L’essentiel des articles et ouvrages en caoutchouc synthétique provient, en effet, de l’étranger. Il s’agit particulièrement des pneumatiques. Le secteur dépend, pour trois quarts de sa production, de l’industrie automobile. Le reste est utilisé pour des demi-produits (mélanges, feuilles, plaques…) et des produits finis (tuyaux, joints, bottes, tétines…). La Direction générale des douanes et accises (DGDA) compte doubler au terme du premier trimestre 2018 ses réalisations de l’an dernier, au cours de la même période. La douane avait, en effet, quelque 50 millions de FC au premier trimestre 2017.
Recettes en baisse
Mais la douane n’a pas cependant pu atteindre ses assignations globales pour 2017 en ce qui concerne les articles et ouvrages importés en caoutchouc synthétique, soit quelque 7 milliards de FC (7 008 300 547 FC). En 2016, la DGDA atteint un taux de réalisation de 171.4 %, soit 4,8 milliards de FC (4 861 182 810 FC) sur des prévisions de 2,8 milliards (2 836 301 456 FC). En 2015, le service de douane tablait sur des recettes d’importation de 11,8 milliards de FC, mais moins de 32 % des sommes attendues ont été versées, soit 3 730 444 263 FC. En 2014, la DGDA avait perçu plus de 7.4 milliards de FC sur des prévisions de 11,1 milliards.
Ces recettes en baisse continue sont notamment la conséquence de graves défaillances dans la prise en charge des marchandises, ont relevé des experts de la DGDA, lors de la dernière conférence des directeurs généraux et provinciaux de la douane en vue de mûrir les stratégies pour atteindre, sinon dépasser les assignations de 2018. Parmi les stratégies retenues, il y a le renforcement du contrôle a posteriori et de régularité des opérations de dédouanement, le contrôle de la destination et de la mise en œuvre des marchandises exonérées. Mais le plus dur reste à faire, d’après les observateurs, la gestion des postes frontaliers et des postes frontières où, les services de l’État autorisés à y prester ont, en permanence, maille à partir avec des éléments des forces armées et de services de renseignement.
Le gouvernement congolais a, d’ailleurs, reconnu, il y a encore quelques semaines, que « des résistances ont été observées ici et là dans l’application de l’ordre opérationnel limitant à 4 le nombre des services pouvant intervenir aux postes frontaliers ». Cependant, le ministre de la Communication et des Médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga, a soutenu que des « mesures réglementaires et pratiques ont été adoptées par le Conseil des ministres pour y pallier ». L’application intégrale du décret n°036/2002 du 28 mars 2002 désignant les services habiletés à œuvrer aux frontières a déjà fait l’objet d’une question orale avec débat à l’Assemblée nationale.
Les recommandations des élus qui en sont découlées, plus de trois ans après, n’ont guère connu un début d’exécution. Des éléments de la Garde républicaine, par exemple, se retrouvent toujours aux postes frontaliers. Il nous revient qu’à Lufu, par exemple, des cargaisons des pneus entrent frauduleusement… sous bonne escorte. Autres zones d’entrée des articles et ouvrages en caoutchouc synthétique, c’est des villes frontalières avec l’Ouganda, à l’Est de la RDC, Mahaghi-Port, Aru, Kasindi, etc. Au pays cependant, la transformation locale du caoutchouc n’est plus que de l’histoire. À Kinshasa, officiellement, il n’y a plus qu’une seule usine qui exploite le caoutchouc synthétique. Les succursales de Goodyear, Michelin, etc., ont toutes fermé, victimes des pillages de triste mémoire des années 1991 et 1993. En 2015, l’État n’a perçu qu’un 1 million de FC des droits d’accises sur les articles et ouvrages locaux en caoutchouc synthétique. En 2016, alors qu’il n’avait rien prévu dans son budget, cependant quelque 17.6 millions de FC lui ont été quand même versés comme droits d’accises en régime intérieur. Les prévisions de 2017 étaient d’un peu plus de 28 millions de FC. Rien n’a été prévu pour l’exercice 2018.
Lobi Congo
Il sied de rappeler que le caoutchouc a été parmi les premières matières tirées du sol congolais par les colonisateurs belges. La production du caoutchouc est, en effet, une de pages de plus ténébreuses et sanglantes de la colonisation belge. Léopold II qui a cédé son État indépendant du Congo (EIC) à la Belgique en 1908, a, nommément, été cité dans des rapports des commissions d’enquête de l’époque comme instigateur de l’horrible pratique d’amputation de tout ouvrier nègre qui ne rapportait pas à l’administration du Roi, le stock d’hévéa lui imputé. Le désengagement de l’État de ses plantations a tourné court. Une vingtaine de milliers d’ha des plantations d’hévéa d’où est extrait le caoutchouc sont à l’abandon dans le territoire d’Opala, à 260 km au Sud-Ouest de Kisangani.
Les industries exploitant le caoutchouc ferment à la queue leu leu. En Province Orientale, la plupart d’exploitants, regroupés en coopératives, ont tenté, sans succès, de relancer leurs activités avec le concours de l’entreprise Lobi Congo. La région connaît actuellement une ruée d’exploitants chinois, apparemment méconnus des services publics. La Chine est à ce jour le premier acheteur mondial du caoutchouc, les fabricants utilisant de plus en plus le matériau synthétique.
Des experts tablent sur l’envolée des stocks en Chine et ailleurs. Cependant, la place de référence mondiale des cours mondiaux du caoutchouc demeure le Tokyo Commodity Exchange. En 2016, la consommation mondiale du caoutchouc synthétique a été de plus de 25 millions de tonnes. La production globale de caoutchouc (naturel et synthétique) a enregistré un nouveau record en 2014, à 28,8 millions de tonnes. Et la barre des 29 millions a certainement été franchie en 2015. Cependant, la production de caoutchouc naturel s’est contractée, handicapée par des prix très faibles entre 2015 et 2016.
Comme toutes les matières premières, la sève de l’hévéa souffre de la fin du super-cycle. Les cours du caoutchouc avaient connu de fortes hausses entre 2009 et 2011 : les prix avaient alors été multipliés par 2,5. La RDC, par contre, ne figure même plus parmi les fournisseurs de la France ou de la Belgique. Selon le Syndicat national du caoutchouc et des polymères (SNCP), les principaux fournisseurs de la France en caoutchouc naturel sont l’Indonésie (36.31 %), la Thaïlande (24.34 %), la Côte d’Ivoire (12.05 %), la Malaisie (11.43 %), le Cameroun (3.55 %), le Nigeria (3.28 %), la Guinée (2.51 %), le Vietnam (2.36 %), le Gabon (2.24 %) et le Ghana (1.93%).
En France, le secteur du caoutchouc génère, en moyenne, un chiffre d’affaires de près de 5 milliards d’euros, correspondant pour 60 % à une activité industrielle en France et pour 40 % à une activité de revente.