Mauvais élève. C’est la mention accordée au gouvernement par un panel d’organisations de la société civile. Une analyse réalisée à Kinshasa, de juin à juillet par l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), sur l’exécution des budgets 2012-2014 et publiée fin août, démontre que les intérêts de la population ont été sous-représentés dans le processus budgétaire relatif à cette période. Á la suite de la cour des comptes, l’ODEP relève de graves irrégularités dans l’élaboration et l’exécution de la loi de finances au cours des exercices concernés.
Non-respect des axes prioritaires. Dépassements excessifs des crédits octroyés à certaines institutions du pays. Sous-consommation. Retard dans la transmission de documents ou leur absence…Telles sont les caractéristiques des différents budgets votés en République démocratique du Congo. La mobilisation des recettes et leur affectation sont passées au peigne fin. L’ODEP met l’accent sur une faible affectation budgétaire aux secteurs de la santé et de l’enseignement. L’Observatoire fait remarquer qu’après la promulgation de la loi de finances publiques (LOFIP), le 13 juillet 2011, le gouvernement avait conçu le budget des exercices 2012 et 2013 autour d’un programme, avec des objectifs regroupés en six axes prioritaires. Les résultats sont décevants. Et pour cause. Prévues pour 6.609.171.209.773 de francs congolais, les recettes de la loi de finances 2012 ont totalisé 4.333.730.669.670,48, soit une réalisation de 65,57%, se traduisant par une moins-value globale de l’ordre de 2.275.440.540.102,52 (34,43%) de francs. Sur ces réalisations, les recettes internes ont atteint 3.639.437.534.941,42 sur les prévisions de 4.260.292.306.769,00, soit une moins-value de 620.854.771.827,58 (14,57%). Quant aux apports extérieurs, ils ont été largement en-deçà des prévisions, soit 694.293.134.729,06 de francs sur des prévisions de 6.609.171.209.773, avec les mêmes faiblesses que pour les précédents exercices, aussi bien dans les dépenses courantes que dans les investissements.
Autre sujet de préoccupation, l’ODEP relève plus la consommation des crédits en dépassement et l’exécution des dépenses sans crédits budgétaires, actes constitutifs de fautes de gestion que réprime la loi. S’agissant des dépassements, le constat fait ressortir que les institutions publiques sont passées maîtres dans cet exercice. Parmi les champions incontestés, la présidence de la République a consommé en 2012 144,8% ; 249,8% en 2013 et 160,6% en 2014. La primature lui emboîte le pas avec 146% de crédits consommés en 2012, 244,4% en 2013 et 208,3% en 2014. La vice-primature chargée du budget 111,7 % en 2014 ; le Sénat 115,9% en 2012 ; 109% en 2013 et 100,7% en 2014 ; le secrétariat général du gouvernement 179,8% en 2012 ; 155,4% en 2013, 155,9% en 2014 talonnent le duo de tête. Les Affaires étrangères 213,8% en 2013 ; la Coopération internationale 464,1% en 2012 ; 100,3% en 2013 ; la Défense nationale 107,1% en 2012 ; les PTNTIC 128,8% en 2012 et 172,2% en 2013; la Communication et les médias 104,1% en 2012 ; les Sports-Administration 122,8% en 2012, 131,3% en 2013 et 139,2 % en 2014 ; les Affaires sociales 112,1% en 2013 ; la Coopération régionale 126,3% en 2012 ; les Actions humanitaires et la Solidarité nationale 354,5% en 2012 ; le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication 100,6% en 2012, 114,8% en 2013 et la Délégation générale à la Francophonie 285,% en 2012, 271,3% en 2013 constituent d’autres exemples de ces dépassements de plus de 100 %.
