Depuis tout ce temps, la République démocratique du Congo n’avait pas de loi spécifique sur le régime général de la sécurité sociale, géré par ailleurs par l’Institut national de sécurité sociale (INSS). Promulguée le 15 juillet 2016, la loi n°16/009 est entrée en vigueur le 15 juillet.
Bien avant, en avril, Lambert Matuku Memas, le ministre d’État et ministre de l’Emploi, du Travail et de la Prévoyance sociale, a lancé la campagne de vulgarisation et de sensibilisation sur la loi. Cette dernière s’inscrit dans le cadre de l’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD) dont la cible 8.8 impute aux gouvernements de garantir la défense des droits des travailleurs et d’assurer la protection de tous les travailleurs d’ici à 2030.
La loi du 15 juillet 2016 remplace en fait le décret-loi organique du 29 juin 1961. Elle a le mérite d’offrir la couverture intégrale des branches du régime général de la sécurité sociale, de supprimer les restrictions et les discriminations dans l’application du décret-loi organique du 29 juin 1961.
« Face aux enjeux et aux défis de la protection sociale au niveau mondial et au niveau continental, le gouvernement est déterminé à aller plus loin dans son engagement avec la population pour réduire les disparités et améliorer l’accès de tous à une protection sociale pour tous », explique Lambert Matuku.
L’âge de la retraite
La loi apporte des « innovations importantes » concernant la couverture sociale et les prestations ainsi que leurs conditions d’octroi. Par exemple, les innovations dans la branche des prestations aux familles constituent l’un des mérites de la nouvelle loi. Elle couvre tout le territoire national et intègre le principe édicté par la Conférence internationale de la prévoyance sociale (CIPRES) et la convention 102 du 20 juin 1952 sur la norme minimum de la sécurité sociale.
Elle intègre aussi le droit aux allocations prénatales et de maternité et le droit aux indemnités journalières pour la femme travailleuse pendant le congé de maternité afin de compenser la perte de ses revenus. L’objectif de la réforme est d’engager en synergie avec le gouvernement et les partenaires sociaux, une nouvelle ère de la sécurité sociale empreinte de plus d’assurance. Concernant la branche des pensions, la loi prend en compte les principes d’égalité entre l’homme et la femme. L’âge de départ d’office à la retraite est fixé à 65 ans tant pour l’homme que pour la femme. Le droit de rachat de la carrière pour tout assuré âgé de 60 ans au moins qui ne totalise pas 180 mois d’assurance, est aussi pris en considération. Il en est de même de l’allocation de vieillesse pour l’assuré ayant moins de 15 ans d’assurance et la pension d’orphelins et de survivant aux ayants-droit d’un assuré.
La loi votée innove aussi en matière de risques professionnels, notamment la prise en charge, en plus des accidents du travail et des maladies professionnelles. Elle allonge à 60 jours le délai de déclaration de l’accident de travail et à 120 jours le délai de déclaration de la maladie professionnelle.
Par ailleurs, la couverture sociale est désormais étendue à plusieurs autres catégories: les mandataires de l’État, les personnels de l’État, les employés locaux des missions diplomatiques accrédités et établis en RDC, les associés actifs des sociétés, les assurés volontaires et les détenus exécutant un travail périlleux victimes d’un accident survenu à l’occasion de ce travail. Enfin, selon la loi, l’extension de la sécurité sociale en tant qu’outil de réduction de la pauvreté et des inégalités, va contribuer à la croissance économique et au développement.
De l’INSS à la CNSS
Dans la perspective de sa mutation conformément à la loi n°16/009 du 15 juillet 2006, l’INSS a organisé du 14 au 16 mai des journées portes ouvertes à l’intention des banques, entreprises publiques, organisations patronales et syndicales, et partenaires sociaux.
Le but de cette activité était d’expliquer les différentes branches de prestation, notamment la pension, l’assujettissement et le risque professionnel.
Ces journées ont été également dédiées aux écoles, universités, sociétés paraétatiques, secteur minier, sociétés commerciales et des télécommunications, associations féminines… Pour Agnès Mwad Nawej Katang, directrice générale de l’INSS, ces journées portes ouvertes ont été « des moments forts d’échange et de dialogue entre l’institut, les partenaires sociaux et le grand public ».
En janvier, l’INSS a été l’hôte du 2è séminaire technique du trienium 2017-2019 organisé par le Bureau de liaison de l’Association internationale de la sécurité sociale pour l’Afrique centrale (BLAISAC).
Thème : comment pallier la problématique de l’investissement des fonds de la sécurité sociale ? Les participants venus des organismes de sécurité sociale des pays d’Afrique centrale et des universités ont formulé une série de recommandations, notamment « la sensibilisation des pouvoirs publics sur la nécessité d’une plus grande flexibilité de la loi en matière d’investissements des fonds de la sécurité sociale ». Mais aussi « la nécessité de dresser un état des lieux de l’investissement des fonds de la sécurité sociale et de multiplier les échanges d’expériences ».
Agnès Mwad avait insisté sur la constitution des réserves de sécurité sociale, source de formation de capital destiné à absorber les augmentations des charges ou l’effritement des recettes consécutives aux fluctuations aléatoires et de garantir le paiement futur aux bénéficiaires. « Dès lors, elles devraient être investies dans des secteurs porteurs et créateurs d’emplois, gage d’un développement économique et social et d’une croissance durable et inclusive », a-t-elle déclaré.
Avec la Fédération des entreprises du Congo (FEC), l’entente est cordiale. Les patrons contribuent au financement du régime général de la sécurité sociale et à la promotion du social des assujettis, selon la directrice générale de l’INSS transformé en caisse de sécurité sociale. Elle a prévenu les employeurs sur le relèvement du taux à payer après les études. « Si le capital humain est négligé, on ne peut pas parler d’un développement ou de l’accroissement des recettes au sein d’une entreprise », a-t-elle fait remarquer.
Et d’ajouter : « En protégeant les travailleurs, nous protégeons également l’entreprise parce que s’il y a des employés exposés à beaucoup de risques cela veut dire que l’entreprise aura à débourser considérablement pour les soins médicaux, d’autant plus qu’il n’y a pas une assurance maladie ou une mutuelle de santé… »
Avec la construction d’un hôpital orthopédique, l’INSS entend traiter les accidents de manière appropriée et alléger la charge de tous les employeurs.