Qu’est-ce qui va changer dans la pratique ? That is the question, comme disent les Anglophones. Eh bien, on retiendra utilement que le nouveau code des accises supprime des amendes jusque-là fondées sur la valeur, réduit le taux de celles relatives aux droits et instaure la déclaration mensuelle en lieu et place de la déclaration décadaire, avec comme corollaire la suppression des crédits de paiement.
Dans les services de la Direction générale des douanes et accises (DGDA), on s’en félicite. On souligne que « l’État a opéré un changement de faits générateurs de droits d’accises, l’assiette imposable est plus clairement précisée, autant que la réglementation de la sous-traitance et de la déclaration de possession ». Autres innovations à retenir : c’est la déductibilité des droits d’accises acquittés sur les matières premières mises en œuvre dans la production de marchandises soumises aux droits et éventualité suivant la conjoncture. C’est aussi l’application d’un droit d’accises spécial à toutes les marchandises soumises aux droits d’accises.
Il convient de rappeler que l’accise est en pratique une taxe, un impôt indirect levé sur la consommation ou le commerce de certains produits, tels que le tabac, l’alcool, les préparations capillaires, le parfun, le pétrole et ses dérivés. Elle porte sur une quantité et non sur une valeur. En République démocratique du Congo, la douane table sur quelque 478.1 milliards de francs de recettes des droits d’accises pour 2018, dont 329 milliards en mode régime intérieur.
Des bonnes perspectives
La régie financière, c’est-à-dire, la DGDA escompte davantage pour 2019, si la nouvelle loi entre dès à présent en application. Par exemple, les importateurs de cirages ont engrangé plus de 28.7 milliards de francs au cours de l’exercice fiscale 2017. Et la DGDA compte en tirer 10 % au titre des droits d’accises à l’importation, soit 2,8 milliards. La douane précise que la perception des droits d’accises sur les cirages porte également sur des produits connexes comme les agents de surface organiques, les savons et les préparations lubrifiantes. En 2016, la DGDA avait glané près de 2 milliards de nos francs sur les importations de cirages et produits assimilés. Le taux de réalisation était alors de 111.81 %. En 2015, les recettes ont titillé les 2,5 milliards alors qu’elles étaient de plus de 7 milliards en 2014.
Pour ce qui est des eaux de table, limonades et jus, le pic symbolique de 500 000 hl d’eaux de table aurait été atteinte en décembre 2017, selon des experts du ministère de l’Industrie. Mais la DGDA prévoit plutôt pour 2018 une production minimale de 460 807 hl d’eaux de table et 3 058 485 hl de limonades et jus. Et pour lesquels elle compte percevoir 16.3 milliards de nos francs, soit environ 15 millions de dollars de droits d’accises.
Cependant, les mêmes produits importés ne devraient rapporter à la douane que moins de 2 millions de dollars. De par leurs étiquettes, des eaux de table et des jus vendus sur le marché local rappellent le Canada, les États-Unis, l’Égypte, etc. Et pourtant, tous ces produits ou presque sont fabriqués à Kingabwa, le quartier industriel de la commune de Limete ou encore des produits des petites et moyennes entreprises (PME) installées dans le Kongo-Central le long de la route nationale n°1 (RN1), l’axe Matadi-Kinshasa.
En 2016, la DGDA a perçu plus de 12,7 milliards de francs sur des assignations de 21 milliards, contre 1 milliard sur les eaux de table, jus et limonades importés. En 2015, la production locale a rapporté à la douane 12.6 milliards de francs et 13,3 milliards en 2014. Par ailleurs, le ministère de l’Énergie et des Ressources hydrauliques chiffre à près de 2.5 milliards de francs, environ 2 millions de dollars, la redevance 2017 sur les auto-producteurs d’eaux naturelles, minérales et thermales. En 2016, la redevance qui est, en pratique, perçue par la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD), a été captée à plus de 2.961 %, soit plus de 1.3 milliard de francs sur des attentes d’environ 46 millions.
