Financement de la lutte contre les changements climatiques

Au moment où la Chine et les États-Unis d’Amérique signent un Accord inédit sur la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre de 26 à 28% d’ici à 2025 (référence 2005), en prélude au Sommet de Paris en 2015, nous revenons sur le financement de la lutte contre les changements climatiques : implications pour la transformation de l’Afrique. 

La fonte de la glace lance un signal fort pour que le monde se préoccupe des conséquences des changements climatiques.
La fonte de la glace lance un signal fort pour que le monde se préoccupe des conséquences des changements climatiques.

En tant que pollueur, l’Afrique est loin des ténors que sont les États-Unis et la Chine. Néanmoins, si rien n’est fait, des économies du continent pourraient rater le coche du développement durable. Le 9ème Forum pour le développement de l’Afrique (ADF IX), tenu du 12 au 16 octobre à Marrakech, et qui a eu pour thème «Des modes de financement innovants pour la transformation de l’Afrique», s’est penché au cours d’un de ses ateliers sur le financement de lutte contre les changements climatiques : implications pour la transformation de l’Afrique.

La pertinence de cette session s’explique par la vulnérabilité de l’Afrique face aux changements climatiques. En effet, le 3ème Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en 2001, est le fruit des premières évaluations menées selon ce qu’il est convenu d’appeler une perspective régionale. Aussi, suite aux négociations internationales dans le cadre de la Convention- cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Ccnucc), un accord unanime a été trouvé pour fournir un appui aux Pays les moins avancés (PMA), considérés comme très vulnérables aux changements climatiques, et ne disposant ni de capacités, ni de ressources pour y faire face.

Même son de cloche du 5ème Rapport d’évaluation du GIEC, confirmant cette grande vulnérabilité de l’Afrique. Même les des dangers éventuels du passage d’un El Niño dans la Corne de l’Afrique, pouvant entraîner des précipitations supérieures à la normale, ont été évoqués par l’Institut international de recherche sur le climat et la société. En dépit de tous ces défis, l’Afrique est plus déterminée que jamais à aller de l’avant.

C’est de bonne guerre, vu que le continent abrite 7 des 10 pays à la croissance la plus rapide au monde. Une bonne tenue de ces économies, qui est menacée par des changements climatiques. Fort heureusement, il existe des sources de financement de la lutte contre les changements climatiques (Tableau : Sources multilatérales de financement de la lutte contre les changements climatiques). Il s’agit de flux financiers internationaux qui peuvent jouer un rôle important pour garantir la transformation de l’Afrique.

Un appui financier aux PMA 

Dans le cadre de la CCNUCC, des fonds mondiaux, tels que le Fonds pour les PMA et le Fonds spécial pour les changements climatiques du Fonds pour l’environnement mondial (FEM), le Fonds pour l’adaptation, et le Fonds vert pour le climat, sont dédiés à l’intervention climatique, à la fois pour le financement des mesures d’atténuation et d’adaptation. Justement, le Fonds pour les PMA et le Fonds spécial pour les changements climatiques, gérés par le FEM, ont été créés, lors de la 7ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP7) en 2001, afin d’apporter un appui financier aux PMA dans la lutte contre les effets des changements climatiques. Pour rappel, sur les 49 PMA, 35, soit environ 70%, se trouvent en Afrique.

À côté de cette ligne, le Fonds pour l’adaptation a été créé en 2007 en vertu du Protocole de Kyoto par les États parties à la CCNUCC. Il est en grande partie financé par une taxe de 2% prélevée sur les revenus tirés de la vente de crédits de réduction certifiée des émissions. Il suit une approche «par projet », selon laquelle les propositions émanant des entités d’exécution sont soumises à un conseil central.

Quant au Fonds vert pour le climat, il a été créé en 2010, lors de la 16ème session de la Conférence des Parties. Il devrait financer une large part de l’objectif de financement à moyen terme de 100 milliards de $ par an d’ici à 2020, fixé en 2009 par les pays développés. Le Fonds souscrit aux principes d’appropriation nationale. Cependant, les modalités qu’il appliquera font encore l’objet de débats animés.

