Au lendemain de la fin du premier mois sans tabac, initiative lancée en novembre par le ministère de la Santé, La Rochelle a accueilli le premier congrès scientifique exclusivement dédié à la cigarette électronique. Cet événement, qui a réuni des experts de quatorze nationalités, avait pour objectif de faire le point sur les dernières données concernant la grande oubliée du mois sans tabac: l’e-cigarette. Pleinement recommandée comme outil d’aide au sevrage tabagique par les autorités sanitaires britanniques, celle-ci n’est encore que timidement encouragée en France. « Avec ce congrès, l’idée est de répondre aux questions des décideurs politiques et du grand public sur ce produit qui n’existait que de façon très embryonnaire il y a cinq ans, et qui évolue à un rythme effréné », a expliqué le Pr Bertrand Dautzenberg, pneumologue aux hôpitaux universitaires Pitié Salpêtrière-Charles Foix.
Au programme de ces deux jours: la composition des liquides et des émissions de vapeur, le lien entre cigarette électronique et initiation au tabac chez les jeunes, les effets biologiques… « Depuis deux ans, nous savons de quoi sont composés les e-liquides, assure le Pr Dautzenberg. La composition doit être renseignée sur une base de données européenne, qui compte déjà plus de 50 000 références ». Depuis mai 2016, une norme Afnor renforce la qualité des produits. Que retrouve-t-on dans ces petites fioles? L’ingrédient principal est le propylène glycol, qui permet de produire de la vapeur. Peuvent lui être ajoutés des arômes alimentaires et de la nicotine. Celle-ci est mise en cause pour sa cancérogénicité par plusieurs études réalisées en laboratoire. Mais des analyses épidémiologiques faites à partir de données obtenues auprès de populations montrent qu’il n’existe aucune preuve d’une implication quelconque de la nicotine dans la survenue de cancer.
Incertitude
D’après Bertrand Dautzenberg, pneumologue, « il manque encore beaucoup de données pour assurer la sécurité de ce produit, mais celui-ci sera toujours moins toxique que la cigarette ». Si, dans son avis d’avril 2014, le Haut Conseil de la santé publique estimait que les liquides présentaient un faible niveau de toxicité, il en va autrement de leurs émissions, qui peuvent contenir des produits potentiellement toxiques. Métaux, diacétyle et aldéhydes peuvent alors se trouver à l’état de trace dans la vapeur inhalée. « Les études montrent que l’usage normal d’une cigarette électronique, que nous fixons à 200 bouffées par jour, n’est pas plus dangereux que l’exposition à l’air intérieur d’une habitation pendant 24 heures ou que l’inhalation de certains médicaments, détaille le Pr Dautzenberg. La fumée de cigarette, elle, contient du monoxyde de carbone et des agents cancérigènes». D’un côté, les effets à long terme de la cigarette électronique sur l’organisme commencent tout juste à être explorés. « Il manque encore beaucoup de données pour assurer la sécurité de ce produit, mais celui-ci sera toujours moins toxique que la cigarette, souligne Bertrand Dautzenberg. Par contre, il est plus toxique de fumer la cigarette électronique que de ne rien fumer du tout ».
Les connaissances concernant l’efficacité de ce dispositif pour arrêter de fumer s’accumulent. Selon une étude de l’agence Santé publique France, le nombre de vapoteurs fumant aussi la cigarette classique est passé de 82 % à 71 % entre 2014 et 2015. Une autre étude publiée en juin dans la revue « Addiction » a montré que 7,5 millions d’Européens utilisent actuellement la cigarette électronique. Parmi eux, 35 % ont arrêté de fumer et 32 % ont réduit leur consommation. En France, le site Internet du mois sans tabac a enregistré 180 000 participations. « Espérons que l’e-cigarette soit intégrée à l’opération, si celle-ci est reconduite l’année prochaine », note Bertrand Dautzenberg.