C’EST à cette exigence qu’a décidé de se plier le gouvernement pour aider l’équipe dirigeante de la Congolaise des voies maritimes (CVM) à surmonter les difficultés de gestion, en analysant tous les aspects de la situation actuelle pour formuler à partir de ce diagnostic les objectifs à atteindre et les moyens et les mesures à prendre pour réagir face au contexte difficile. Le déplacement de Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, à Boma, le mercredi 2 décembre, pour présider la cérémonie de remise de la drague baptisée « Manzanillo 2 » à la CVM est tout un symbole. Et le personnel de cette entreprise publique, voire des notabilités de la province du Kongo-Central, se sont rangés pour lui réserver un accueil chaleureux, mais surtout pour lui témoigner leur reconnaissance de son implication personnelle dans la recherche des solutions aux difficultés de cette entreprise publique.
L’émotion était vraie, car il y a vraiment longtemps que la CVM, ex-RVM (Régie des voies maritimes), avait acquis une drague. La dernière acquisition remonte à plus de 41 ans. Sans blague ! L’activité de la CVM repose essentiellement sur l’entretien du bief maritime. Mais l’insuffisance de la capacité d’exploitation a imposé à la société, pour une couverture plus large de sa sphère d’exploitation, de recourir à la location de l’outil de travail pendant plusieurs années. En acquérant un outil de travail moderne, la Manzanillo 2, quoique d’occasion, la CVM va se remettre au travail, avec l’effet d’améliorer le rendement de la société, ont promis dirigeants et travailleurs.
Un pôle stratégique
Les ports de Boma et de Matadi forment un pôle stratégique pour l’économie du pays. L’exploitation du bief maritime connaît depuis plusieurs années un affaiblissement caractéristique de la crise actuelle. Pourtant, le rôle et l’apport de la CVM dans l’économie nationale sont primordiaux, comme l’a souligné, Atu Matubuana, le gouverneur de la province du Kongo-Central. « À cause de la vétusté de ses équipements, la CVM ne pouvait plus offrir à la navigation des calaisons (différence de tirant d’eau d’un navire, selon le chargement qu’il porte ou profondeur d’un navire du premier pont au fond de la cale) stables et conformes à la demande des armateurs », a-t-il rappelé.
Et de poursuivre : « À l’ère du développement des autres ports d’Afrique, la République démocratique du Congo doit à tout prix éviter la marginalisation de ses ports maritimes. Pour cela, des réformes structurelles et techniques sont indispensables afin de créer des conditions propices pour attirer et sécuriser les opérateurs économiques maritimes en RDC. Cela passe nécessairement par l’amélioration des conditions de navigation dans le bief maritime et l’efficacité dans le traitement des navires et des marchandises à quai. »
Face à ces challenges, la CVM se doit d’améliorer ses performances à travers la réhabilitation et la modernisation de son outil de travail, particulièrement la drague. C’est dans cette optique que le gouvernement a inscrit, d’ailleurs, dans le Budget 2021 l’acquisition d’une drague neuve et d’un dock (entrepôt pour les marchandises) flottant. Dans le cadre du protocole d’accord tripartite (gouvernement-CVM et syndicat) signé en octobre 2019, les travailleurs ont mis en avant la réhabilitation de l’outil de travail plutôt que leurs conditions de vie. Et le gouvernement s’est engagé donc à doter, dans un premier temps, l’entreprise d’une drague d’occasion, certes, mais puissante.
C’est chose faite désormais. D’où la joie et les remerciements à la pelle adressés au 1ER Ministre mais aussi au président de la République pour cette acquisition. « C’est sûr que sur le plan de la productivité, il y aura un changement, car c’est une drague high tec. Elle nécessite d’ailleurs le renforcement des capacités des équipes à bord, surtout en matière d’informatique parce que tout est électronique », a déclaré Marie Madeleine Mienze, la présidente du conseil d’administration de la CVM. D’ailleurs, les équipages devront suivre une formation accélérée d’au moins trois mois avant de pouvoir être opérationnels à bord de la Manzanillo 2, « un outil moderne, plus performant que les vieilles guimbardes que la société avait auparavant. »
Quant à elle, Christine Tusse, la directrice générale de la CVM, a vivement remercié le 1ER Ministre pour « son » implication personnelle dans le dénouement du financement pour l’acquisition de « cet important outil de travail ». En effet, grâce à Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le gouvernement a cédé la créance de l’État de 5 millions d’euros à la CVM sur le préfinancement de la première campagne de dragage complémentaire dans le cadre du partenariat CVM-Trading International (spécialisé dans le balisage maritime). Et grâce au 1ER Ministre également, le crédit sollicité auprès du Fonds de promotion de l’industrie (FPI) de 5 millions de dollars a été obtenu en juin dernier.
Le plan d’action
Le mercredi 2 décembre 2020 restera un jour mémorable pour les agents de la CVM. En effet, la compagnie est confrontée à des difficultés : arriérés des salaires, manque d’équipements, etc. Sous le 1ER Ministre Augustin MatataDu temps d’Augustin Matata Ponyo (2012-2016), le gouvernement avait instauré une redevance maritime de 2,47 dollars la tonne à payer par les armateurs pour le compte de la CVM. Cette redevance devrait servir à financer les travaux de balisage du bief maritime qui ouvre sur les trois ports internationaux de la RDC, Banana, Boma et Matadi. En plus de la taxe à la navigation maritime.
Il faut dire que la CVM a rencontré l’opposition des opérateurs économiques. Ces derniers ne voyaient pas pourquoi ils devaient de payer cette redevance, estimant que la CVM ne leur rendait aucun service en contrepartie. Il faut dire aussi que les recettes venant de la taxe à la navigation étaient vraiment insignifiantes faute de navires utilisant le bief maritime national. En effet, les armateurs préfèrent encore le port de Pointe-Noire en République du Congo aux ports de Boma et de Matadi en RDC. C’est ainsi que le gouvernement a accepté le partenariat public-privé entre la CVM et la firme Trading International pour le balisage du bief maritime. Le contrat de partenariat était de 10 ans. Trading a réalisé trois activités de balisage sur le bief maritime. Mais la CVM tenait à avoir une drague en propre. Le comité de gestion de la CVM dirigé par Christine Tusse a pris le pari de viabiliser l’entreprise, surendettée et en cessation des paiements. La délégation syndicale a invité la nouvelle DG à « payer les arriérés des salaires ainsi que les avantages et les prises en charge » dus aux agents.