Inquiétants, ces téléphones mobiles qui nous enchaînent !

Les quelque 22 millions de téléphones portables en service en RDC menaceraient-ils l’économie et la santé de leurs utilisateurs ? Le débat sur ce moyen universel de communication est relancé dans notre pays.

Bonne nouvelle et mauvaise nouvelle. La mauvaise : les opérateurs réseau de téléphonie cellulaire exerçant en République démocratique du Congo ne déclarent pas tout ce qu’ils réalisent comme recettes. Au moins 17,6 millions de dollars échapperaient chaque mois au Trésor public. La révélation est de la firme française Entreprise Télécom, représentée en RDC par Business Compagny Consulting, qui est sous contrat avec le gouvernement pour lutter contre la fraude téléphonique. Le scandale révélé par Business Compagny Consulting porte jusque-là sur les appels et les SMS et incrimine trois sociétés de téléphonie cellulaire, Vodacom, Airtel et Africell. Le contrôle effectué par Business Compagny Consulting souligne que les volumes des minutes et des SMS souvent déclarés par ces trois opérateurs réseau sont minorés. D’après les révélations de Business Compagny Consulting, la fraude est beaucoup plus grande sur les appels domestiques, qui représentent 90 % du trafic des opérateurs des télécoms.

La bonne : scientifiques et cancérologues relancent le vieux débat sur la dangerosité de ce moyen universel de communication en appelant à la « prudence ». Aujourd’hui, rien ne justifié de prendre des mesures sanitaires. Des études – sérieuses et pourtant controversées – indiquent en effet qu’il augmente la perméabilité de la barrière protégeant le cerveau ou qu’il stresse les tomates. D’autres – à confirmer – prédisent qu’il pourrait provoquer l’apparition de tumeurs cérébrales ou presque doubler le risque de développer un cancer de la parotide. Des images – truquées – montrent sur internet des téléphones mobiles en train de transformer un banal grain de maïs en pop-corn. Il est donc difficile de ne pas devenir parano. Tout cela parce que ce téléphone, destiné nous pleinement, a pris une place considérable dans nos existences. Qui n’a pas proposé au moins une fois à un ami de se faire « greffer » son portable tant il se passe ses journées l’oreille colée à l’appareil ? Quel parent n’a jamais découvert son ado dormant avec le portable sous l’oreiller pour ne pas rater un SMS ? Qui n’a jamais pesté contre un voyageur faisant partager sa vie à tout un wagon ? Autant de questions qui n’auraient pas grande importance si elles n’en amenaient une autre plus angoissante : le portable nuit-il vraiment à l’économie ?

Et là, même si aucun chercheur digne de ce nom ne peut aujourd’hui prouver de façon incontestable que les ondes électromagnétiques émises par les portables sont néfastes pour notre organisme, le doute est bien présent. Certes les études sont contradictoires. Les plus rassurantes sont suspectées d’être commanditées par les fabricants de téléphones mobiles, et les plus négatives doivent encore être confirmées. Pourtant, les usagers raisonnables n’ont guère de raison de s’inquiéter. Ni de rejeter ce progrès incontestable. Les utilisateurs doivent prendre les mesures de précaution qui s’imposent au vu des données scientifiques récentes sur les effets biologiques des portables, particulièrement s’ils sont déjà porteurs d’un cancer avéré. Il ne s’agit pas de bannir cette technologie, mais de l’adapter – de la maîtriser -, afin qu’elle ne devienne jamais une cause majeure de la maladie.

Des experts mettent en garde contre les dangers possibles du téléphone mobile. C’est très bien, mais il n’y a rien de nouveau en termes d’études et d’analyses scientifiques, laisse entendre le professeur Dominique Maraninchi. En 2008, les résultats des études ne montraient pas d’augmentation de la fréquence des tumeurs. Un autre travail réalisé en France indiquait que les ondes électromagnétiques pouvaient entraîner des réactions biologiques de stress dans la tomate.

