La crise s’installe désormais au Port de Boma

Près de quatre mois se sont pratiquement écoulés depuis que le Décret 012/041 interdisant l’importation des véhicules vieux de plus de dix ans a pris effet au Port international de Boma. Cependant, aux dires de la plupart de déclarants en douane de cette ville portuaire, plus rien ne va depuis juin jusqu’à ce jour. La date du 18 juin 2013 était non seulement redoutée par les professionnels du dédouanement, mais aussi par d’autres habitués du port. Bien avant cette date fatidique, tout le monde s’était donc mobilisé afin d’accompagner la mesure encouragée par le gouvernement. A Boma, les autorités de tout bord multipliaient des contacts avec toutes les catégories de déclarants en douane, à travers leurs syndicats. Ces derniers espéraient l’ajournement pur et simple de ladite mesure. Peine perdue!

 Chômage déguisé au Port de Boma

Seulement, au premier jour de son application, les syndicats des déclarants en douane, l’Union des déclarants du Congo (UDECO)  et l’Union des déclarants de Boma (UDEDO) ne pouvaient plus hésiter à démontrer l’inadéquation du décret 012/41 et surtout son inadaptation face aux réalités économiques de Boma. A quatre mois de son exécution, ledit décret ne cesse de montrer ses failles. A ce niveau, les syndicats de Boma souhaitent plutôt sa mise au placard.  « Boma est devenu l’ombre d’elle-même. Les appareils électroménagers usagers appelés communément Bilokos se font rares sur le marché de Boma », indiquent les revendeurs. Même si cette réalité est connue de tous, les quelque rares Djika, (appellation collée aux Congolais de l’étranger et importateurs des véhicules et autres biens de valeur), qui osent encore importer des véhicules par le port de Boma, sont facilement indexés par les revendeurs de Bilokos. Ils les accusent de ne viser rien que les gros bénéfices. Pour la plupart de revendeurs, « les Djika  se comportent comme s’ils n’ont pas de cœur. Ils nous imposent les prix de leur choix. Souvent, Ils nous font voir que les frais payés aux services compétents du port ont été revus à la hausse », laissent-ils  entendre. Conséquence immédiate : La surchauffe se généralise sur le marché des biens et des services. Tenez ! Un fer à repasser qui a coûté entre 5 et 7 dollars américains est passé à 12 dollars. Un poste téléviseur de 14 pouces qui se vendait à 20 ou 30 dollars, il y a encore 3 mois, est proposé actuellement à 50 dollars voire 60. Au-delà des Bilokos, les voitures de seconde main voient leurs prix galoper à cause de la rareté des biens enregistrée sur le même marché. « On ne sait plus comment s’adapter au nouvel environnement  économique dicté par l’application du décret ministériel. Tous les secteurs de la vie sont affectés par la crise qui a fini par s’installer au Port de Boma. De la Mairie jusqu’au moindre service de recouvrement de recettes, Les hôteliers, la DGDA, la DGRAD ou encore  la DGI, on sent bien le coup porté à la principale activité qu’est le dédouanement », regrette amèrement, Joseph Antoine Nkolomoni Lupo, président de l’UDECO. Peu avant l’application dudit décret, le même Nkolomoni invitait ses pairs à ne pas s’opposer à sa mise en œuvre. « Nous sommes patriotes. L’Etat  nous a créés pour maximiser les recettes. Nous allons travailler conformément à la réglementation en vigueur. Nous avons bien l’obligation de défendre le décret ministériel », espérait-il, même s’il n’écartait pas non plus les difficultés qui n’allaient pas tarder à surgir. D’après lui, « le ministère des Transports et Voies de communication aurait suffisamment pris le temps nécessaire à la vulgarisation du décret à tous les niveaux ».Cela sous-entend que les importateurs ainsi que tous ceux qui interviennent dans le circuit de dédouanement devraient être sensibilisés à propos.

Toutefois, il insistait en parlant de la bombe à retardement qui risquait d’exploser à tout moment. Déçu du comportement qu’affichent les nouveaux inspecteurs de la DGDA/Boma, Nkolomoni regrette que ces derniers appliquent une nouvelle nomenclature de tarifs au lieu de s’appuyer sur l’ancienne.

Concernant la DGDA, il affirme que « l’Etat congolais ne l’a pas dotée d’un service technique pour assurer le contrôle de véhicules importés à partir du port de Boma. Rien non plus pour la casse des véhicules qui tombent sous le coup du décret 012/41. Les véhicules dont l’âge est douteux devraient-être mis en quarantaine. Mais, cette dernière n’est pas prévue dans le décret du Premier ministre. Un véritable casse-tête et une éternelle source de problèmes entre les déclarants et la DGDA ». Le plus souvent, ce genre de litige finit par le renvoi de ces véhicules par bateaux dans les pays d’embarquement. Souvent, au prix de douleurs et grincements des dents pour les malheureux importateurs. De regrets en regrets,  Nkolomoni laisse entendre que « le dédouanement, autrefois envié par n’importe quelle autre personne dans le Bas-Congo, se meurt jour après jour à Boma. Point n’est besoin de le cacher », s’insurge-t-il. Actuellement, 3000 revendeurs des Bilokos sont presque au chômage déguisé. Au regard de cette situation, Nkolomoni suggère que tout soit mis en œuvre pour que de nouveaux mécanismes accompagnent ledit décret à bon port. Des mécanismes bien élaborés convenus de commun accord avec toutes les parties concernées par ce décret. Sinon, c’est la catastrophe généralisée qui s’annonce au Port de Boma.