Le social laissé pour compte
D’autre part, la société civile signale que la moyenne d’exécution des trois lois de finances du pouvoir central s’est située à 54,3 %. Par conséquent, la réalisation des axes du programme d’action du gouvernement (PAG), pourtant réputés être consacrés au social, a connu un faible taux d’exécution pendant la période considérée. Conclusion de la société civile : « L’objectif de l’amélioration du cadre de vie et des conditions sociales de la population est un slogan, d’autant plus que les ressources budgétaires consacrées à cet objectif n’ont pas connu d’évolution significative ». Le credo de la mandature dite « du social » en prend un sacré coup. La société civile dénonce ainsi la violation de la loi de finances et épingle les fautifs.
Entrave au bon fonctionnement des services
Par ailleurs, la non-consommation et la sous-consommation des crédits entravent le bon fonctionnement des services et l’exécution des projets d’investissement et, partant, la réalisation du programme du gouvernement. Cette rubrique indique que, sur des prévisions en équilibre de 7.259.093.809.205 de francs en recettes comme en dépenses, le budget du pouvoir central pour l’exercice 2013 sous revue a été exécuté à 4.514.109.373.706,74 en recettes (62,24%) et 4.622.958.109.445,07 en dépenses (63,69%), dégageant un résultat négatif (déficit) de 104.848.735.738,33 de francs. Cependant, l’ODEP a noté, en ce qui concerne les recettes, que la part des ressources internes dans le financement du budget a progressé : elle passe de 83,98% en 2012 à 87,02% en 2013. Au sujet des dépenses particulièrement, l’ODEP constate la persistance de la consommation des crédits en dépassement et l’exécution des dépenses sans ouverture préalable de crédits budgétaires, actes constitutifs de fautes de gestion. De même, il condamne la non-exécution et la faible exécution de crédits au détriment de certains services, les empêchant de fonctionner ou de se doter d’équipements et autres infrastructures requis par leur état. La société civile partage les mêmes avis que la Cour des comptes et constate la persistance du non-respect des lois. Elle rappelle que la Cour des comptes a émis des réserves au sujet du résultat des exercices budgétaires 2012 et 2013. Néanmoins, elle note que le budget du pouvoir central dépend entièrement des recettes internes, soit 65,57% en 2012 et 62,24% en 2013.
Observations de la Cour des comptes
La société civile revient sur les observations formulées dans le rapport de la Cour des comptes sur l’exécution de la loi portant reddition des comptes du budget du pouvoir central pour l’exercice 2012-2013. Pour l’exercice 2012, la Cour attendait 8 340 comptabilités de 695 comptables publics principaux répertoriés en 2010. Cent soixante-deux seulement, soit 23,31%, ont produit 1 155 comptabilités au lieu des 1 944 attendues par la Cour. Par ailleurs, sur les 162 comptables publics principaux, seuls 35, soit 21,60% ont produit des comptabilités complètes. Contrairement à 2012, en 2013 près de 80% des comptabilités ont pu être adressées à la Cour des comptes. Comme lors des années antérieures, notamment l’exercice 2012 et 2013, la Cour des comptes n’a jamais fait une déclaration de conformité, faute d’une amélioration de la tenue de la comptabilité et de la gestion de la trésorerie. Une autre observation portait sur le non-respect des délais prescrits par l’article 84 de la LOFIP. Le gouvernement avait transmis à la Cour le projet de loi portant reddition des comptes du budget du pouvoir central pour l’exercice 2012, le 14 juin 2013, la veille de la clôture de la session ordinaire de mars 2013 de l’Assemblée nationale. Le ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des Finances, demandait à la Cour des comptes de « prendre les dispositions utiles en vue de faire parvenir au Parlement [ses] observations dans les meilleurs délais ». Comme en 2012, la Cour des comptes faisait remarquer alors que le projet de loi portant reddition des comptes du budget du pouvoir central pour l’exercice 2013 a été déposé au Parlement le 13 juin 2014. La Cour rappelle que le rapport contenant ses observations est un « rapport de contrôle », car des investigations sont nécessaires dans ce cadre et cela prend du temps. C’est le cas pour le présent rapport : préalablement à son adoption, la Cour a notamment initié des missions en vue de connaître les dividendes versés à l’État par dix-sept entreprises publiques transformées en sociétés commerciales et treize sociétés d’économie mixte : les développements y relatifs figurent dans la seconde partie, consacrée aux recettes. Pour que ses observations puissent parvenir à leurs destinataires dans les délais prescrits à l’article 84 de la LOFIP, la Cour des comptes avait, dans son rapport sur le contrôle de l’exécution de la loi de finances de l’exercice 2011, clairement recommandé que « les données relatives à la reddition des comptes lui soient transmises à une date suffisamment précoce pour lui permettre de procéder aux analyses prévues par la loi ». Elle a renouvelé cette recommandation.
