La limousine du Président des États-Unis d’Amérique compte parmi les véhicules les mieux protégés de la planète. L’époque où le premier des Américains arpentait les boulevards assis à l’arrière d’une Cadillac à peine modifiée prit fin avec les tentatives d’assassinat de Ronald Reagan. Depuis lors, le blindage et les exigences du Secret Service ont progressivement altéré la physionomie d’un véhicule qui tient dorénavant du char d’assaut plus que de la voiture d’apparat.
La toute dernière mouture de la Cadillac Presidential State Car (tel est son nom officiel) a été révélée à la presse le 24 septembre, à l’occasion d’un déplacement officiel à New York. Si ce jour-là, le Président provoquait l’hilarité des diplomates de l’Assemblée générale des Nations Unies, sa limousine, elle, faisait moins rire. Personne n’ose se frotter à celle qu’on surnomme « La Bête » (The Beast). Quant aux contribuables, ils dénoncent périodiquement les coûts qu’induisent ce monstrueux véhicule.
Les dépenses pour raisons de sécurité
Selon l’agence Reuters, General Motors aurait empoché entre 16 millions et 35 millions de dollars entre 2014 et 2018 pour développer deux exemplaires de cette nouvelle Cadillac Presidential State Car. L’une transporte effectivement le Président, tandis que l’autre – jamais la même – sert d’épouvantail. La presse américaine évalue à 2 millions de dollars le prix de revient de The Beast. Pour tromper les assaillants, les deux Cadillac présidentielles circulent toujours ensemble
Là ne s’arrêtent pas les dépenses, puisque pour des raisons évidentes de sécurité, les voitures qui composent le cortège précèdent généralement de plusieurs jours l’arrivée du Président sur les lieux de sa visite officielle. La Cadillac Presidential State Car voyage ainsi à bord de son propre avion, en compagnie de son double inséparable comme d’autres véhicules blindés du cortège. Notamment du Chevrolet Suburban surnommé « Roadrunner », qui sert de relais aux communications militaires. Le type d’avion chargé de cette mission change en fonction de la destination et des disponibilités de l’Armée de l’Air américaine. Toutefois The Beast a fréquemment été vue en train de gravir la rampe de chargement d’un porteur C-17 Globemaster.
Comme précédemment, la carrosserie de cette nouvelle limousine surprotégée repose sur un châssis de pick-up General Motors fortement renforcé et allongé. D’une belle Cadillac, ce long vaisseau n’en a que le nom. Songez que le vitrage – épais de 13 centimètres – doit résister à toutes les armes d’assaut. Il se dit que la vingtaine de centimètres de blindage rend chaque portière aussi lourde et lente à manipuler que celle du Boeing Air Force One.
Le plancher renforcé de Kevlar est conçu pour dévier le souffle des explosions de mines sans se déformer. Les jantes spéciales sont garnies de pneumatiques à roulage à plat qui permettent à la limousine de poursuivre sa route, même avec quatre crevaisons simultanées. En cas d’impact de balle dans le réservoir à carburant, la fuite sera instantanément colmatée par l’écoulement d’une mousse à durcissement rapide.
Pour ce qui est des aménagements de l’intérieur, le secret le plus total est de rigueur et les rares informations qu’on croit connaître sont probablement le fruit d’une opération d’intoxication. Pas question de faciliter la tâche d’éventuels terroristes. Dans ces conditions, on mesurera la hauteur du privilège accordé à Kim Jong Un, invité par Donald Trump à jeter un œil à l’intérieur de La Bête à l’occasion de leur rencontre à Singapour, le 12 juin 2018. Sans doute l’Américain savait-il qu’il toucherait sous peu une Cadillac toute neuve.
C’est peut-être parce qu’il ne craignait pas grand-chose sur le sol français que Donald Trump n’a pas daigné sortir la plus récente de ses Cadillac lors de sa visite officielle à Paris, le 11 novembre 2018. Car c’est bien l’une des deux Cadillac Presidential State Car d’ancienne génération, telles que léguées par Barack Obama, qui l’attendait au pied de l’avion à Orly, pour le conduire au Palais de l’Élysée. Ces mêmes Cadillac avaient été dépêchées en Angleterre en juillet dernier, lors de la visite officielle à Londres.