LE SYSTÈME des dates de péremption est-il arrivé à expiration ? Des acteurs de la lutte contre le gaspillage alimentaire appellent en tout cas à le faire évoluer. Et pour cause. À l’heure actuelle, les produits peuvent comporter deux types de date: la DLC (date limite de consommation) après laquelle le produit est périmé et ne peut plus être consommé, d’une part, et la DDM (date de durabilité minimale) après laquelle le produit est toujours sans danger pendant un moment même s’il peut avoir perdu un peu en qualité. Mais entre « À consommer jusqu’au » pour le premier et « À consommer de préférence avant le » pour le second, il y a de quoi perdre le consommateur.
Une confusion qui contribue à « 20 % du gaspillage dans les foyers », pointe Rose Boursier-Wyler, de la start-up Too Good To Go et en charge du plaidoyer sur les dates de péremption. La plateforme qui lutte contre le gaspillage alimentaire en mettant en relation des consommateurs et des commerçants qui leur proposent des paniers d’invendus à prix cassés en fin de journée, a d’ailleurs lancé une pétition. Intitulée #ChangeTaDate, elle appelle à ajouter après « À consommer de préférence avant le… » les mots « mais toujours bon après » pour clarifier la situation. Lundi (8 octobre), à la veille de la journée nationale (en France) de la lutte contre le gaspillage alimentaire, la pétition avait déjà été signée quelque 12 000 fois. « Nous avons eu 6 000 signatures sur les deux derniers jours » raconte Rose Boursier-Wyler qui évoque désormais un objectif de « 50 000, voire 100 000 signatures » à fin novembre.
Étiquette intelligente
Vert pour le produit qui peut être consommé, et le rouge pour le produit qui ne peut plus l’être. Le système d’étiquette intelligente de Cryolog pourrait révolutionner la conservation des aliments. Et lutter ainsi contre le gaspillage qui reste considérable. Par exemple, 10 millions de tonnes de produits jetés par an en France. Jeter ou ne pas jeter. Ce dilemme, tout le monde le connaît lorsqu’en ouvrant son frigo, on découvre avec stupeur que la date limite de consommation d’un produit est dépassé d’une journée.
Une situation qui sera bientôt un mauvais souvenir ? C’est en tout cas l’ambition de Cryolog, une société nantaise qui a déclaré la guerre au gaspillage alimentaire. Sa solution ? Une étiquette intelligente et on ne peut plus simple : la pastille verte signifie que le produit est encore consommable, rouge qu’il est bon à jeter. « Une pastille fabriquée en France », indique fièrement Pierre Peteuil, le PDG de Cryolog, rappelant que leur principal actionnaire est lui aussi français, le fond d’investissement CapAgro. De manière bien plus précise que la date limite de consommation (DLC) fixée de manière théorique apposée sur les produits, la pastille prendra donc en compte si le produit a été conservé à température ambiante ou si le frigo est mal réglé et réagira en conséquence.
Une manière particulièrement efficace de lutter contre le gaspillage alimentaire, sujet mis à l’honneur ce lundi 15 octobre. Une étude de l’université de Bonn montre ainsi qu’une étiquette intelligente permettrait de réduire de 35 % le gaspillage. Un enjeu d’autant plus important que chaque année dans le monde, ce sont un tiers des aliments produits qui sont jetés ou perdus. En grande partie du côté des ménages et de l’industrie agroalimentaire, soit des dizaines de milliards de dollars selon des spécialistes.
Cryolog possède surtout des industriels ou de la restauration collective parmi ses clients. L’étiquette est utilisée pour garantir le respect de la chaîne du froid des produits livrés. Et instaurer ainsi une nouvelle marque de confiance avec les consommateurs. Des spécialistes pensent déjà que cette technologie innovante représente sans aucun doute le futur de la date de péremption intelligente. Une utilisation somme toute encore assez limitée. Et pour cause : « Il faut éduquer le consommateur » et changer les habitudes prend du temps. Et Cryolog s’attaque désormais aux étiquettes grand public. « On travaille sur une étiquette qui proposerait une ou des couleurs intermédiaires entre le vert et le rouge », indique le PDG de la société nantaise. Histoire d’avoir une visibilité sur le temps qu’il reste avant qu’un produit ne soit plus consommable.
Malgré un chiffre d’affaires qui reste encore très faible, la société croit en son potentiel de développement. Car sa technologie a été validée scientifiquement dès 2009 par l’École nationale vétérinaire d’Alfort et a aussi obtenu la validation de l’Efsa, l’autorité européenne de sécurité des aliments. Un atout non négligeable pour se distinguer par rapport à ses concurrents européens. Cette petite pastille pourrait bien faire son apparition sur les produits en rayon et dans nos frigos plus vite qu’on ne le pense…