Des retards récurrents devenus la norme
La question des retards dans la publication des documents budgétaires est très récurrente en République démocratique du Congo. Pas seulement pour la reddition des comptes, mais pour plusieurs documents budgétaires que le gouvernement devrait produire et soumettre au débat public et en temps opportun. Pour rappel, il s’agit des rapports préalables au budget, du projet de budget de l’exécutif, du budget adopté, du budget citoyen, du rapport en cours d’année, de la revue de milieu d’année (lois rectificatives), du rapport de fin d’année (reddition des comptes) et du rapport d’audit. Beaucoup de ces rapports ne sont jamais produits, publiés et largement débattus comme souhaité et recommandé dans la déclaration de Dar es Saalam, en Tanzanie, de novembre 2011. Soixante pays et organisations internationales avaient alors jeté les bases de la construction et de la consolidation d’un mouvement mondial en faveur de la promotion d’une budgétisation gouvernementale transparente, responsable et réactive aux besoins des personnes pauvres dans la société. Cependant, comme la cour des comptes, la société civile tient à souligner l’effort du gouvernement d’avoir élaboré et transmis à la Cour la loi portant reddition des comptes du budget du pouvoir central pour l’exercice 2012, rompant ainsi avec une longue tradition de non élaboration de ce type de loi. Le gouvernement renoue ainsi avec un principe fondamental de la bonne gouvernance qui est celui de la redevabilité. La Cour relève aussi l’absence de lois de finances rectificatives du budget, prévues par les articles 26 et 27 de la LOFIP, en 2012 tout comme en 2013. Elle constate en 2012, l’incapacité du gouvernement d’exécuter les dépenses publiques à hauteur des recettes réalisées de l’ordre de 4.333.730.669.670,48 de francs. Le bonus de 431.289.236.842,67 de francs aurait pu servir à payer les dépenses aussi bien courantes qu’en capital de l’exercice, plutôt qu’à « constituer les provisions destinées à financer les investissements dans les secteurs productifs de croissance ».
On relève également la non-conformité du projet de loi portant reddition des comptes à la loi de finances de l’année. Illustration : les dépenses en capital, prévues dans la loi de finances de l’année 2013 de l’ordre de 2.574.117.017.231 de francs, dont 1.529.485.428.766 de francs inscrits à la rubrique « équipement » ; 1.044.631.588.465 pour la rubrique « construction, réhabilitation, addition d’ouvrages et d’édifices, acquisition immobilière ». Dans ses annexes, le projet de loi portant reddition des comptes indique 2.509.163.311.761,00 de francs. Ici, on observe que l’écart avec la loi est de 64.953.705.471, montant qui, s’il était pris en compte, devait au moins changer la part respective des dépenses courantes en capital. L’explication fournie est que la loi contient également, dans sa partie consacrée aux dépenses courantes, des données ayant trait aux dépenses en capital ; ce qui est incompatible avec le prescrit rappelé de l’article 28 de la LOFIP.
