Du CP à la 6e, les évaluations révèlent les effets négatifs du confinement du printemps

Le ministère de l’Education nationale présentait ce lundi les résultats des évaluations de rentrée, qui montrent une baisse globale des acquis, mais surtout des différences bien plus visibles selon les milieux sociaux des élèves.

Tout le monde s’en doutait, forcément, mais il manquait des chiffres. Alors, le point presse organisé ce lundi par le ministère de l’Education nationale était très attendu pour mesurer l’ampleur des dégâts du confinement au printemps. Les premiers résultats des évaluations nationales organisées en septembre, et si chères au ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer, sont tombés pour tous les élèves de CP, CE1 et 6e. A la tribune notamment, Fabienne Rosenwald, directrice de la Depp, responsable des statistiques au sein du ministère. Elle résume immédiatement : «Les écarts ont beaucoup progressé par rapport à l’année précédente.» Et ces écarts sont visibles dans toutes les classes concernées par les premiers résultats des évaluations de septembre : CP, CE1 et 6e.

Chez les plus petits, on parle d’une «légère baisse» des acquis en français et en maths, les seules matières concernées par ces évaluations. Ça coince surtout dans des domaines abordés en fin de grande section comme la façon de résoudre les problèmes en maths, la reconnaissance des lettres ou encore la phonologie. 79,3 % arrivent ainsi à distinguer les sons cette année, contre 81,3 % en 2019, une baisse de deux points donc.

En CE1, les compétences restent stables en maths mais elles chutent en français, en particulier dans les domaines de l’écriture et de la lecture : ils sont 68,3% à lire correctement à voix haute, soit quatre points de moins qu’il y a un an. Leur capacité à écrire des mots baisse même de 4,5 points (72,6% contre 77,1% en 2019). Ce n’est pas étonnant : «Entre février et juin, les élèves de CE1 passent généralement de la lecture de mots à la lecture de phrases. Et c’est justement le moment où ils ont été confinés», explique Edouard Geffray, directeur général de l’enseignement scolaire (Dgesco). 

Des réalités sociologiques indéniables

Ce que montrent les chiffres, ce sont surtout les disparités entre les milieux sociaux. En CP, les écarts se sont creusés entre élèves issus de milieux défavorisés, ceux inscrits dans les établissements d’éducation prioritaire et particulièrement en REP+, et les autres. Même chose en CE1, où les évaluations ont fait apparaître des écarts sensibles, en mathématiques particulièrement. Le dédoublement de classe REP et REP+ de CP et CE1, destinés à réduire l’écart entre les élèves des zones les plus défavorisées et les autres, n’a donc pas suffi.

En sixième enfin, où les évaluations sont censées porter sur les domaines devant être acquis à l’entrée au collège, bonne nouvelle selon le ministère : les résultats se sont améliorés en français (88% des élèves ont une maîtrise satisfaisante) et en mathématiques (72%). Mais là aussi, les chiffres ne mentent pas : les écarts se sont accrus entre les élèves scolarisés dans l’éducation prioritaire et les autres. Le confinement, ses adaptations permanentes et cours à distance ont bien eu un effet sur les élèves, même si le ministère tient absolument à rester positif. «La baisse des résultats est préoccupante mais beaucoup moins inquiétante que prévu», assure Edouard Geffray.

Sur le terrain, les professeurs ne sont pas surpris par ces résultats : «Depuis la rentrée, les enseignants ont bien constaté des retards. Heureusement qu’ils n’ont pas attendu le 9 novembre pour travailler avec les élèves», remarque Guislaine David – cosecrétaire générale du SNuipp-FSU. Mais alors comment combler les écarts ? C’est tout le problème selon Frédérique Rolet, secrétaire générale Snes-FSU : «On évalue, et il ne se passe rien. Une fois les profils en difficulté établis, on n’a pas plus de moyens après pour dédoubler les classes, faire des groupes par exemple.»

Les enseignants craignent qu’un reconfinement des écoles ne vienne creuser encore davantage les inégalités scolaires. Un scénario qu’ils veulent à tout prix éviter, en renforçant un protocole sanitaire qu’ils jugent insuffisant. Si les lycées ont obtenu la possibilité d’effectuer 50% de cours en présentiel, ce n’est pas le cas dans les écoles ni dans les collèges. Il reste selon les syndicats aussi beaucoup de travail à faire pour améliorer l’aération, le nettoyage des salles ou la mise à disposition de masques et de gel hydroalcoolique. Une «grève sanitaire» est donc prévue ce mardi dans l’Education nationale, de la maternelle au lycée, pour une meilleure protection des élèves et des personnels.