La société Kibali Goldmines compte beaucoup sur le gouvernement qui doive tenir à ses obligations, notamment le remboursement de la TVA, ainsi que sur les autorités provinciales de l’Ituri, pour porter sa production d’or à 610 000 onces cette année. En clair, Kibali Goldmines espère disposer d’une couverture administrative et sécuritaire en vue de l’extension et de la poursuite de la deuxième phase de son projet sur ses concessions par endroits occupée par des orpailleurs artisanaux. Si tous ces préalables et bien d’autres sont satisfaits, cette entreprise envisage de mettre en service la centrale hydroélectrique d’Ambarau au T1 et poursuivre celle d’Azambi. En même temps, Kibali Goldmines compte poursuivre ses recherches dans la région, adoubée par les perspectives encourageantes d’une remontée des cours mondiaux des matières premières, dont l’or, après deux ans de morosité.
Que gagnerait la RDC avec les cours de l’or en hausse ? En 2015, quelque 16 015 kg ont été exportés et rapporté 479 millions de dollars. Officiellement, les services attitrés de l’État, dont la Cour des comptes, n’ont pas encore rendu leurs rapports annuels pour l’exercice 2016.
Toutefois, des sources recoupées auprès des régies financières, la RDC a perçu près de 270 millions de dollars du secteur minier, au premier semestre 2016. Les projections les plus optimistes tablent sur 500 millions de dollars les recettes minières en 2016, dont quelques centaines de milliers de dollars provenant du secteur de l’or. Ce qui est certain est que le secteur minier est loin de supporter comme en 2015 plus de 20 % du budget de l’État. Selon des estimations des experts, les mines pourraient rapporter, dans le meilleur des cas, quelque 500 millions de dollars. Les mêmes griefs sont une fois encore imputés aux régies financières (DGI, DGRAD et DGDA) qui collectent pour compte de l’État. L’impôt sur les bénéfices et profits qui devrait rapporter gros, a fait l’objet des compromis, selon le très sérieux centre de recherche Carter, au point d’être réduit en une peau de chagrin.
Selon le secrétariat exécutif de l’ITIE/RDC, quelque 105 entreprises minières opèrent en RDC. Leurs chiffres d’affaires vont crescendo depuis 2010. De plus de 7 milliards de dollars en 2013, ils dépasseraient les 11 milliards à ce jour. Alors que l’État ne se contente que de ce les minings concèdent bien à lui déclarer et donner. Voilà qui relance le débat sur la révision du code minier. Le Premier ministre, Samy Badibanga, s’est ouvertement prononcé pour l’amender. Question de rétablir l’État dans ses droits. Tout amendement au code minier qu’apporterait l’une ou l’autre Chambre du Parlement, courant 2017, ne sera d’application qu’en 2027, à en croire le ministre de tutelle, Martin Kabwelulu, qui s’était déjà prononcé sur le sujet devant la Chambre des Mines de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) opposée à tout amendement du code actuel. Il totalisera en juillet 2017 15 ans d’application.
Paradis fiscal
Selon le code minier, l’opérateur minier n’est tenu que de rapatrier 40 % de ses revenus en devises. L’on sait pourtant combien la liquidité en monnaie forte pose problème au marché financier congolais. Par ailleurs, le secteur minier a aussi son régime de change singulier, à l’abri du yo-yo du régime règlementé par la Banque centrale. Les entreprises minières dites aussi minings sont redevables de l’impôt sur le chiffre d’affaires à l’intérieur sur les ventes réalisées et les services rendus sur le territoire national. Mais les ventes des produits à une entité de transformation établie en RDC sont expressément exemptées. Les autres ventes des produits à l’intérieur de la RDC constituent l’assiette de cette « contribution » et le taux applicable est de 10 %. Les services rendus par le titulaire sont imposables au taux de droit commun. Le titulaire du droit ou titre minier ou de carrière supporte la contribution sur le chiffre d’affaires à un taux préférentiel de 5 % lorsqu’il est bénéficiaire des prestations des services liés à son objet social. Mais suite à l’instauration de la TVA – en remplacement de l’impôt sur le chiffre d’affaires (ICA) – dont l’application dans le secteur minier fait débat, tous ces taux passent quand même à 16%. Il sied également de rappeler qu’avant l’instauration de la taxe sur la valeur ajoutée, l’acquisition par le titulaire des biens produits localement était imposable au taux de 3 % pour les biens liés à l’activité minière. Selon le code minier, le régime fiscal soumis à l’opérateur minier compte également l’impôt sur les véhicules qui n’est pas à confondre avec la taxe spéciale sur la circulation routière perçue par la Société nationale d’assurances (SONAS) au taux de 16 %. Il y a aussi l’impôt foncier, l’impôt sur les revenus locatifs (22 %) et l’impôt sur la superficie des concessions minières et d’hydrocarbures qui est de 0,02dollar/ha pour la première année, 0,03 dollar/ha pour la 2ème année, 0,035 dollar/ha pour la 3ème année et de 0,04 dollar/ha pour les années suivantes, pour le titulaire d’un permis de recherche. Pour le titulaire d’un droit minier d’exploitation, l’impôt sur la superficie va crescendo de 0,04 à 0,06 puis 0,07 dollar pour enfin se fixer à 0,08 dollar. Le taux de la redevance minière est de 0,5 % pour le fer ou les métaux ferreux, 2 % pour les métaux non ferreux, 2,5 % pour les métaux précieux, 4 % pour les pierres précieuses, 1 % pour les minéraux industriels, les hydrocarbures solides et autres substances non recensées dans le code minier. L’impôt professionnel sur les bénéfices au taux de 30 %, l’impôt professionnel sur les rémunérations à charge des employés au taux de droit commun, l’impôt exceptionnel sur les rémunérations des expatriés.
Avant de commencer ses travaux ou son projet, le titulaire du droit ou titre minier et/ou de carrière dresse la liste comprenant le nombre et la valeur des biens mobiliers, des équipements, des véhicules, des substances minérales et d’autres intrants devant bénéficier d’un régime douanier particulier plutôt privilégié. Ces biens et produits sont soumis à un droit d’entrée de 2 %. Les biens et produits des sociétés affiliées et sous-traitants liés au projet jouissent également de ce taux préférentiel s’ils sont repris sur la liste que le titulaire transmet aux ministres des Mines et des Finances. Le taux du droit d’entrée (des biens repris sur la liste) passe de 2 à 5 % dès que l’exploitation minière devient effective. Cependant les carburants, les lubrifiants, les réactifs et autres consommables destinés aux activités minières sont soumis à un droit d’entrée de 3 % pendant toute la durée du projet minier. La nouvelle loi portant sur la taxe sur la valeur ajoutée supprime le droit d’entrée pour les lubrifiants et les réactifs au bénéfice des minings.
L’application du taux de droit commun aux minings relève plutôt de la sanction, selon l’esprit du code minier. En fait, ce n’est qu’en cas de fraude sur la déclaration lors des importations dans le cadre des travaux d’extension d’un projet minier, le titulaire d’un titre minier est passible des droits d’entrée et de la contribution sur le chiffre d’affaires à l’importation au taux de droit commun. Force est de constater cependant que la grande cité de Tshikapa est demeurée un gros village alors que plus de 10 millions de carats des diamants ont été extraits de son sol. Et si les minerais n’étaient qu’une malédiction pour la RDC…