Les pays bénéficiaires, notamment ceux en développement et à revenu intermédiaire, plaident en faveur d’une forte appropriation nationale, de la délégation de la gestion des fonds et de la sélection des projets à des organismes gouvernementaux, tandis que le Fonds sera chargé de la coordination et de la supervision de la propriété fiduciaire. Les pays bailleurs de fonds, qui sont principalement des pays développés, souhaitent au départ poursuivre une approche plus prudente, s’appuyant davantage sur des mécanismes similaires à ceux utilisés pour le Fonds pour l’adaptation.

Plusieurs pistes 

D’autres instruments internationaux de financement ne relèvent pas directement du processus de la CCNUCC. Il s’agit notamment du Programme pilote pour la résilience climatique, le Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de relèvement, le Fonds pour la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui contribuent au financement des mesures d’adaptation. En outre, des actions pour l’atténuation sont menées par le Fonds pour les technologies propres, le Programme d’investissement pour la forêt, le Fonds carbone, le Fonds de partenariat pour la réduction des émissions de carbone, le Fonds de partenariat pour la réduction des émissions de carbone forestier et le mécanisme (REDD+) de réduction des émissions causées par le déboisement et la dégradation des forêts dans les pays en développement.

Aux niveaux bilatéral et régional, des instruments sont aussi déployés dans la lutte contre les changements climatiques. Parmi ceux-ci, les fonds régionaux de l’Alliance mondiale pour la lutte contre le changement climatique (Union européenne), de l’Usaid, Agence des États-Unis pour le développement international, baptisé Africa and Latin America Resilience to Climate Change, du Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Congo Basin Forest Fund, du ministère du Développement international et du Centre de recherches pour le développement international, Collaborative Adaptation Research Initiative in Africa and Asia et des États-Unis, du Royaume-Uni et de la Norvège, Fonds BioCarbone.

À noter que d’autres pays développés ont aussi créé des fonds bilatéraux pour aider les pays en développement à apporter une réponse aux changements climatiques. Un appui qui peut se traduire par l’aide au développement octroyée à ces pays. Le secteur privé n’est pas en reste et joue un rôle de plus en plus important, notamment en termes de réponse aux effets des changements climatiques subis par les chaînes de valeur commerciales comme de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Alors que les entreprises doivent soumettre leurs investissements à l’épreuve du changement climatique, le financement de la lutte contre ses effets semble avoir un bon rapport coût/efficacité et permettre de dégager des marges bénéficiaires plus importantes.

Comment accéder aux fonds ? 

Mais comment accéder à de telles avances financières ? Les responsables font état de différentes modalités d’accès aux fonds (voir Tableau 1). Bien que l’accès direct pour les pays soit encouragé, des intermédiaires, dénommés entités d’exécution, apportent également un appui, notamment lorsque les PMA concernés n’ont pas la capacité nécessaire pour satisfaire les procédures complexes de demande de fonds. Ces entités peuvent être des organismes nationaux, multinationaux ou régionaux. Le site Internet du Fonds pour l’adaptation répertorie 28 institutions accréditées, dont 15 au niveau national, 10 au niveau multinational (dont de grandes banques de développement et quatre institutions des Nations Unies) et 3 au niveau régional. Les institutions nationales comptent des ministères (Jordanie et Rwanda), des institutions ou des autorités (Chili, Kenya, Royaume du Maroc et Uruguay), des instituts (Afrique du Sud, Argentine, Mexique et Sénégal), des fonds (Bénin, Costa Rica), une banque (Inde) et un fonds fiduciaire (Belize).

Bien qu’un bon nombre d’entités nationales d’exécution accréditées soient africaines, seules celles du Rwanda et du Sénégal ont réussi à obtenir un financement de programme auprès du Fonds pour l’adaptation. Cela illustre combien il est important de renforcer les capacités humaines et institutionnelles pour permettre aux pays de financer eux-mêmes leurs programmes.

