L’enquête a montré que l’octroi de crédits est généralement consacré par la signature d’un contrat en bonne et due forme. Cependant, la plupart des fonctionnaires et agents de l’É déclarent n’avoir pas bénéficié d’un temps de réflexion suffisant pour examiner calmement les termes du contrat. La signature du contrat est intervenue directement après l’explication des termes par l’agent de crédit et ils ont été dans une certaine mesure obligés de signer les contrats sur le champ. Elle a également montré que la plupart des personnes interrogées (91 %) ne connaissent pas bien les pénalités liées aux contrats de prêt auxquels ils souscrivent.
Tout comme ils ne comprennent pas très bien les méthodes de calcul d’intérêts et leurs implications. Les participants aux focus groups ont témoigné que la présentation des données financières par les banques n’est pas du tout claire. En effet, ils estiment que les informations mises à leur disposition sont partielles, et ils ont le sentiment que cet état de choses est entretenu afin de limiter les éventuelles revendications des clients. Généralement les clients les plus instruits s’informent mieux que les clients les moins instruits, qu’il s’agisse de l’ouverture des comptes ou de demande de crédits ou de prêts.
Les règles relatives à la transparence exigent que les institutions financières fournissent à leurs clients ou au public en général une information sur les tarifs et les autres conditions relatives à leurs produits et services. L’information doit être publiée sous un format standard et facile à comprendre qui permette aux consommateurs de comparer l’offre de différentes institutions. L’information doit être donnée lors de tout acte de promotion avant la vente, au moment de signer le contrat, ou durant la période contractuelle. Certains pays ont adopté des règles simples, notamment la publication d’un taux effectif global calculé en utilisant une formule standard qui inclut les garanties bloquées, les commissions et les frais divers mais aussi un échéancier de remboursement. Dans d’autres pays, la loi requiert une information complète du coût réel du crédit. Le créancier doit mentionner le montant fourni en prêt, l’acompte, les charges détaillées, le montant total financé. Le coût total (intérêts et frais) ainsi que le taux d’intérêt global….
Taux d’intérêts élevés
Les participants à l’enquête soutiennent que les taux d’intérêt annuels appliqués par les institutions financières sont relativement élevés. Près du cinquième des personnes interrogées affirment avoir fait face à un taux d’intérêt nominal annuel compris entre 13 % et 20 % ou avoir supporté un taux d’intérêt annuel de plus de 20 %. La plupart des remboursements se font mensuellement. Les coûts des opérations financières sont plus élevés du fait du prélèvement des frais de déboursement (ou de dossier et de tenue du compte), de la commission bancaire, et de l’assurance crédit.
Les spécialistes pensent que la perception des consommateurs sur les taux d’intérêt doit être mise en perspective avec la structure des coûts d’exploitation des banques en RDC, généralement plus élevés. Ceci peut être révélateur des difficultés rencontrées par les banques dans l’environnement dans lequel elles opèrent mais aussi une indication d’une certaine inefficience qui pourrait disparaître au fil du temps avec une concurrence saine. L’objectif à long terme serait de tendre vers des marges d’intermédiation financière très faibles à l’instar de ceux des pays
… de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) qui sont en moyenne de 2 %. Ces faibles marges sont le fait d’une concurrence saine entre institutions financières et d’infrastructures de haute qualité plutôt que le fait d’une imposition de taux d’usure par les pouvoirs publics.
La question des marges de profit réalisées par les institutions financières congolaises par rapport aux taux et frais pratiqués mériterait sans doute une étude plus approfondie. En matière d’affichage des conditions, les personnes qui utilisent les transferts sont suffisamment informées des conditions d’envoi et de réception de fonds. Du reste ces conditions sont généralement affichées dans les différentes agences des messageries financières. Les domaines qui mériteraient une réflexion dans le pilier transparence sont la définition d’une formule de taux effectif global qui faciliterait la comparaison des prix des crédits offerts dans plusieurs institutions, la présentation des contrats dans un langage compréhensible par les clients, l’assistance obligatoire des clients illettrés par un témoin lors de la signature des contrat et l’octroi d’un temps de réflexion aux clients avant la signature des contrats.
Corruption et surendettement
L’enquête a révélé un certain nombre de cas de corruption dans l’octroi des crédits par les banques. En effet 17,5 % des clients ayant déjà demandé un crédit ont attesté avoir versé des pots de vins pour que leurs crédits soient déboursés. En outre, 20 % des enquêtés considèrent la corruption comme étant un obstacle majeur à la demande de crédit. Conséquence : certains dossiers de demande de crédit économiquement plus viables ne sont peut-être pas financés au détriment de projets peu viables.
Selon les spécialistes, la prévention du surendettement passe par l’adoption de comportements responsables de la part des prêteurs, aidés par les progrès de la technologie et par de saines règles de discipline de marché. D’une manière générale, explique-t-ils, le banquier engage sa responsabilité en cas de soutien abusif/excessif, sous réserve de disposer d’une information pertinente et à jour. Le deuxième élément est constitué par la Centrale des risques de la Banque centrale. À ce propos, une instruction spécifique de la Banque centrale la réglemente et précise les conditions d’accès à la base de données. L’usage des systèmes d’information sur le crédit peut conduire, non pas à écarter les risques élevés, mais à l’octroi de crédits à des conditions financières retranscrivant le risque… et accentuant le processus de surendettement, à des conditions qui potentiellement restent rentables pour le prêteur.
