HERBERT Diess, l’actuel président du directoire du constructeur allemand ; Hans Dieter Pötsch, son président du conseil de surveillance ainsi que Martin Winterkorn, l’ancien président du directoire du groupe, sont tous trois mis en accusation pour avoir « sciemment » informé « trop tard » les marchés financiers des conséquences financières du scandale se comptant « en milliards », et ainsi « influencé le cours boursier » de VW, a indiqué le parquet de Brunswick dans un communiqué.
Le parquet a demandé le renvoi devant un juge pour « manipulation de cours boursier » de ces trois dirigeants du constructeur automobile allemand. Selon l’acte d’accusation de 636 pages, Martin Winterkorn était au courant de la dite manipulation et de ses conséquences possibles « au plus tard depuis mai 2015 », Dieter Pötsch, alors son directeur financier, « depuis le 29 juin 2015 », et Herbert Diess, en charge de la marque Volkswagen, « depuis le 27 juillet 2015 ».
Mais la première communication n’est intervenue qu’en septembre, lorsque Martin Winterkorn avait reconnu la manipulation de véhicules diesel aux États-Unis et dans le monde dans le but d’afficher des niveaux d’émission polluante inférieurs à la réalité et aux normes admises.
Ces révélations ont entraîné une dégringolade du cours de l’action Volkswagen avec des pertes énormes pour des milliers de petits et gros actionnaires du constructeur, qui ont parallèlement engagé une procédure judiciaire collective.
En tout, 11 millions de véhicules truqués se sont retrouvés sur le marché, et le scandale est devenu mondial… et contagieux pour les autres constructeurs allemands, comme Daimler et BMW soupçonnés de pratiques similaires.
Cette annonce est une énième répercussion du dieselgate qui affecte l’entreprise depuis 2015. Selon Reuters, le scandale aurait déjà coûté près de 30 milliards de dollars au groupe de Wolfsburg en amendes, frais juridiques et dédommagements de clients à l’entreprise.
Le groupe avait encore provisionné 5,5 milliards d’euros en début d’année pour couvrir d’éventuelles nouvelles conséquences. Après la révélation de la fraude, Volkswagen avait reconnu avoir trafiqué les émissions polluantes de onze millions de véhicules dans le monde. En Bourse, l’action du constructeur allemand a immédiatement chuté à l’annonce des mises examen, la semaine dernière, perdant 2,68 %.
Moteurs truqués
Dans ce scandale des moteurs truqués, Daimler et Volkswagen, les deux concurrents, sont donc rattrapés par la justice allemande dans deux procédures liées. Le constructeur des Mercedes s’en sort à ce stade avec une amende. Selon toute probabilité, le tribunal de Brunswick va désormais valider le procès, lequel ne sera pas le seul dans le cadre du « dieselgate ». Martin Winterkorn se prépare ainsi déjà depuis avril à un autre procès et cette fois sur le cœur du dossier. Il est mis en accusation pour « fraude aggravée », « abus de confiance » et « violation de la loi contre la concurrence déloyale », aux côtés de quatre autres prévenus.
Si Volkswagen est déjà rompu aux amendes et procédures judiciaires, Daimler se confronte à sa première sanction en Allemagne. Dans un hasard de calendrier judiciaire, et quelques heures seulement après la décision concernant Volkswagen, Daimler s’est vu infliger par le parquet de Stuttgart une amende de 870 millions d’euros. Le parquet a établi une « violation par négligence » au sein du service de Daimler AG chargé des certifications ayant « abouti à l’homologation de véhicules diesel par les autorités, bien que leurs émissions d’oxydes d’azote ne soient parfois pas conformes aux exigences réglementaires ». Daimler, qui a toujours crié son innocence, a annoncé accepter la sanction et a dit renoncer à faire appel de l’amende.
Il continue néanmoins de rejeter les conclusions de l’agence allemande de l’automobile (KBA), qui exige depuis deux ans le rappel de 700 000 véhicules truqués à travers le monde. Pour le concurrent de Volkswagen, la procédure administrative pour infraction est donc close. Mais reste les enquêtes pénales visant quatre de ses responsables, et qui sont, elles, toujours en cours.
Vers le krach industriel ?
Selon des spécialistes, l’effondrement des ventes de véhicules diesel menace nombre de sous-traitants de la filière automobile. Près de 15 000 emplois sur les 38 000 que compte la filière du diesel en France, selon une récente étude de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), pourraient disparaître à court terme.
Pour rappel, le gasoil est classé comme étant cancérogène par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Au regard de la dégringolade des ventes de diesels, leur disparition des vitrines des concessionnaires est parfaitement envisageable. Alors qu’en 2012 plus de sept voitures neuves sur dix commercialisées roulaient au gasoil, la motorisation a vu sa part de marché tomber à 34 % au premier trimestre 2019.
Une bérézina industrielle pour les sous-traitants spécialistes de la technologie. Déjà, le japonais Ibiden, un fabricant de filtres à particules, a été contraint de fermer son usine de Courtenay, dans le Loiret (France), laissant 300 personnes sur le carreau, tandis que le site Bosch de Rodez se bat pied à pied pour sauvegarder ses emplois, et que la Fonderie du Poitou et Saint-Jean Industries, dans la Vienne, placés en redressement judiciaire, ne doivent leur salut qu’à leur reprise, in extremis, par le groupe anglo-indien Liberty House.