LES SERVICES du Fonds monétaire international (FMI) ont achevé leur mission d’évaluation 2019 au titre de l’article IV des statuts de l’institution en République démocratique du Congo. Le communiqué de presse de fin de mission qu’ils ont publié le 5 juin, comprend une déclaration d’équipe qui présente les conclusions préliminaires de la mission d’évaluation effectuée à Kinshasa et Lubumbashi du 22 mai au 4 juin.
Les us et coutumes du Fonds sont que les opinions exprimées dans la déclaration sont uniquement celles des services ou équipe d’experts et ne reflètent pas nécessairement celles du conseil d’administration du FMI. Néanmoins, la procédure exige que sur la base des conclusions préliminaires de cette mission, les services du Fonds établissent un rapport. Lequel, sous réserve de l’approbation de la direction, sera présenté au conseil d’administration pour examen et décision. Dans le cas de la RDC, ce rapport sera soumis au mois d’août prochain.
L’avis favorable du conseil d’administration du FMI est attendu avec impatience à Kinshasa par Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo (Fatshi), dans la perspective de l’ouverture des négociations en vue d’un programme financier entre la RDC et le système de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale). Un programme qui pourrait donner au nouveau chef de l’État et à son gouvernement plus de marge de manœuvre pour répondre aux immenses besoins en développement du pays.
Dans le communiqué de presse sanctionnant leur mission d’évaluation en RDC, les experts du FMI, sous la supervision de Mauricio Villafuerte, soulignent que « la croissance des activités non minières devrait plus que doubler en 2019, mais celle du produit intérieur brut (PIB) total ralentira basée sur l’hypothèse de ralentissement de l’activité minière ».
Par ailleurs, on retiendra utilement qu’« une mobilisation plus forte des recettes est nécessaire pour accroître les dépenses d’infrastructure ». Et que « la réduction de la réglementation, la simplification des paiements d’impôts et l’amélioration de la gouvernance devraient contribuer à stimuler les investissements du secteur privé ».
La Déclaration
À l’issue de la visite, Mauricio Villafuerte, le chef de la délégation a fait la déclaration suivante: « La stabilité macroéconomique a continué de se consolider en 2018 grâce aux politiques macroéconomiques prudentes mises en place depuis mi-2017 dans un contexte de forte détérioration des termes de l’échange et de chocs politiques et de retrait du soutien des donateurs.
La croissance du PIB est passée de 3,7 % en 2017 à 5,8 % en 2018. La production minière a augmenté plus rapidement que prévu, sous l’effet d’une forte augmentation des prix du cobalt, qui a plus que compensé le ralentissement de la croissance du PIB non extractif. En l’espace d’un an à peine, jusqu’en décembre 2018, l’inflation en glissement annuel est tombée de 54,7 % à 7,2 %, tandis que le taux de dépréciation du taux de change a fortement ralenti, passant de 31 % à 2,7 %.
Le déficit budgétaire de 2018 a été contenu à 0,1 % du PIB, contre un excédent de 0,5 % du PIB un an plus tôt, malgré des dépenses plus élevées occasionnées par la tenue des élections en décembre dernier qui ont été couvertes totalement par les ressources propres du gouvernement.
La croissance du PIB devrait ralentir pour s’établir à 4,3 % en 2019, dû à un ralentissement de l’activité minière dans un contexte d’affaiblissement des prix du cobalt. En revanche, la croissance de l’économie non minière ferait plus que doubler en raison de la hausse des investissements publics et de l’optimisme post-électoral. À moyen terme, la croissance globale avoisinerait 4 % sur la base des politiques actuelles, bien que la mise en œuvre de réformes structurelles devrait stimuler la croissance, en particulier dans le secteur non minier. Après une nouvelle baisse à 5,5 % en 2019, l’inflation devrait se stabiliser autour de 5 % à moyen terme.
Les recommandations
Les discussions au titre de l’article IV, les premières depuis 2015, ont porté sur les politiques qui permettraient à terme de diversifier l’économie et de s’attaquer aux niveaux élevés de pauvreté et de chômage dans une population en rapide expansion.
À cet effet, la réduction de la réglementation, la simplification et la consolidation des impôts et des paiements non fiscaux, l’amélioration de la gouvernance et l’intensification de la lutte contre la corruption et la recherche de rentes devraient contribuer à améliorer l’environnement des affaires et à encourager les investissements du secteur privé.
Dans ce contexte, l’équipe des services du FMI a encouragé les autorités à accélérer l’adoption du projet de loi anticorruption et de la loi portant création d’une commission indépendante de lutte contre la corruption, en tant que mesures essentielles pour ancrer la crédibilité du gouvernement dans sa quête d’une croissance inclusive et soutenue de la RDC.
Les plans de réhabilitation et de construction d’infrastructures des autorités sont cohérents avec l’objectif de créer les bases d’une croissance durable, mais nécessiteraient une plus forte mobilisation des recettes. L’équipe de services du FMI a exhorté les autorités à s’employer à rationaliser les dépenses fiscales et à consolider les diverses sources de recettes minières au sein du Trésor, ce qui donnerait au gouvernement une plus grande marge de manœuvre budgétaire et une capacité d’emprunt accrue pour soutenir les investissements publics et les priorités sociales.
Une plus grande transparence dans la gestion des ressources naturelles est capitale pour atteindre cet objectif. Étant donné que les recettes minières peuvent conduire à des dépenses volatiles, l’équipe des services du FMI a suggéré de modifier la formulation de la politique budgétaire de manière à ce qu’elle repose sur un solde budgétaire non minier et de continuer à faire preuve de prudence dans les emprunts publics pour préserver la viabilité de la dette.
Compte tenu des niveaux élevés de dollarisation du système financier et de la vulnérabilité du pays aux chocs externes, la mission a encouragé les autorités à poursuivre les efforts pour augmenter fortement les réserves internationales par rapport à leur faible niveau actuel d’environ 3 semaines de couverture d’importations. Les discussions ont également porté sur la nécessité de continuer à renforcer les contrôles fondés sur les risques et la qualité des données financières, et de finaliser le cadre de la Lutte contre le Blanchiment des Capitaux et le Financement du Terrorisme (LBC-FT) pour améliorer davantage la stabilité financière. La mission remercie les autorités congolaises pour leur hospitalité, leur ouverture et leur coopération. Le Fonds est prêt à soutenir les autorités dans leurs efforts de réforme et à poursuivre la coopération dans le futur. »