Face à la baisse vertigineuse du prix du baril d’or noir, les pays producteurs vont se réunir à la demande de l’Arabie saoudite pour voir dans quelle mesure amortir le choc. Premier producteur mondial de brut, le royaume du Golfe a pris à bras-le-corps la question. La RDC prendra part à la grande réunion qui se tiendra, en septembre, à Ryad.
Considérée comme un scandale géologique grâce à ces ressources minières, la RDC est un nain dans le cercle des pays producteurs de pétrole. Sa production quotidienne est marginale (moins de 25000 barils). Cette production s’effectue, depuis plus de quarante ans, grâce aux gisements situés à Muanda, sur la côte Atlantique. Les spécialistes estiment que les gisements pétroliers de Muanda sont constitués de puits marginaux ou en fin de vie. Par conséquent, la production attendue ne pourra guère excéder le volume actuel. Opérationnel depuis 2000 à Muanda, dans la province du Bas-Congo, Perenco produit 25000 barils de pétrole brut dans les champs onshore et offshore du bassin côtier. Grâce à des investissements importants et à une technologie innovante, la société a su valoriser des champs matures et marginaux pour maintenir la production des champs abandonnés, auparavant, par d’autres opérateurs. Le groupe a fait recours à des techniques de récupération sophistiquées qui consistent à injecter de l’eau et du gaz dans les puits, afin d’augmenter le taux de récupération des hydrocarbures. Grâce à un investissement conséquent, Perenco a pu maintenir cette production ridicule à son niveau actuel. Cela est le résultat d’un travail du producteur sur la zone d’exploitation, en vue de lutter contre le déclin naturel de ces champs. Dans la pratique, la valorisation de ces champs a permis de maintenir et d’augmenter légèrement la production, en jouant sur la rationalisation des coûts, afin d’en baisser, au maximum, la limite économique et repousser la fin de l’exploitation. Les champs matures sont ceux dont la production cumulée est supérieure à 90 % des réserves prouvées, des champs en fin de vie, dont la rentabilisation économique nécessite une approche et des stratégies particulières.
Projets et utopies
Des experts affirment que les champs matures de Muanda sont arrivés en fin de vie et que la RDC doit réorienter sa stratégie. Ils proposent par exemple de valoriser le gaz associé et d’éviter le recours systématique au torchage (à Muanda, le gaz est brûlé à la torche depuis quarante ans). Des projets sont envisagés à cette fin. C’est le cas notamment du projet « gaz naturel liquéfié », initié par Chevron, en vue de relier Cabinda à la station terminale de liquéfaction de Soyo, en passant par le permis offshore de Perenco. Le deuxième projet, appelé « gaz naturel compressé », vise l’usage domestique du gaz fourni par Perenco et mis en condition dans des bouteilles destinées aux gazinières publiques, et accessibles aux communautés locales, moyennant un montant à payer par les utilisateurs. En 2013, la société a procédé au forage de deux puits de délinéation à terre, pour la mise en œuvre de ce projet. Ces réserves associées au pétrole, sont estimées à 20 milliards de m3 en offshore, et à 10 milliards de m3 en onshore.
D’autres proposent d’intensifier les activités d’exploration-production des ressources pétrolières et gazières sur toute l’étendue de la République. Après la domination du secteur agricole et le boom minier des années 1980, indiquent-ils, la donne a changé. L’exploration pétrolière des trois bassins sédimentaires indique la présence de potentialités énormes en hydrocarbures dont la mise en production fera effectivement du secteur, le nouveau levier de développement de la RDC. Selon les spécialistes, avec la production marginale du bassin côtier, le secteur se classe parmi les grands pourvoyeurs de l’État en recettes financières avec une contribution au budget de l’État de plus de 400 millions de dollars. Selon eux, la RDC dispose d’un potentiel important à travers ses bassins sédimentaires qui font l’objet d’intenses campagnes de recherche par les experts depuis 2012. Parallèlement à ces travaux, des sociétés pétrolières en contrat poursuivent l’exploration de grande envergure dans les blocs pétroliers qui leur ont attribués. La sismique effectuée par Oil of DRC dans les blocs I et II du Graben Albertine présente les ressources pétrolières estimées à plus ou moins 3 milliards de barils, lesquels, une fois confirmés par les travaux supplémentaires de forage et sismique 3 D, permettront à la RDC de réaliser 75000 barils/j. Cette année sont attendus les résultats de la sismique réalisée sur le bloc V du même Graben.