Réserves au sujet du résultat de l’exercice
Le rapport de la Cour des comptes sur l’exécution de la loi de finances du pouvoir central montre que, promulgué le 20 juillet 2012, le budget du pouvoir central pour l’exercice 2012 n’a pas été exécuté pendant un exercice budgétaire, comme le veut la LOFIP en son article 5. Pour la Cour des comptes, la reddition de comptes présentée n’est, à strictement parler, ni exhaustive, ni sincère, puisque ne portant que sur cinq mois, les sept autres ayant été couverts par des crédits provisoires. Certes, les recettes réalisées et les dépenses exécutées pendant les sept mois de l’année 2012 sont imputés à cet exercice. Cependant, la Cour des comptes invite autant le gouvernement que le Parlement, autorité budgétaire, à davantage d’attention quant aux conséquences attachées au non-respect des délais prescrits par les articles 126 de la Constitution et 83 de la LOFIP. Comme en 2012, la Cour des comptes montre que l’article 30, alinéa premier de la LOFIP prescrit que « la loi portant reddition des comptes établit le compte des résultats qui comprend le déficit ou l’excédent résultant de la différence entre les recettes et les dépenses du budget général et des budgets annexes ; les profits et pertes constatés dans l’exécution des comptes spéciaux; les profits et pertes résultant éventuellement de la gestion des opérations de trésorerie ». En considération de ce qui précède, la Cour propose la formulation suivante de l’article 13 point b du projet de loi : « Conformément aux articles 59 à 65 de la Loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques, l’exécution des comptes spéciaux pour l’exercice 2013 a donné le résultat suivant : pour une prévision de 307.999.348.335,00, l’exécution indique 253.796.646.075,52 de francs congolais, soit un solde négatif (perte) de 54.202.702.259,48 de francs congolais ».
En conséquence, le compte des résultats de l’exercice est arrêté comme suit : déficit du budget général et des budgets annexes : 104.848.735.738,33 de francs, pertes des comptes, 54.202.702.259,48 de francs congolais, profits de la gestion des opérations de trésorerie : 220.771.270.653,41de francs congolais. Le résultat définitif de l’exercice est de 104.848.735.738,33 de francs ; 54.202.702.259,48 de francs ; 220.771.270.653,41 de francs, soit un total de 61.719.832.654,8 de francs.
Recommandations
La Cour des comptes recommande au gouvernement de respecter le principe de l’annualité posé par les articles 172 de la Constitution et 5 de la LOFIP. Elle l’invite également à respecter, dans la présentation du budget, les éléments constitutifs des recettes et des dépenses, conformément au prescrit des articles 14 (pour les ressources) et 37 (pour les charges) de la même loi ; de se conformer au prescrit de la loi de finances de l’année, qui prévoit les recettes comme étant des minima obligatoires, même si, par rapport à la loi financière du 23 février 1983, telle que modifiée et complétée par l’ordonnance loi 10 janvier 1984, la loi de finances constitue, en la matière, un recul, vu qu’elle ne comporte pas une disposition semblable à l’article 34, qui faisait de la moins-value une infraction ; de lutter contre les contreperformances des trois régies financières, qui accusent des moins-values, en prenant les dispositions susceptibles de conduire à un meilleur encadrement de leurs recettes, car elles relèvent généralement de lui, et le défaut d’anticipation en la matière fait que la Cour lui impute la responsabilité des moins-values qu’elle relève et d’assurer la vulgarisation des décrets du 6 novembre 2013 portant Plan comptable de l’État.
Au sujet des dépassements, la Cour des comptes demande au gouvernement de respecter les termes des articles qui prescrivent notamment que, sous réserve des crédits évaluatifs et provisionnels dont question aux articles 39 et 40 « … les crédits limitatifs, les dépenses sur crédits limitatifs ne peuvent être engagées ni ordonnancées au-delà des dotations budgétaires. » ; sur l’obligation de lois de finances rectificatives du budget ; de poursuivre l’effort de renforcement des capacités des ordonnateurs et des comptables publics, les deux catégories reconnues par la loi comme agents d’exécution du budget, en vue d’une réelle maîtrise de celle-ci, des textes régissant la Cour des comptes, ainsi que du règlement général sur la comptabilité publique.