Encourager l’expertise locale 

La promotion des entités nationales doit être encouragée, car elle stimule l’appropriation nationale du processus. Cependant, la décision émanant du Fonds pour l’adaptation de limiter à 50% la proportion de financement distribué par ces entités pourrait poser des contraintes importantes en termes de programmation pour les pays qui ne sont pas encore prêts à être accrédités comme entités, mais qui ont tout de même besoin d’accéder au Fonds.

D’autres instruments de financement multilatéraux, régionaux et bilatéraux ont différentes modalités d’accès, le plus souvent alignés sur leurs règlements internes et adaptés aux intérêts des programmes. Des opportunités de financement sont également offertes par le biais d’appels de propositions concurrentiels permettant la participation éventuelle d’autres parties prenantes et la création d’un espace pour nourrir l’innovation.

Le financement bilatéral est encore grevé d’incertitudes, suite aux bouleversements actuels des politiques d’aide au développement. Suite à la crise économique, de nombreux pays développés ont réduit leurs budgets en matière d’aide extérieure, plongeant l’avenir de l’aide bilatérale dans l’incertitude.

Parallèlement, le secteur privé apparaît comme une source majeure de réserve de financement des mesures de lutte contre les changements climatiques. Cependant, le manque de stratégies appropriées de mobilisation et l’absence de partenariats public-privé limitent les capacités de l’Afrique à tirer profit des perspectives grandissantes qu’offre le secteur privé en matière de financement.

Timides engagements de la réponse de l’Afrique 

Malgré la création de nombreux instruments de financement, l’Afrique peine toujours à accéder à ces fonds et à absorber de manière efficace les fonds reçus, ont déploré les experts en charge du dossier. De nombreuses estimations indiquent le montant des investissements annuels nécessaires pour réduire le profil de risque des pays en développement.

Les estimations des flux financiers liés au climat vers ces pays varient considérablement, oscillant entre 40 et 120 milliards de $.

Selon la Banque africaine de développement, les coûts d’adaptation dans la région s’élèveraient à entre 20 et 30 milliards de $ au cours des 10 à 20 prochaines années. Si ces estimations ne sont qu’indicatives, les évolutions des profils de risques, annoncées par des évaluations récentes, pourraient considérablement alourdir le montant des financements nécessaires pour mettre en oeuvre des mesures d’adaptation. En effet, le Rapport Africa’s Adaptation Gap, publié en 2003 par le Programme des Nations unies pour l’environnement, a mis l’accent sur le fossé entre les profils de risque actuels des pays africains et le niveau de financement attendu.

En termes d’investissements réels, de tous les fonds décaissés à ce jour, toutes sources confondues (dont le Fonds pour les PMA, le Programme pilote pour la résilience climatique, l’Alliance mondiale pour les changements climatiques et le Fonds spécial pour les changements climatiques), soit 395 millions de $, 44% ont été octroyés à l’Afrique subsaharienne. Plus précisément, sur les fonds destinés à soutenir la mise en œuvre des programmes nationaux d’adaptation, 56% des fonds approuvés par le Fonds pour les PMA (222 millions de $) et 26% des fonds du Fonds spécial (50 millions de $) ont été attribués à la région.

Peu de projets MDPéables, REDD et REDD+ 

Face au changement climatique, les défis que l’Afrique doit relever sont énormes. À cet effet, des sources de financement aussi bien nationales qu’internationales sont donc nécessaires. Une des principales préoccupations sur le continent est la répartition des fonds entre les mesures d’adaptation et celles d’atténuation.

Si le financement des mesures d’atténuation est une priorité dans les pays développés, c’est celui des mesures d’adaptation qui est beaucoup plus important dans la plupart des pays en développement. Toutefois, cela pourrait évoluer à l’heure où certains pays accédant au statut de pays à revenu intermédiaire, l’atténuation devient de plus en plus une priorité. Alors que les pays renforcent leurs institutions et créent un environnement favorable grâce à la mise en place de réglementations et d’incitations en faveur du secteur privé, cette tendance pourrait encore s’accentuer avec l’intérêt grandissant manifesté par le secteur privé et l’augmentation du financement des mesures d’atténuation.