Le troisième élément juridique essentiel est la discipline de marché. Cette discipline peut être organisée et encouragée par l’adoption de règles simples favorables aux premiers prêteurs et par là même défavorables aux établissements venant ajouter des crédits alors qu’un ou plusieurs autres crédits ne sont pas encore totalement amortis. Ainsi, une norme pourrait créer premièrement un privilège légal en faveur des créances inscrites, en classant les créances en fonction de leur numéro d’ordre d’inscription de la créance… Le dernier prêteur est alors, en l’absence de garantie enregistrée, le dernier à être servi en cas de saisie vente ou attribution (ce qui supprime la loi de la course) : cela pousserait à décroiser les crédits et dissuader les prêteurs additionnels (lesquels, en cas de difficulté de l’emprunteur, sont quasiment assurés de perdre leur créance car en termes de saisie, ils arrivent après tous les autres créanciers).
Deuxièmement, imposer une provision progressive selon le même système, sur la créance saine dès lors qu’un ou plusieurs créanciers sont inscrits dans la centrale. Par exemple, le préteur en second devrait provisionner 5 % du crédit
sain. Le prêteur en troisième devrait provisionner 10 % ; et ainsi de suite. L’octroi d’un crédit alors qu’un ou plusieurs crédits sont en cours, aurait un impact négatif significatif sur le compte de résultat et sur le bilan du prêteur additionnel ; afin de ne pas trop dégrader cette situation financière (ce qui rend plus difficile l’atteinte des différent ratios basés sur la rentabilité ou les fonds propres prudentiels), l’établissement de crédit limiterait fortement les crédits à des personnes déjà endettées. Ceci diminuerait les risques de crédits de cavalerie, et plus largement, diminuerait les risques inhérents aux crédits croisés.
Au final, les emprunteurs risqueront moins le surendettement.
Les spécialistes préconisent que ces éléments juridiques puissent être combinés avec un code de déontologie qui préciserait comment éviter que les clients s’endettent au-delà de leurs capacités. Les banques déclarent être conscientes des risques de surendettement. Pour prévenir tout risque, elles évaluent préalablement la capacité financière du client en tenant compte de la règle du droit du travail qui impose un plafond de 33 % du salaire net, et en évaluant le cash-flow et la marge brute d’autofinancement pour les entreprises. Il faut néanmoins signaler l’émergence des crédits consommateurs, tels que les crédits dit d’urgence et les avances sur salaire, ainsi que des évidences anecdotiques de banques ayant tendance à prêter à des fonctionnaires sans se soucier de l’endettement trop élevé. Il faut que la BCC reste attentive à la possibilité de crédit à très court terme en boucle où une avance sur salaire se fait de mois en mois créant ainsi un endettement sans fin.
En l’absence d’une centrale de risques appropriée qui devrait renseigner les participants en temps réel sur le risque à engager, la plupart des banques disent avoir développé un réseau informel de renseignement sur la clientèle pour circonscrire la cavalerie financière. Cependant, ces précautions ne sont souvent prises que pour des crédits portant sur des montants élevés. Pas moins de 87 % des clients interrogés dans l’échantillon ont déjà fait face à des situations qui les ont amenés à ne pas rembourser leur crédit. Cette statistique est très élevée. Elle renseigne qu’il y a peut-être un certain degré de déficience dans l’analyse de crédit dans les institutions financières.
D’autres raisons pourraient évidemment intervenir, tels que des aléas externes qui touchent l’emprunteur ou sa famille (problèmes de santé, insécurité, calamités…) ou l’inadéquation du produit financier au client (par exemple, si on lui accorde un prêt trop élevé). Cette question mériterait une étude plus approfondie. Il existe déjà une centrale de risques accessible aux banques. Cependant sa consultation n’est pas considérée comme très utile car il y a un risque élevé de confusion au niveau des noms des clients, aggravé par le fait qu’il n’existe pas d’identifiant unique en RDC, ni de document d’identité standardisé disponible pour toute la population.
Une première modernisation est en cours et est accessible en ce moment à un nombre limité d’institutions. Cependant, malgré des améliorations apportées au niveau des données d’identification des personnes (date de naissance…), ce système ne mettra pas fin aux possibilités de confusion entre personnes. La seconde phase de la modernisation consistera à développer un système basé sur la biométrie qui permettra de créer un identifiant unique qui répondra aux problèmes d’absence d’identité nationale Ceci devrait ainsi faciliter les procédures d’identification du client et sécuriser les données.
La modernisation et la mise en place de la centrale des risques inclusive recensant et renseignant sur tous les risques encourus par tous les établissements de crédit sera une contribution capitale pour la prévention de surendettement de la clientèle des banques et des autres établissements de crédits. En cas de surendettement, les banques affirment proposer aux clients des prorogations d’échéances après réévaluation de leur capacité financière.
En cas de mauvaise foi du client, qui n’aurait pas respecté l’accord, l’opération pourrait se solder par un impayé, une saisie de ce qui peut l’être et le provisionnement, puis la passation en perte du capital restant dû. Ce n’est qu’en cas de mauvaise foi que les banques disent exécuter les garanties.