La Chine loue les efforts du MNS et exhorte les autres parties à faire autant

Il y a comme une sorte d’hypocrisie dans la communauté internationale. Les témoins et garants du traité sur les Grands lacs se montrent plus exigeants envers la RDC et moins regardants vis-à-vis des autres parties dans le suivi de sa mise en œuvre… 

La Chine apporte tout son soutien aux efforts du Mécanisme national de suivi de la mise en œuvre des engagements souscrits au titre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région des Grands lacs (MNS) et encourage les autres pays à faire autant. C’est le message que l’ambassadeur de Chine en République démocratique du Congo, Wang Tong Qing, a lancé à l’issue de l’entretien avec le coordonnateur du comité exécutif du MNS, le général Denis Kalume Numbi, jeudi 15 mars. L’ambassadeur de Chine qui s’est rendu au siège du MNS, s’est réjoui d’avoir eu une « rencontre amicale » avec le général Kalume car elle lui a permis de mieux « comprendre » l’évolution de la situation dans les Grands lacs. Pour le diplomate chinois, « la RDC constitue le centre de la situation dans les Grands lacs », et en tant que membre du Conseil de sécurité de l’ONU et aussi « pays ami » de la RDC, la Chine « encourage » les autres pays qui ont « signé l’Accord à le concrétiser », à « intensifier et à renforcer la confiance politique ainsi que la compréhension » et à « s’entraider pour le développement, la paix et la stabilité dans la région. »

La mise en œuvre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba est accompagnée par des témoins et garants, qui sont des partenaires stratégiques, les P5 (les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU), comme on les appelle, entre autres la Chine. C’est à ce titre que l’ambassadeur de Chine est allé au MNS pour échanger de « vive voix » avec le coordonnateur de son comité exécutif. L’entretien a porté sur les « grandes orientations » et « propositions » que les participants à l’atelier multi-acteurs d’évaluation des engagements nationaux dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba (1-2 juin) ont formulées à l’endroit du chef de l’État, Joseph Kabila Kabange. « Nous avons évoqué avec l’ambassadeur de Chine ce constat qui montre qu’au niveau des engagements nationaux, la RDC s’en acquitte pleinement et de bonne foi. », a déclaré le général Kalume. Au niveau des engagements régionaux, on constate, malheureusement, que c’est la RDC, seule, qui les respecte, à travers plusieurs réformes qui sont faites. Les autres pays de la région, parties à l’accord, qui devraient en principe compléter les actions menées par la RDC pour que ces engagements soient effectivement mis en application et amènent la paix, ne les honorent pas de bonne foi.

Le général Kalume à indiqué à la presse qu’au cours de cet entretien, il a été plus question du deuxième engagement régional, qui demande à chacun des pays impliqués dans la mise en application de l’accord de ne pas permettre aux groupes armés de déstabiliser les voisins. En effet, depuis que l’Accord-cadre d’Addis-Abeba a été signé, le 24 février 2013, la RDC s’emploie à neutraliser les groupes armés étrangers présents sur son territoire. C’est le cas des ADF-NALU (Ougandais) et des FDLR (Rwandais). La RDC a livré au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) des chefs FDLR et à la Cour pénale internationale (CPI) le chef milicien Bosco Ntaganda. La RDC a conclu un accord avec la rébellion M23 après l’avoir défaite.

La RDC continue à faire davantage d’efforts pour appliquer intégralement l’Accord-cadre d’Addis-Abeba. Mais en contrepartie, aucun geste allant dans le sens de ses efforts. Par exemple, le Rwanda se montre frileux pour extrader les chefs rebelles Laurent Nkunda et Jules Mutebusi… L’Ouganda continue à accorder protection à des dirigeants de M23 poursuivis pour différents crimes… « Nous avons porté tout cela à la connaissance des garants de l’accord, surtout au partenaire stratégique qui est à côté de nous (ndlr, ambassadeur de Chine), pour qu’ils prennent des dispositions pour rétablir l’équilibre, pour que la paix et la stabilité reviennent réellement dans la région et pour que tous les efforts consentis par le président de la République quant à ce soient récompensés comme il se doit. », a souligné le coordonnateur du comité exécutif du MNS.

