La petite taille des usines de transformation du pétrole des pays membres de cette organisation constitue un grand handicap à la performance. Pour résoudre ce problème, ils sont déterminés à monter une infrastructure collective.
Un projet permettant à la CÉMAC d’avoir une politique commune de raffinage et de distribution des produits pétroliers est en étude. Les États membres de cette organisation veulent se doter d’une raffinerie communautaire de grande taille. Le projet pourrait se concrétiser dans les années à venir et il concerne six pays : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée-Équatoriale, la République centrafricaine (RCA) et le Tchad. Ces pays veulent rendre opérationnel le Programme économique régional (PER) et mettre en marche la Vision CÉMAC 2025, qui vise à faire de la zone qu’ils occupent « un espace économique intégré et émergent » dans les quinze prochaines années. Selon les normes techniques, les industries lourdes comme la raffinerie répondent à une caractéristique spécifique : avoir une taille supérieure à un seuil critique et le niveau d’équipement adéquat pour être fructueuses.
La réforme est voulue par la commission de la CÉMAC. Tous les pays membres ont convenu que la raffinerie régionale à mettre en place doit avoir la taille critique, une industrie pétrolière performante capable de leur permettre au niveau régional de réaliser des bénéfices. Dans la zone CÉMAC, il existe déjà des raffineries au Gabon, au Cameroun, au Congo et au Tchad.
Toutes ces raffineries sont malheureusement de petite taille, ce qui les condamne à ne pas être rentables. « La question de la mutualisation des moyens de production ou des moyens de raffinage dans le domaine pétrolier est une simple question économique. Si les rapports d’échelle font que c’est mieux transformé ensemble et ensuite chacun reprend sa part, eh bien ce serait illogique de ne pas recourir à cette voie », indique Jean Eudes Teya, commissaire au département de l’étude, de la recherche et du développement social, chargé des droits de l’homme et de la bonne gouvernance de la CÉMAC.
Petite raffinerie mal entretenue
En général, nombre de pays d’Afrique produisent du pétrole mais peu seulement le raffinent. Guy Gweth, directeur des Opérations de Knowdys, un cabinet d’intelligence économique explique qu’en 2014 les données économiques ont recensé 47 raffineries sur le continent africain. Pour lui, cela donne une moyenne supérieure à une raffinerie par pays producteur, mais le débat est plutôt moins dans la quantité que dans la qualité des raffineries existantes.
« Les spécialistes de l’intelligence économique qui analysent la situation des raffineries africaines sont frappés par deux choses. La première c’est qu’elles sont de petite taille et dépassées. Avec une moyenne d’âge de 28 ans, nos infrastructures de raffinage sont inadaptées à un marché aussi exigent, évolutif que concurrentiel. C’est l’une des principales leçons tirées des échecs des raffineries de Dar es Salaam, Maputo, Monrovia et Nouadhibou. La deuxième chose, c’est qu’elles sont assez peu entretenues, faute de moyens suffisants. Ce facteur écourte l’espérance de vie d’au moins 30% d’entre-elles. L’exemple le plus emblématique reste celui de la raffinerie de Lomé qui démarra ses activités en 1977 pour arrêter de fonctionner l’année suivante. Cette situation est propre aux pays en développement », précise-t-il.
Pétrole sans développement économique
Dans les économies des pays de la CÉMAC, l’exploitation du pétrole occupe une grande place. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) donne des estimations selon lesquelles la production pétrolière représente 35,6% du Produit intérieur brut (PIB) sous-régional, 56,1% des recettes budgétaires et 69,1% des recettes d’exportation.
À cause de la petitesse des raffineries existantes, la production de pétrole n’a pas permis de stimuler le développement économique dans ces pays. Par rapport aux infrastructures de base, ils n’en ont pas assez. Il n’y a que le Cameroun qui a un tissu industriel digne de ce nom. Jusque-là le site où sera implanté le projet n’est pas encore déterminé. Il est prévu une étude de faisabilité pour un financement d’un montant de 3 millions de dollars (1,5 milliard de francs CFA) qui prend en compte une réflexion liée à la création d’une plateforme régionale de stockage de produits pétroliers. Des propositions sont faites pour le site du port en eau profonde de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville.