rebelles, se sont résolument engagés à exploiter nos richesses, plongeant la grande majorité de la population dans une pauvreté extrême. Les bénéfices réalisés par les projets miniers dans la région n’ont pas contribué au développement local ou des communautés locales. Ces minerais ont été exploités sans aucune contrepartie. Les taxes et impôts perçus par l’État atteignent rarement ou pas du tout les communautés locales. Cette manne n’a pas du tout laissé indifférents les pays voisins de la République démocratique du Congo qui s’en sont saisis gratuitement.
Walikale prêt à supporter l’arrêt des activités minières
Non seulement ces minerais ont créé et continuent à créer des conflits et des guerres, mais ils contribuent aussi favorablement à leur persistance. Des conflits et affrontements entre groupes armés sont signalés pour le contrôle des zones minières. Le cas illustratif est celui de Kaseke, dans le groupement de Ihana où, en juillet 2011, deux groupes armés se sont tirés dessus créant la débandade dans la contrée et des déplacements massifs des populations. Nul n’est donc besoin de rappeler qu’il existe des liens étroits entre le commerce des minerais et les conflits armés.
Nous souffrons plus en regardant passivement comment nos minerais sont exploités que de les garder enfouis pour qu’ils soient bénéfiques aux générations futures. Les ressources minérales étant par essence des richesses épuisables et non renouvelables, il est plus qu’important de trouver des solutions urgentes pour un développement harmonieux, viable et durable du secteur minier. Et, pour le besoin de la réforme du secteur minier, Walikale est prêt à supporter l’arrêt des activités minières pendant plus de cinq ans encore.
Pour ce faire, les communautés locales de Walikale renouvellent leur soutien aux initiatives nationales (ITIE/RDC, révision du code minier congolais), sous- régionales (CIRGL) et internationales (ITRI, OCDE), et d’une manière très particulière, elles réitèrent leur attachement indéfectible à la section 1502 de la loi Dodd-Frank Wall Street Reform Act de juillet 2010.
Appel à la publication des règles finales de la loi Dodd Frank
Celle-ci marque une rupture et contribue à la mise en œuvre des solutions permettant d’assurer la traçabilité de ces ressources depuis la mine jusqu’au point d’exportation en vue du développement local. Tout l’espoir des communautés est ainsi placé en cette loi. C’est grâce à elle qu’il est possible pour ces communautés d’espérer un jour bénéficier de leurs ressources naturelles.
Cette loi vise en outre à couper le lien qui existe entre le commerce de ces minerais et les conflits armés qui endeuillent quotidiennement le peuple congolais. Ainsi, les communautés locales de Walikale en appellent à la publication sans délai, des règles finales relatives à la loi Dodd-Frank Wall Street Reform Act de juillet 2010 applicables aux minerais des conflits. C’est ce qui nous manque en effet.
Il est impératif qu’il y ait une bonne gouvernance, une transparence et un climat sociopolitique stable pour obtenir la transformation économique désirée de ces richesses. L’État a la responsabilité d’assurer une exploitation efficace et opportune et de la manière la plus bénéfique de ses ressources naturelles minérales. Il doit s’assurer que les exigences de diligence raisonnable relatives à l’approvisionnement en minerais sont observées et décourager les mauvaises langues qui sont contre le bien-être de ses administrés.
Si le secteur minier est réglementé, géré dans la transparence, bien organisé et soutenu, il peut contribuer à sortir le peuple congolais de l’extrême pauvreté qui l’accable, renflouer le trésor public pour la bonne marche de l’État et contribuer au développement régional et international, comme c’est le cas pour bien d’autres pays du monde.
(*) Secrétaire général du Bureau d’études, d’observation et de coordination pour le développement du territoire de Walikale (BEDEWA).