L’industrie des eaux de table et produits connexes reste concentrée entre les mains des expatriés, généralement indopokistanais et libanais : Aqua Cool, Aqua Rim, Abeer, Canadian, American, Alpina… Certains nationaux financés par le Fonds de promotion de l’industrie (FPI) se sont aussi lancés dans « l’aventure ».
Recettes en baisse
En ce qui concerne les articles et ouvrages en caoutchouc synthétique, l’essentiel provient de l’étranger. Il s’agit particulièrement des pneumatiques. Le secteur dépend, pour trois quarts de sa production, de l’industrie automobile. Le reste est utilisé pour des demi-produits (mélanges, feuilles, plaques…) et des produits finis (tuyaux, joints, bottes, tétines…). Mais la douane n’a pas pu cependant atteindre ses assignations globales pour 2017 : quelque 7 milliards de francs.
En 2016, la DGDA avait atteint un taux de réalisation de 171.4 %, soit 4,8 milliards sur des prévisions de 2,8 milliards. En 2015, les services de la douane avaient tablé sur des recettes d’importation de 11,8 milliards de francs, mais moins de 32 % des sommes attendues ont été versées, soit 3 730 444 263 FC. En 2014, la DGDA avait perçu plus de 7.4 milliards de francs sur des prévisions de 11,1 milliards. Ces recettes en baisse continue sont notamment la conséquence de graves défaillances dans la prise en charge des marchandises, ont relevé des agents de la DGDA, lors de la dernière conférence des directeurs généraux et provinciaux de la douane en vue de mûrir les stratégies pour atteindre, sinon dépasser les assignations de 2018. Parmi les stratégies retenues, il y a le renforcement du contrôle a posteriori et de régularité des opérations de dédouanement, le contrôle de la destination et de la mise en œuvre des marchandises exonérées. Mais le plus dur reste à faire, d’après les observateurs. C’est la gestion des postes frontaliers et des postes frontières où les services de l’État autorisés à y prester ont en permanence maille à partir avec des éléments des forces armées et des services de renseignement.
Le gouvernement a d’ailleurs reconnu récemment que des « résistances » ont été observées ici et là dans l’application de l’ordre opérationnel limitant à 4 le nombre des services pouvant intervenir aux postes frontaliers. Cependant, le ministre de la Communication et des Médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga, a soutenu que des « mesures réglementaires et pratiques » ont été adoptées par le conseil des ministres pour y pallier. L’application intégrale du décret n°036/2002 du 28 mars 2002 désignant les services habiletés à œuvrer aux frontières a déjà fait l’objet d’une question orale avec débat à l’Assemblée nationale. Les recommandations des élus qui en sont découlées, plus de trois ans après, n’ont guère connu un début d’exécution. Des hommes en uniforme sont encore présents aux postes frontaliers. Par exemple, on rapporte qu’à Lufu dans le Kongo-Central, des cargaisons des pneus entrent frauduleusement… sous bonne « escorte militaire ». Autres zones d’entrée des articles et ouvrages en caoutchouc synthétique : ce sont les villes frontalières avec l’Ouganda, à l’Est de la RDC, notamment Mahaghi-Port, Aru, Kasindi, etc.
Au pays, cependant, la transformation locale du caoutchouc n’est plus que de l’histoire ancienne. À Kinshasa, officiellement, il n’y a plus qu’une seule usine qui exploite le caoutchouc synthétique. Les succursales de Goodyear, Michelin, etc. ont toutes fermé, victimes des pillages de triste mémoire des années 1991 et 1993. En 2015, l’État n’a perçu qu’un 1 million de francs des droits d’accises sur les articles et ouvrages locaux en caoutchouc synthétique. En 2016, alors qu’il n’avait rien prévu dans son budget, quelque 17.6 millions de francs lui ont été quand même versés comme droits d’accises en régime intérieur. Les prévisions de 2017 étaient d’un peu plus de 28 millions de nos francs. Rien, alors rien, n’a été prévu pour l’exercice 2018.