LE 8 FÉVRIER 2018, Bruno Tshibala Nzenzhe, le 1ER Ministre, adresse une correspondance à Henri Yav Mulang, le ministre des Finances. En réponse à sa lettre du 3 février relative à « l’évolution de la situation dans le secteur pétrolier ». Tshibala écrit : « Y faisant suite, je vous donne les instructions ci-après concernant le paiement de la créance globale des sociétés pétrolières sur l’État congolais qui est fixée provisoirement à la somme d’environ 200 000 000 USD (dollars, ndlr). »
Et il poursuit : « Pour permettre aux sociétés pétrolières de reconstituer rapidement leurs stocks afin de mieux ravitailler le marché, je vous donne l’autorisation de leur payer un acompte de 60 000 000 USD, soit environ 30 % de la créance réclamée, par compensations fiscales comme vous l’avez proposé dans la lettre précitée. »
Pour Tshibala, le « paiement du solde ne pourra être envisagé qu’après la fixation contradictoire et définitive du montant réel de la créance par la commission spéciale instituée à cet effet ». À ce propos, il insiste sur « l’impérieuse nécessité de déterminer, de manière juste et honnête, les frais et charges des sociétés pétrolières ». De même, pour ce qui est du niveau de la rémunération de ces sociétés. Enfin, le 1ER Ministre demande au ministre d’État, ministre de l’Économie, qui le lit en copie, de « prendre toutes les dispositions utiles quant à ce ».
La ligne de crédit est ouverte
D’où, la fameuse lettre du 19 avril 2018 du ministre d’État, ministre de l’Économie qui déclenche l’opération de remboursement de créances. Le 10 mai de la même année, Bruno Tshibala accuse réception de la lettre référencée n°722/CAB/MINET/ECONAT/JKN/GYN/gyn/2018 de Joseph Kapika Ndji Kanku wa Mukumadi, relative aux « manques à gagner des sociétés commerciales pétrolières ».
« La situation préoccupante des sociétés pétrolières que vous relevez nécessite une solution rapide afin de leur éviter de se retrouver dans le cas de cessation de paiement qui serait préjudiciable à tous », écrit-il. C’est pourquoi, « je vous autorise à mettre en place une ligne de crédit sollicitée auprès des banques commerciales locales destinée au paiement de cette créance », ajoute Tshibala, dans sa correspondance.
Toutefois, le 1ER Ministre demande au ministre d’État, ministre de l’Économie nationale de « concevoir un plan de remboursement réaliste qui prend en compte la structure du prix des produits pétroliers comme mécanisme garantissant cette ligne de crédit ». Avec recommandation de lui transmettre, à chaque étape, un rapport sur l’évolution du dossier.
Le 22 mai, Joseph Kapika adresse une correspondance n°967/CAB/MINET/ECONAT/JKN/GYN/gyn/2018) à Henri Yav Mulang, le ministre des Finances, à propos de « la ligne de crédit pour paiement créances des SOCOMS ». Il dit ceci : « Faisant suite aux instructions me transmises par courrier de Son Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, référencé n° CAB/PM/CMEH/GBB/2018/1533 du 10 mai 2018, relatif aux manques à gagner des sociétés commerciales pétrolières, je vous informe que la Rawbank a manifesté son intérêt sur la mise en place d’une ligne de crédit de 100 millions USD, en vue de procéder au payement de la créance des sociétés pétrolières… ».
Les manques à gagner
Cette créance est répartie de la manière ci-après : Engen RDC (29 905 080 dollars), Cobil SA (22 930 088 dollars), Total RDC (18 842 251 dollars), SEP Congo (15 924 296 dollars), SOCIR (8 777 679 dollars), GENAPEP (2 441 257 dollars), SPSA/Cobil SA (1 179 340 dollars).
Joseph Kapika précise dans sa lettre que « le remboursement de cette ligne de crédit se fera à partir de janvier 2019, pour environ 5 millions USD par mois, par domiciliation directe à la Rawbank des redevances, impôts et taxes dus par les trois sociétés, à savoir Engen DRC, Total RDC et Cobil SA ». Pour lui, il faut bien éviter de « priver le Trésor public de la totalité des recettes liées à l’activité pétrolière ».
À cet effet, il « demande » au ministre des Finances d’« instruire le Gouverneur de la Banque centrale du Congo d’établir les traites avalisées au profit des sociétés commerciales, conformément à la répartition de la créance sus-indiquée, qui seront présentées à l’escompte à la Rawbank ». Et « il appartient ainsi à la Rawbank d’établir un programme de paiement échelonné de ces créances, en vue de se conformer à la réglementation en vigueur ».
Joseph Kapika « demande » également à Henri Yav d’« instruire, de manière irrévocable, les régies financières, à savoir la DGI, la DGRAD et la DGDA, de prendre toutes les dispositions nécessaires pour la mise en exécution de ce mécanisme de remboursement de cette dette, et enfin, de créer une commission ad hoc, chargée de l’amortissement de la créance ».
Voici, par ailleurs, la répartition du paiement de l’acompte de 60 millions de dollars, soit environ 30 % de la créance, représentant les compensations fiscales par régie financière : Cobil SA devait 1 071 372,95 dollars (2017) et 6 954 692,05 dollars (2018) à la Direction générale des impôts (DGI) ; 891 677,42 dollars (2017) et 4 190 155,58 dollars (2018) à la Direction générale des douanes et accises (DGDA) ; et 650 155 dollars (2018) à la Direction générale des recettes administratives, domaniales, judiciaires et des participations (DGRAD). Soit un cumul (2017 et 2018) de 13 758 053 dollars.
Engen DRC devait 2 727 096,77 dollars (2017) et 6 413 916,35 dollars (2018) à la DGI ; 3 575 447,79 dollars (2017) et 4 097 995,35 dollars (2018) à la DGDA ; et 318 967,74 dollars (2017) et 809 625,01 dollars (2018) à la DGRAD. Soit un cumul (2017 et 2018) de 17 943 049 dollars.
Total RDC devait 2 438 709,68 dollars (2017) et 1 964 018,32 dollars (2018) à la DGI ; 2 094 193,55 dollars (2017) et 4 808 429,05 (2018) à la DGDA. Soit un cumul (2017 et 2018) de 11 305 350,60 dollars.
GENAPEP devait 878 852,53 dollars (2018) à la DGI ; 585 901,69 dollars (2018) à la DGDA. Soit un cumul de 1 464 754,22 dollars. SEP Congo devait 4 285 714,29 dollars (2017) et 5 268 863,71 dollars (2018) à la DGI. Soit un cumul (2017 et 2018) de 9 554 578 dollars.
La SOCIR devait 2 378 429,30 dollars (2017) et 2 088 178,70 dollars (2018) à la DGI ; 322 580,65 dollars (2017) et 477 419,35 dollars (2018) à la DGRAD. Soit un cumul de 5 266 608 dollars. Et enfin, SPSA devait 707 609 dollars (2018) à la DGI.