De son côté, la société civile adhère à ces recommandations, et pour une bonne mobilisation des recettes, elle invite le gouvernement à renforcer l’efficacité des administrations fiscales, douanières et non fiscales avec la mise en place d’un réseau informatique des recettes fiscales et non fiscales et du système douanier ; élargir l’assiette fiscale ; améliorer le rendement fiscal des secteurs des ressources naturelles ; mettre en place une politique particulière de mobilisation des ressources innovantes ; promulguer la loi portant régime général des hydrocarbures ; renforcer les capacités institutionnelles et humaines à la mobilisation des ressources financières ; actualiser le cadre légal existant.
Quant au Parlement, en sa qualité d’autorité budgétaire, premier destinataire des observations de la Cour des comptes, conformément au prescrit des articles 100 et 173 de la constitution ainsi que 123 et 124 de la loi de finances, il est appelé à s’impliquer davantage pour la suite à donner aux rapports de la Cour des comptes afin que, pour chaque exercice, le budget du pouvoir central, son exécution et règlement définitif – à travers la loi portant reddition des comptes- se conforment à ces textes. Le rapport d’analyse de l’exécution du budget du pouvoir central pour les exercices 2012-2014 a été élaboré sous la coordination de l’ODEP avec l’appui financier de Open Society Initiative for Southern Africa ( Osisa), un organisme sud-africain. L’ODEP a été présenté au public en 2011. En sont membres les délégués du GAT, de la Licoco, de SOS Kinshasa, du Recic National, de la Licodef….. . Il a été créé pour fédérer les différentes organisations thématiques membres pour une action concertée afin de mieux suivre et contrôler le processus budgétaire en RDC.
Le contrôle citoyen
Le contrôle citoyen est un moyen pour les citoyens, à travers l’engagement civique, d’exiger du gouvernement, du Parlement, de la justice, des médias, des entreprises ou des bailleurs de rendre compte. À travers la participation directe ou indirecte des citoyens et de la société civile, les approches du contrôle citoyen comme la budgétisation participative, le suivi des dépenses ou le contrôle du service public par les citoyens, peuvent donner la possibilité à ces derniers d’exiger des institutions plus d’attention pour leurs besoins et des services plus appropriés. Le contrôle citoyen est aussi le titre du support Bulletin qui entend informer et analyser les questions de l’heure et le fonctionnement de trois voire quatre pouvoirs au niveau national, provincial, des villes, des communes, territoires, districts et chefferies, etc. Dans ses multiples formes, il se veut l’œil et la voix du peuple sur les questions épineuses d’intérêt commun et général. Il traite donc des questions en rapport avec le fonctionnement des institutions et pouvoirs formels et informels au niveau national et provincial. Il tire son fondement de la démocratie et de la bonne gouvernance. De ce fait, dans la légalité du cadre juridique de l’État de droit. Par État de droit, l’on entend celui dans lequel les actes des autorités sont soumis à la règle de la loi. Ceci voudrait dire que les actions de la société civile dans la gouvernance doivent être prévues et organisées par les règles de droit. Au niveau international, elles sont instituées par des instruments comme la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen, qui édicte le droit, pour tous les citoyens, de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique et d’en suivre l’emploi (…) et qui stipule que « la société a le droit de demander le compte à tout agent public de son administration » et la Convention des Nations unies de lutte contre la corruption qui, en son article 13, dispose que chaque État partie prend des mesures appropriées, dans la limite de ses moyens et conformément aux principes fondamentaux de son droit, pour favoriser la participation active des personnes et groupes n’appartenant pas au secteur public (…). Cette participation devrait être renforcée par des mesures consistant notamment à assurer l’accès effectif à l’information.