Diminution de la fertilité masculine

Il y a actuellement plus de questions que de réponses. Et il est normal que les études se multiplient, notamment celles concernant le risque de tumeurs cérébrales, a fortiori chez les enfants, plus sensibles, car leur organisme est en cours de développement. Pourtant, des scientifiques de premier plan assurent que les téléphones portables sont responsables de nombreux problèmes au niveau cérébral et de la diminution de la fertilité masculine. La coïncidence des localisations des troubles n’interroge-t-elle pas ? Grâce aux paralogismes du type « tous les hommes sont mortels, Socrate est un homme, donc Socrate est mortel ». En d’autres termes, ce n’est pas parce que ces localisations sont le plus soumises aux ondes émises par les téléphones mobiles que ces dernières sont obligatoirement à l’origine de tous les maux. La baisse de la fertilité masculine est un fait, mais de multiples causes environnementales peuvent expliquer, au moins en partie, la diminution de la densité des spermatozoïdes dans le sperme (notamment l’exposition aux substances chimiques maintenant identifiées comme cancérogènes mutagènes reprotoxiques et interdites)

En revanche, il est faux de prétendre qu’on assiste à une augmentation générale du nombre de tumeurs de la parotide et du cerveau. La fréquence des tumeurs cérébrales est stable dans la population qui est le plus à risque, celle des enfants. Par ailleurs, on ne peut pas, en l’état actuel des connaissances, imputer les tumeurs cérébrales à une cause précise. Quant aux résultats des études sur le neurinome de l’acoustique – une tumeur bénigne qui se situe à proximité de l’oreille, sur un nerf impliqué dans l’audition, et donc très suspectée d’être favorisée par l’usage intensif du téléphone mobile -, ils sont contradictoires. Si l’on examine les personnes qui fument depuis moins de dix ans, on ne trouve pas d’augmentation du nombre de cancers liés au tabac ; pour cela il faut attendre entre quinze et trente-cinq ans. Il faut savoir tirer les leçons du passé et ne pas renouveler les mêmes erreurs avec le téléphone portable.

C’est un problème d’analyse des risques. Certes, quand il y a une exposition à un risque, il faut beaucoup de temps avant d’en voir les effets. Les téléphones portables étant relativement récents, nul ne peut prédire le danger à vingt ou trente ans. En plus, la technologie évolue sans cesse, ce qui complique les choses. Aujourd’hui, rien ne justifie de prendre des mesures sanitaires. En revanche, il est légitime d’adopter une attitude précaution qui se rapproche du bon sens, c’est-à-dire de n’utiliser ces téléphones qu’à bon escient. Le principe de précaution s’applique en priorité aux enfants, une population fragile et à risque de longue exposition à un nouvel environnement. Et les adultes pourraient montrer l’exemple…

Les précautions à prendre

Le plus important est de renouveler régulièrement les messages de précaution, sans pour autant susciter la panique. Les précautions à prendre sont au nombre de onze : ne pas laisser les enfants de moins de 12 ans utiliser un portable sauf en cas d’urgence. Lors des communications, maintenir autant que possible à plus d’1 m du corps. Utiliser le mode haut-parleur, ou un kit mains libres… Rester à plus d’1 m d’une personne en communication et éviter d’utiliser le téléphone dans des lieux publics. Éviter de garder un portable sur soi, même en veille. Ne le laisser pas à proximité du corps la nuit. S’il faut porter sur soi, diriger la face clavier vers soi et la face antenne vers l’extérieur. N’utiliser pas le portable que pour établir le contact ou pour des conversations de quelques minutes. Au moment de son usage, changer le portable d’oreille régulièrement et attendre que le correspondant ait décroché avant de le mettre contre l’oreille. Éviter d’utiliser le portable lorsque le signal est faible ou lors de déplacements rapides (en voiture, train…). Communiquer par SMS plutôt que par téléphone. Choisir un appareil avec le débit d’absorption spécifique le plus bas possible par rapport à ses moyens.

L’angoisse du Wi-Fi 

Des bibliothèques, des hôtels, des administrations, des universités, pris de maux de tête de l’internet, s’équipent en bornes wi-fi. Dans quelques pays africains, notamment le Rwanda, la Tanzanie, le Kenya, le gouvernement encourage même l’installation de ces bornes dans les écoles. En France, la très officielle Agence de protection de la santé a demandé que des études plus approfondies soient menées. Des écoles ont renoncé au sans-fil car, si les émissions des ondes par les systèmes wi-fi sont beaucoup plus faibles que celles des portables ou des antennes relais, elles sont continues et les scientifiques n’ont pas d’éléments probants pour conclure à l’innocuité de ces équipements sur le long terme. De rapports en enquêtes, c’est bien le doute qui prévaut quant aux conséquences des nouvelles technologies sur la santé. En attendant se développe un nouveau syndrome : l’électro-hypersensibilité (EHS), c’est-à-dire l’intolérance aux ondes électromagnétiques. En Suède, premier pays à avoir reconnu cette maladie, plus de 300 000 personnes, soit 3 % de la population, en sont officiellement atteintes. Mais, au grand dam des associations de victimes, l’EHS est considérée comme une forme d’angoisse devant le développement des technologies de communication, pas comme une maladie.