Dans le cas de l’Afrique, le rôle du secteur privé est encore très minime et incertain, d’autant plus que la faible participation des pays africains ne leur a pas permis de tirer des enseignements ou des données d’expérience pratique du Mécanisme pour le développement propre (MDP). De plus, le prix du carbone est très volatile et s’élève aujourd’hui à seulement 1 à 2 $ par tonne de dioxyde de carbone pour les projets MDP, (alors qu’il était à 20 $ en 1997, voire 5 à 8 $ en 2011) et entre 4 et 8 $ par tonne pour les projets REDD.

Les pays africains se sont montrés plus enclins à participer à REDD+, une version améliorée du mécanisme initial. Certains pays ont lancé des programmes de préparation, tirant profit des différents fonds pour le climat et visant les principaux bassins forestiers, tels que la forêt tropicale du Bassin du Congo.

Mobiliser d’urgence les fonds 

Selon les conclusions de la Banque mondiale en 2013, moins d’un tiers des financements des mesures d’adaptation et d’atténuation approuvés pour l’Afrique a été décaissé (voir Tableau 2). Selon le site Internet Climate Funds Update, site indépendant diffusant des informations sur les initiatives de financement en lien avec la lutte contre les changements climatiques, une partie importante des fonds en Afrique subsaharienne est dédiée à des activités d’atténuation.

Pourtant, la grande vulnérabilité de tant de pays de la région devrait appeler à privilégier le financement de mesures d’adaptation (voir graphe 3). Il est donc urgent de mobiliser des ressources pour répondre aux capacités limitées du continent face aux phénomènes climatiques et à leurs répercussions futures. Plus de 45% de la population africaine vivent dans des pays disposant de la plus faible capacité d’adaptation au monde.

Il est crucial d’investir dans les systèmes d’éducation et de santé, ainsi que dans le renforcement des capacités institutionnelles. On ne saurait souligner combien le financement des efforts d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques est un catalyseur et peut parallèlement contribuer à lutter contre la pauvreté et à favoriser le développement durable en Afrique.

L’Afrique a besoin d’investissements plus ciblés dans des mesures d’adaptation et les décideurs doivent intégrer le changement climatique dans toute planification stratégique à long terme. Le continent souffre d’un manque d’infrastructures, mais la conception et la répartition des futurs investissements visant les infrastructures doivent prendre en considération l’évolution du système climatique.

Selon la Banque mondiale, y parvenir sera particulièrement coûteux, notamment en comparaison avec les coûts des mesures pour l’eau et l’assainissement, et il faudra introduire des nouvelles règles d’aménagement et des codes du bâtiment pour compléter ces mesures d’adaptation et d’atténuation structurelles. En revanche, dans le long terme, les avantages l’emportent sur les coûts supplémentaires.

Quid de la création d’un Fonds africain ? 

La création d’un Fonds africain pour les changements climatiques, géré par une institution africaine, a récemment été évoquée comme un moyen de répondre aux besoins spécifiques de l’Afrique. Le financement de la lutte contre les changements climatiques peut être un catalyseur pour mobiliser des ressources privées et publiques, ouvrir de nouvelles perspectives économiques, promouvoir le déploiement des technologies et transformer les voies de développement.

Afin de mutualiser les ressources allouées à l’Afrique provenant de diverses sources et de lever de nouveaux fonds, un tel Fonds permettrait de soutenir le financement de projets et programmes favorisant la résilience climatique et le développement à faible intensité de carbone. En vertu de l’Accord de Copenhague, les dirigeants du monde entier sont convenus qu’«un financement accru, nouveau et additionnel, prévisible et adéquat ainsi qu’un meilleur accès à celui-ci devraient être fournis aux pays en développement».