Dans le Graben Tanganyika, des indices de pétrole arrivent jusqu’à la surface de l’eau. À ce jour, personne ne peut dire combien de tonnes d’hydrocarbures sont enfuies sous les eaux du lac. Par ailleurs, la Cuvette centrale offre d’intéressantes opportunités, avec un bassin de plus de 800 000 km². D’autres relancent l’idée de la délimitation des frontières maritimes congolaises et l’harmonisation des vues avec l’Angola. Cette dernière piste a pris du plomb dans l’aile. Les travaux de la commission mise en place par la RDC pour traiter de la question piétinent. La commission elle-même est plongée dans une profonde léthargie et ses membres rasent les murs à Kinshasa. Le sujet est devenu tabou et plus personne n’en parle. Pourtant, le gouvernement congolais avait annoncé… …la tenue, courant août 2014, d’une réunion d’harmonisation des termes de référence entre experts angolais et congolais. Depuis, plus rien. La solution de ce différend aurait permis à la RDC de récupérer des champs actuellement en exploitation par l’Angola et porter sa production journalière à…600 000 barils. Les autorités congolaises ont préféré abandonné cette piste pour ne pas énerver le voisin angolais.
Elles se sont tournées plutôt vers l’Est, précisément vers le Graben Albertine, où elles ont décidé de détruire une partie du parc des Virunga, sous prétexte d’évaluation des réserves nationales. La levée des boucliers des populations civiles, soutenues par des ONG internationales et certains pays désireux de protéger l’éco-système a quelque peu refroidi leurs ardeurs, mêmes si elles n’ont pas encore dit leur dernier mot.
Malédiction ?
Si le pétrole congolais a rapporté, pendant des années, des ressources au budget de l’État, il a surtout permis d’enrichir quelques réseaux. À Muanda, les traces physiques laissées par l’exploitation pétrolière se déclinent en peu de chose. Cette production a fait l’objet d’une autre préoccupation des Congolais plusieurs années durant. Personne ne peut expliquer pourquoi, depuis la sortie de la première goutte de pétrole du sol congolais, la quantité est restée figée.
Bon an mal an, les statistiques sont restées les mêmes. Pendant ce temps, la production d’autres pays, comme le Gabon, le Congo Brazzaville, l’Angola ou encore le Nigéria, pour ne citer que ceux-ci a atteint des pics. Actuellement, l’Angola produit plus de 1,8 million de barils de brut par jour. Le Gabon en produit plus de 450 000 et le Congo-Brazza environ 350 000. Des nouveaux venus au club à l’instar du Tchad, ont connu un boom pétrolier impressionnant et lancé des programmes de développement de leur territoire. L’argument selon lequel la zone de production ne couvre pas plus de 6 000 km² n’est pas crédible.
Outre la RDC, les plus grands producteurs de pétrole du continent africain, le Nigeria, la Guinée Équatoriale, l’Angola, l’Algérie, la Lybie, le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Cap Vert, le Tchad sont attendus à Ryad. Entre la découverte d’un gisement et sa mise en production, le temps estimé est de dix à quinze ans. Pendant ce temps, le prix du baril aura connu diverses fortunes. Avec 13% de la production mondial, l’Arabie saoudite est actuellement le plus grand exportateur de pétrole au monde. Dans ce pays, 80 % des revenus proviennent de l’or noir.