En effet, l’Est du pays est toujours en proie à des conflits récurrents et à des violences persistantes du fait de groupes armés nationaux et étrangers. Dans le cadre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, les engagements nationaux de la RDC sont au nombre de 6+1(la lutte contre l’impunité sous toutes ses formes) : « Ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures des États voisins ; n’est pas tolérer, ni fournir une assistance ou un soutien quelconque à des groupes armés ; respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des États voisins ; renforcer la coopération régionale, y compris à travers l’approfondissement de l’intégration économique avec une attention particulière accordée à la question de l’exploitation des ressources naturelles ». Il s’agit aussi de « ne pas héberger ni fournir une protection de quelque nature que ce soit aux personnes accusées de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, d’actes de génocide ou de crimes d’agression, ou aux personnes sous le régime de sanctions des Nations Unies ; et de faciliter l’administration de la justice, grâce à la coopération judiciaire dans la région ».

Pour la communauté internationale, ces engagements sont, par contre, au nombre de cinq : « le Conseil de sécurité reste saisi de l’importance d’un soutien à la stabilité à long terme de la RDC et de la région des Grands lacs ; un engagement renouvelé des partenaires bilatéraux à demeurer mobilisés dans leur soutien à la RDC et la région, y compris avec les moyens appropriés pour assurer la durabilité de ces actions sur le long terme ; appuyer la mise en œuvre des protocoles et des projets prioritaires du Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement dans la région des Grands lacs ; un engagement renouvelé à travailler à la revitalisation de la Communauté économique des pays des Grands lacs (CEPGL) et à soutenir la mise en œuvre de son objectif de développement économique et d’intégration régionale ; une revue stratégique de la MONUSCO afin de renforcer son appui au gouvernement pour faire face aux enjeux d’ordre sécuritaire et favoriser l’expansion de l’autorité de l’État ; la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour soutenir les efforts en vue de solutions durables avec un plan à plusieurs volets qui permettra la convergence de toutes les initiatives en cours ».

Le traité stipule par ailleurs que la RDC, ses voisins, les partenaires régionaux et la communauté internationale travailleront de façon synchronisée afin de promouvoir ces principes. Un Mécanisme régional impliquant les dirigeants de la région, jouissant des bons offices du secrétaire général des Nations unies, de la présidente de la Commission de l’Union Africaines (UA), du président de la CIRGL et du président de la SADC, en qualité de garants de l’accord, a été établi et se réunit régulièrement pour passer en revue les progrès dans la mise en œuvre des engagements régionaux dans le respect de la souveraineté des États concernés. Quant au MNS, il fonctionne dans le respect total de la souveraineté de la RDC. Pour sa part, la MONUSCO fait partie de la solution et continue de travailler en étroite collaboration avec le gouvernement congolais.

Évaluation

Organisé (1-2 juin) à l’initiative du comité exécutif du Mécanisme national de suivi (MNS) avec le concours du ministère du Plan et l’appui de la MONUSCO, l’atelier multi-acteurs (une rencontre technique de haut niveau) a passé en revue le chemin parcouru, identifié les défis inhérents aux engagements, mais aussi évalué les opportunités évidentes qui s’offrent à la RDC et aux autres parties prenantes pour la paix, la sécurité et la coopération dans les Grands lacs. Les participants à cet atelier ont grosso modo recommandé que la communauté internationale exige la réciprocité aux autres pays parties dans la mise en œuvre de l’accord. C’est aussi le point de vue de la société civile dans l’Est du pays. Des délégués des associations de la société civile venus du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri se sont rendez-vous à Goma pour débattre de l’activisme des groupes armés dans cette partie du pays.

Au terme de leur évaluation des engagements de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, et de leurs violations, ils ont recommandé au Conseil de sécurité de l’ONU de prendre des « sanctions » contre les pays signataires qui violent leurs engagements. Ils ont même invité la RDC à s’en désengager, si ses voisins signataires continuent à violer leurs engagements. Et, le Rwanda et l’Ouganda, qui « violent constamment leurs engagements », à « privilégier » la coopération et l’intégration régionale, tel que stipulé dans cet accord. Au lieu de procéder par « l’affairisme » à travers « l’instrumentalisation » des groupes armés pour « déstabiliser » la RDC et « piller » ses ressources. Enfin, ils ont exigé le profilage (niveau 5) des réfugiés congolais à l’étranger pour leur retour au pays et vice-versa, ainsi que « la construction d’un mur aux frontières de la RDC avec le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi. » c’est fort de café.