Cependant, devant l’ambigüité des termes «nouveau » et «additionnel», il faut déterminer une référence commune pour les pays développés et les pays en développement pour dater les fonds. Les financements et les ressources financières additionnels, levés pour lutter contre les changements climatiques, ne doivent pas être remplacés ou détournés à d’autres fins, comme le développement socioéconomique. Du fait de l’absence d’une référence déterminée au niveau international, chaque pays contributeur a été amené à utiliser sa propre définition de «nouveau et additionnel», et certains pays récusent les références avancées par les pays en développement.

Transparence et efficacité 

La transparence de l’information est également nécessaire pour déterminer l’acception du mot additionnel», car actuellement, certains pays recyclent l’aide extérieure officielle ou les engagements antérieurs. Par exemple, la majorité de l’engagement du Japon de 11 milliards de $ au titre de l’Initiative Hatoyama, a été annoncée en 2008, bien avant les négociations de Copenhague. De même l’engagement du Royaume-Uni de 2,5 milliards de dollars dans le cadre du paquet de l’Union européenne de 10 milliards de dollars pour le financement climatique à court terme, proviendra entièrement de son budget annoncé pour l’aide au développement.

En effet, selon Tim Jones, spécialiste des politiques pour le World Development Movement (WDM), «plus de la moitié du budget annoncé par le Royaume-Uni à Copenhague avait déjà été annoncé, alloué ou dépensé. Au moins un tiers sera octroyé sous forme de prêts(10)». De plus, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques, en 2013, seulement 5 des 23 gouvernements donateurs ont atteint l’objectif de consacrer 0,7% de leur revenu national brut (RNB) à l’aide publique au développement.

Le tableau 2 présente quelques-unes des méthodes proposées pour définir une base de référence du financement «nouveau et additionnel». La première option est privilégiée par les pays européens, comme le Danemark et la Norvège, car ils ont déjà atteint leur objectif de 0,7%. Il leur est donc plus facile de définir la référence à plus de 0,7% du RNB.

La deuxième option serait d’utiliser seulement les nouvelles possibilités offertes par les Nations Unies, comme le Fonds vert de Copenhague pour le climat, mais cela laisserait moins de souplesse aux pays contributeurs et aux canaux existants, qui seraient peut-être mieux à même de se charger de certaines tâches. Le manque de transparence et les incertitudes concernant les flux financiers climatiques ont poussé les pays africains à apporter une réponse hésitante aux changements climatiques.

Le Fonds spécial ClimDev-Afrique a été créé pour offrir à l’Afrique une base solide sur laquelle bâtir une réponse. Il a été lancé par trois des institutions de développement les plus importantes sur le continent, à savoir la Commission de l’Union africaine (CUA), la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et la Banque africaine de développement (BAD), sous l’égide de l’Initiative Climat pour le développement en Afrique (Clim-Dev-Afrique).

Il est géré par la Banque et fournit des ressources financières et des incitations aux agences nationales, aux organismes régionaux et à d’autres parties prenantes pour concevoir et mettre en place des projets stratégiques et des services d’information sur le climat. En octobre 2013, le Fonds avait reçu 26 propositions de projet, pour une demande d’environ 76 millions de $.

L’innovation au service de la lutte contre les changements climatiques en Afrique 

Pour aller au-delà des promesses non tenues et intensifier les mesures de lutte, il est nécessaire de mettre en place des mécanismes de financement innovants. En effet, les responsables trouvent que devant l’impasse dans laquelle se trouvent actuellement les pays développés pour tenir leurs engagements en matière de financement, il est primordial que l’Afrique fasse preuve de créativité et d’innovation pour lever des fonds provenant à la fois de sources nationales et extérieures, à une échelle et dans des délais suffisants qui soient à la hauteur des effets des changements climatiques.

Elle pourrait s’inspirer des leçons innovantes des mécanismes financiers pour accélérer le déploiement d’activités et stimuler les investissements au service de la lutte contre les changements climatiques en Afrique, même si cela nécessite une planification stratégique et une meilleure préparation au financement de la lutte contre les changements climatiques. La question des changements climatiques revêt une importance nationale pour tous les pays africains et il faut, à ce titre, intégrer des sources nationales de financement dans l’ensemble des mécanismes de financement liés au climat.

Participations domestiques 

Suite à l’élaboration des Climate Public Investment and Expenditure Review (Examens des dépenses et des investissements publics pour le climat) par certains pays africains, il est possible de déterminer les dépenses ou les investissements au niveau national liés à la lutte contre les changements climatiques. Ceci étant, il est essentiel que les pays intègrent pleinement le changement climatique dans leurs processus budgétaires nationaux, une partie du budget étant directement allouée au financement de mesures de lutte contre les changements climatiques.

Il est crucial d’avoir des provisions budgétaires spécifiquement allouées à la lutte contre les changements climatiques afin d’intensifier les actions, assurer leur pérennité et obtenir ainsi de meilleurs retours sur investissements. Cette approche garantit également l’alignement des investissements pour la lutte contre les changements climatiques sur les priorités nationales de développement et les objectifs stratégiques du pays.

L’aide au développement (régionale et bilatérale) dont bénéficient de nombreux pays africains inclut des compléments financiers et un soutien budgétaire à l’appui des investissements et des dépenses de fonctionnement. Elle représente une large part des budgets nationaux de certains pays. Intégrer les préoccupations liées aux changements climatiques dans le dialogue avec les partenaires de développement afin de constituer une aide au développement à l’épreuve des changements climatiques, permet de convaincre de l’importance d’un appui financier pour la résilience au changement climatique.

Cela est particulièrement vrai pour les investissements dans les infrastructures, l’agriculture et les systèmes d’approvisionnement en eau. Faire face aux changements climatiques dans ces secteurs où l’aide au développement croît rapidement, pourrait être bénéfique pour les pays. Grâce à ces approches, il sera possible d’augmenter les fonds dédiés à la lutte contre les changements climatiques dans des secteurs clés, ainsi que les fonds complémentaires pour les mesures contre les changements climatiques.

Fonds internationaux et du privé 

Certaines décisions issues des sessions de la Conférence des Parties, peuvent favoriser la mise en place de sources innovantes de financement pour relever les défis posés par les changements climatiques, et l’Afrique devrait tirer parti de certaines d’entre elles, comme les mesures d’atténuation adaptées au contexte national et les mécanismes ne reposant pas sur le marché. Les pays africains devraient aussi chercher des moyens d’augmenter leur part d’activités dans le cadre du MDP et de se positionner sur le marché du carbone.

Le secteur privé joue déjà un rôle important dans le financement de la lutte contre les ef- fets des changements climatiques à travers les marchés de capitaux. Il met aujourd’hui l’accent sur l’atténuation, mais des perspectives se dessinent en ce qui concerne l’adaptation, telles que les emprunts et les capitaux par le biais de prêts-projets directs et de lignes de crédit pour les institutions financières locales. Nombre de pays africains mènent des initiatives pour la création des produits de micro finance et de micro-assurance destinés aux communautés démunies.

Les fonds d’investissement climatique sont octroyés par de nombreuses banques multilatérales. Il s’agit de prêts à des conditions de faveur dans le cadre de plans de subventions en faveur d’investissements pour la lutte contre les changements climatiques. C’est une source importante de financement qui doit être examinée et étudiée, assure-t-on. Il est peu probable que la primauté accordée, sur le plan du financement, aux mesures d’atténuation, par rapport aux mesures d’adaptation, soit inversée, car ces deux types de me- sures ont des ressorts différents. L’Afrique doit donc institutionnaliser une approche synergique afin de mobiliser des fonds climatiques de mise en œuvre conjointe d’initiatives d’adaptation et d’atténuation, notamment dans le cadre de la REDD+. Par exemple, les mécanismes de sauvegarde débattus en tant que partie intégrante de la REDD +, devraient inclure des mesures d’adaptation.