Quant à la Convention de l’Union africaine de lutte contre la corruption, elle dit, en son article 12, que les États parties s’engagent à s’impliquer totalement dans la lutte contre la corruption (…) avec la pleine participation de la société civile. Créer un environnement favorable qui permet à la société civile et aux médias d’amener les gouvernements à faire preuve du maximum de transparence et de responsabilité dans la gestion des affaires publiques. Sur le plan interne, le principe de la participation citoyenne est énoncé par l’article 24 de la Constitution de 2006, qui dispose que toute personne a droit à l’information. De même, l’article 27 de cette même Constitution est une base légale du contrôle citoyen, car il indique que « tout citoyen a le droit d’initier une action ou d’adhérer à une action collective sous forme de pétition. Il s’agit là d’une possibilité offerte à tout citoyen de faire ainsi opposition lorsque les pratiques des autorités politico-administratives à tous les niveaux de la République sont contraires à la gouvernance du patrimoine public; au cas où les intérêts des communautés pour tel ou tel autre aspect de la vie sociale sont lésés… »
Un instrument de politique économique
Le budget est l’instrument de politique économique le plus important pour les gouvernements. Il reflète les priorités de politique économique et sociale d’un gouvernement plus que tout autre document. Il traduit les politiques, les engagements politiques et les objectifs sur la destination des fonds et décrit comment les fonds doivent être collectés. Un système budgétaire qui fonctionne bien est indispensable pour élaborer une politique budgétaire durable et encourage la croissance économique. Le travail budgétaire des organisations de la société civile consiste à répondre au principe selon lequel « la priorité numéro 1 des dépenses publiques est de faire correspondre les ressources aux besoins ». Les ONG, spécifiquement l’Observatoire de la dépense publique, travaillent pour combler les lacunes de l’information budgétaire et du processus budgétaire ; et donc améliorer la structure du processus de prise de décision de leur gouvernement. En d’autres termes, le fait de combiner une connaissance approfondie sur une question de politique, comme la santé ou l’éducation, et une solide connaissance des budgets s’est avéré être une méthode exceptionnelle pour influencer les décisions politiques. Ainsi, la participation constructive de la société civile peut améliorer la qualité du débat et des résultats budgétaires.
La bonne gestion des finances publiques est capitale pour le présent et l’avenir de la République démocratique du Congo, qui sort de longues années de crise de légitimité nourrie par des conflits armés. Ces conflits ont entamé le monopole de la coercition de l’État, freiné le développement du pays et réduit ses capacités de gouvernance. Face à cet impératif, la RDC a adopté en 2011 une nouvelle loi relative aux finances publiques (LOFIP). Grâce à cette réforme, la gestion des finances publiques s’effectue dans un cadre juridique et institutionnel adapté au contexte de la Constitution du 18 février 2006, prônant notamment la libre administration des provinces et la décentralisation. Cependant, la LOFIP prône une pratique orientée vers une obligation de résultats pour la réalisation des objectifs de développement dont ceux de la croissance et de la réduction de la pauvreté. Ceci induit une responsabilisation accrue des acteurs. Les ministres chargés des Finances et du Budget ont, chacun en ce qui le concerne, un rôle spécifique dans le dispositif de gestion des finances publiques. Le rôle du premier relève de la gestion de la trésorerie et de l’organisation des services du trésor, assignataires des ordres de dépenses des ministères et institutions. Celui du second relève de la planification, de l’engagement des dépenses et de l’encadrement du contrôle budgétaire. La qualité d’ordonnateur est conférée aux ministres et responsables d’institutions dont les rôles et les responsabilités se trouvent renforcés en matière d’élaboration et de mise en œuvre des programmes à exécuter sous leur autorité, et de résultats à atteindre conformément aux objectifs assignés et aux moyens engagés. Ce nouveau cadre réglementaire des finances publiques apporte la nouvelle pratique de la bonne gouvernance économique et financière. Ainsi, les citoyens, les organisations de la société civile et le secteur privé ont également un rôle à jouer, non seulement d’être un groupe de pression face aux gouvernants mais également de rappeler aux citoyens leurs droits, mais aussi leurs devoirs vis-à-vis de la société. Conscient du rôle de la loi de finances dans la vie d’une nation, l’Observatoire de la dépense publique, dans son rôle de contrôle citoyen des politiques publiques, s’est résolu à faire une évaluation à mi-parcours de l’action gouvernementale contenue dans les budgets 2012-2014. Cela dans l’optique d’établir les responsabilités des gouvernants dans la gestion des affaires publiques.