AFRICA CEO Forum réunit des grands décideurs politiques et financiers africains pour des échanges autour du thème central « Faire de l’intégration économique du continent un atout puissant pour la croissance du secteur privé et l’émergence de nouveaux champions africains ! »
Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le président de la République démocratique du Congo, a tenu à être présent au forum de Kigali pour « rassurer » les investisseurs internationaux. Étant donné que le pays fait face à de nombreux défis, notamment celui de la diversification économique pour se sortir du carcan de la dépendance vers l’extérieur et du secteur minier contrôlée par les compagnies étrangères. Et quand on sait qu’Africa CEO Forum est une tribune appropriée pour le nouveau président congolais de « rassurer les décideurs du secteur privé, potentiels investisseurs, de la disponibilité du pouvoir de Kinshasa de les accompagner dans l’exploitation des opportunités d’affaires en RDC, pour un partenariat gagnant-gagnant ».
Selon des sources proches du Palais de la nation, Fatshi est allé à Kigali pour vendre son projet de relance économique aux investisseurs internationaux et aux chefs d’entreprise réunis, les réformes initiées dans le cadre de l’assainissement du climat des affaires. Malgré l’indice élevé des potentialités, le taux d’investissement dans le pays demeure très faible, soit 3,5 % en moyenne. D’où la nécessité d’un vaste processus d’industrialisation de son économie.
Pendant deux jours (25 et 26 mars), la capitale du Rwanda vibre au son d’Africa CEO Forum, considéré comme un des plus meetings dédiés au secteur privé en Afrique. Chaque année, le groupe Jeune Afrique et Rainbow Unlimited, avec l’appui de l’IFC (faisant partie de la Banque mondiale), réunissent les décideurs politiques, les chefs d’entreprises, les investisseurs et les experts qui viennent de partout. Le meeting a été initié en 2012 par Amir Ben Yahmed, le directeur général du groupe Jeune Afrique.
Argumentaire
En mars 2018 à Abidjan, en Côte d’Ivoire, environ 1 500 chefs d’entreprise, décideurs publics et investisseurs d’Afrique et du monde entier ont orienté leurs discussions vers « la transformation nécessaire des champions africains face à la concurrence internationale ». Cette année, il est question toujours de l’intégration économique, mais surtout de mobiliser le secteur privé. De la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) à la guerre commerciale sino-américaine, argumentent les organisateurs, des fractures se dessinent au sein de l’économie mondiale.
À rebours de cette évolution, une Afrique jusqu’ici hyper fragmentée s’est engagée dans un processus accéléré d’intégration, avec la signature historique à Kigali en mars 2018 de l’accord prévoyant la création de la Zone de libre-échange continentale (ZLEC). Mais alors qu’une longue phase de négociations s’est ouverte pour sa mise en place, des changements importants doivent être apportés pour faire de cette initiative un succès, soulignent-ils. « L’existence de barrières logistiques et financières, l’absence de coordination entre États, la faible spécialisation des économies, et la crainte de pâtir d’une concurrence accrue d’entreprises venant de pays voisins sont autant d’écueils qui expliquent le niveau actuel des échanges intra-africains et, par conséquent, la taille modeste des champions continentaux. »
À l’heure où l’Afrique tarde à retrouver une croissance soutenue et où les investissements directs étrangers (IDE) montrent des signes de faiblesse, poursuivent les organisateurs, l’idéal que représente le marché commun offre au secteur privé l’opportunité unique de se mobiliser pour obtenir des changements indispensables à une réelle intégration.
Échanges intra-régionaux
Pour sa 7è édition, Africa CEO Forum a donc choisi de réunir ses 1 500 participants autour d’un véritable agenda de transformation… « Quelles priorités pour doper les échanges et investissements intra-régionaux ? Que peut faire une Afrique unie pour mieux protéger ses intérêts et ses industries ? Comment s’assurer de la pleine implication du secteur privé dans les projets d’infrastructures et de logistique transfrontaliers ? Quels enseignements tirer de la Communauté d’Afrique de l’Est – modèle régional considéré comme le plus avancé – alors qu’il est aujourd’hui confronté à ses premières tensions ? Comment accélérer l’émergence d’une réelle industrie continentale des services financiers ? » Pendant deux jours, à travers une quarantaine de panels, d’ateliers public-privé et de cas pratiques, dirigeants et chefs d’entreprise, investisseurs, chefs d’État et ministres débattent de ces sujets mais aussi d’autres enjeux pour le secteur privé africain tels que l’accès des femmes dirigeantes aux conseils d’administration ou encore la modernisation de la gouvernance des entreprises familiales. Avec une ambition claire : « faire de l’intégration économique du continent un atout puissant pour la croissance du secteur privé et l’émergence de nouveaux champions africains ! »
Marché unique : le monde des affaires peut-il y croire ?
Le débat, axé sur le commerce, ne doit toutefois par faire oublier les raisons profondes qui expliquent le faible niveau des échanges intra-africains (moins de 20 % des échanges totaux) : infrastructures inadaptées et faible complémentarité des économies, entre autres. Votée par 52 pays africains, la Zone de libre-échange continentale (ZLECA) se veut un puissant instrument de croissance, d’emploi et même d’industrialisation. Elle permettrait notamment aux entreprises de bénéficier de nouvelles opportunités géographiques et d’économies d’échelle.
À la veille de l’entrée en vigueur de la ZLECA, comment le secteur privé africain peut-il s’y préparer ? Quels sont les sujets bloquants ? Qui pourraient être les grands gagnants de l’intégration ? L’intégration des infrastructures, accords aériens, libre circulation : au-delà des tarifs douaniers, quelles sont les priorités ? Comment expliquer et surmonter les réticences de certains acteurs du secteur privé ?
En Afrique, les échanges intra-régionaux de produits agricoles et agro-industriels restent très limités : ils représentent officiellement moins de 18 % de la totalité des flux commerciaux continentaux. De nombreux obstacles tels que l’insuffisance des infrastructures, les tarifs douaniers élevés et la fragmentation de la chaîne de valeur freinent l’avènement de marchés régionaux.