D’autres pistes, telles qu’une taxe pour l’adaptation et systèmes d’obligations et des soutiens de la diaspora et de philanthropes africains. Les industries extractives, moteurs de la croissance économique du continent, offrent des possibilités de financement innovant de la lutte contre les changements climatiques, grâce à des programmes de responsabilité sociale des entreprises. À l’instar de la région des Caraïbes, l’Afrique devrait songer à créer un système d’obligations similaire pour protéger sa croissance économique des ravages des changements climatiques. Elle devrait aussi envisager, pour le financement des mesures d’adaptation, d’instituer des taxes sur les énormes volumes de ressources extractives qui quittent le continent à destination des marchés étrangers, non pas sous forme de redevances, mais en vertu de la responsabilité collective consistant à aider le continent à faire face aux changements climatiques.

Autre piste et non des moindres, la taxe sur le carbone dans l’aérien de l’Union européenne, pourrait ne pas présenter beaucoup d’attrait pour les pays en développement, mais elle est essentielle dans la lutte contre les changements climatiques en Europe. Les États-Unis ont aussi instauré une taxe sur la pollution et de nombreuses autres régions suivent également cette voie. Si l’Afrique plaidait pour une taxe sur ses ressources naturelles pour financer l’adaptation, par exemple sur chaque arbre abattu à des fins commerciales dans la forêt du Bassin du Congo, ou sur chaque baril de pétrole brut exporté… elle obtiendrait facilement l’appui de la communauté internationale qui reconnaît sa grande vulnérabilité et son besoin d’obtenir des ressources suffisantes pour relever ces défis.

Last but not least, les philanthropes africains et les membres de la diaspora devraient être sensibilisés à la question des changements climatiques. C’est essentiel si l’on veut obtenir un financement externe et assurer la pérennité de la réponse de l’Afrique face aux changements climatiques. Le manque actuel de capacités et de ressources humaines correctement formées dans certains pays africains, pourrait facilement être surmonté par l’établissement de liens pérennes et fonctionnels avec la diaspora africaine, dont l’importance a été démontrée par l’ampleur des envois de fonds, qui représentent une part importante des revenus en devises étrangères des pays africains.

Rien n’est encore joué 

En définitive, le niveau de financement international consacré à la lutte contre les changements climatiques reste encore incertain. Il semble peu probable que les objectifs fixés à l’échelle internationale soient atteints, notamment ceux du Fonds vert pour le climat. Le financement de la lutte contre les changements climatiques joue un rôle essentiel pour garantir à l’avenir un développement à faible intensité de carbone en Afrique et dans les petits États insulaires et les aider à acquérir les technologies et les capacités nécessaires pour mettre en œuvre des mesures d’adaptation et d’atténuation.

Les besoins en termes de financement des pays en développement dépassent substantiellement les flux financiers actuels provenant de sources multilatérales et bilatérales. Il est donc impératif de lever plus de fonds, notamment grâce à des mécanismes de financement innovants. Le financement à long terme doit être responsable et transparent. Les décideurs politiques africains devront examiner attentivement les propositions issues des processus de négociation et prendre en compte les implications de chaque approche et les bénéfices que l’Afrique peut en tirer. Les pays développés doivent également intégralement mettre en œuvre leurs engagements en matière de ressources financières et de transfert de technologie. Les pays africains pourront ainsi disposer des outils nécessaires pour lutter contre les changements climatiques.

Saisir les opportunités 

De plus, il est nécessaire d’intensifier les efforts pour assurer le financement des mesures de lutte contre les changements climatiques, afin de renforcer la vigilance et les capacités régionales pour la programmation de ces ressources. Davantage de pays africains devraient s’efforcer de devenir des entités nationales d’exécution, ce qui constituerait une étape clef vers l’appropriation nationale de leurs réponses aux changements climatiques.

De plus, compte tenu du rôle grandissant du secteur privé dans la lutte contre les changements climatiques, il existe des opportunités considérables pour susciter un plus grand appui du secteur privé et il est donc essentiel que l’Afrique s’emploie à nouer des partenariats créatifs et mutuellement bénéfiques avec ce secteur appui du secteur privé et il est donc essentiel que l’Afrique s’emploie à nouer des partenariats créatifs et mutuellement bénéfiques avec ce secteur.

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