Les recettes de l’État provenant de l’industrie extractive au premier semestre de cette année sont plutôt modestes. À l’Assemblée nationale, quelques députés souhaitent une modification de la législation régissant le secteur, jugée très avantageuse aux sociétés.
Cinq cent trente-sept millions de cinq cent quatre-vingts mille dollars et des poussières. C’est le total des recettes minières du Trésor public au premier semestre 2015. Cela représente environ 300 millions de dollars de moins que l’année dernière. Au cours de la même période, quelque 518 444,70 tonnes de cuivre ont rapporté plus de 2,747 milliards de dollars. Pourtant, en 2014, le même volume a ramené quelque 4 milliards de dollars, permettant ainsi à l’État d’encaisser plus de 830 millions de dollars. La chute des cours du cuivre, depuis le début de l’année, s’est traduite par une érosion financière dans l’industrie minière.
Glencore ferait des émules
L’on comprend sans doute pourquoi Glencore a préféré suspendre sa production de cuivre à Kamoto, où est installée l’une de ses entreprises, Kamoto Copper Company (KCC) et à Mopani, en Zambie. Le géant du négoce des matières premières a également décidé de retirer du marché 400 000 tonnes de cuivre. La crainte, à en croire nombre d’observateurs, c’est de voir Glencore faire des émules à tout moment. La RDC est redevenuepremier producteur mondial de cobalt, mais pour quel avantage ? Durant les six premiers mois de cette année, 40 752 tonnes de cobalt ont été produites pour une valeur de 1,223 millions de dollars, alors que les 6 314 tonnes de zinc ont elles, par exemple, ont rapporté 11 millions de dollars. Pour ce qui est du diamant, 7 290 carats ont été exportés pour une valeur de 109 millions de dollars. Quant à l’or, 16 015 kg ont rapporté 479 millions de dollars. Pour le coltan et à la cassitérite, il n’existe aucune traçabilité concernant le volume des productions et les recettes réalisées. En 2014, la production officielle de coltan en RDC était de 1 217 tonnes, mais l’État n’a jamais pu en déterminer la valeur.
Plus d’une centaine d’entreprises minières
Pour le premier semestre 2015, les recettes d’exportations de ces minerais se chiffrent à 4,570 milliards de dollars. La part de l’État n’atteint même pas 540 millions de dollars, soit moins de 15% des recettes réalisées par les minings. L’ITIE/RDC a répertorié quelque 105 entreprises minières opérant à travers le pays. Depuis 2010, leurs chiffres d’affaires ne font qu’augmenter. De plus de 7 milliards de dollars, en 2013, ils dépasseraient les 11 milliards de dollars aujourd’hui. Le gouvernement, pour sa part, se contente de ce que les minings veulent bien déclarer et lui reverser. Voilà sans doute pourquoi le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, fait fort dans la revendication, demandant à revoir la législation en la matière.
Révision du code minier
Annoncé par le président de l’Assemblée nationale lors de la rentrée parlementaire de mars dernier, le projet de révision du code minier a fait pourtant long feu. D’où, pour certains, un scepticisme tenace quant à le voir émerger à l’occasion de cette nouvelle rentrée parlementaire. Glencore, qui a suspendu toute production de cuivre dans l’ex-Katanga pourrait faire des émules si jamais l’État, quoique apparemment floué, mûrissait l’idée d’amender le code minier. Selon un rapport de la commission sénatoriale dite Commission Mutamba Dibwe, la RDC perd chaque année 450 millions de dollars du fait de la corruption dans le secteur minier. Le ministre des Mines, Martin Kabwelulu, a déjà rassuré les minings que tout amendement du code minier venant du Parlement ne pourrait pas être appliqué avant 2025. « Il n’y a pas d’inquiétudes à se faire », avait-il déclaré. Pour sa part, la chambre des mines de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) a mis ouvertement mis en garde le gouvernement sur son projet de révision des clauses fiscales largement avantageuses aux opérateurs miniers. Le code minier a été élaboré, voté et promulgué en 2002, une période marquée par la guerre sur une bonne partie du territoire national. Ce contexte suffit-il pour expliquer les larges faveurs accordées aux opérateurs miniers ? À moins que cette loi n’ait été le prix à payer par Kinshasa pour la cessation des hostilités…
Régime douanier et fiscal
Contrairement au code minier, les minings reprochent à l’État de ne pas les avoir consultés au préalable à propos de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ils invoquent par ailleurs l’article 222 du code minier qui stipule que « si une législation de droit commun adoptée ou promulguée sur le territoire national postérieurement à la date d’entrée en vigueur du code, (juillet 2002), prévoit des dispositions douanières et fiscales plus favorables que celles contenues dans le code minier, ces nouvelles dispositions sont immédiatement applicables de plein droit dès leur entrée en vigueur ». La TVA est venue remplacer l’impôt sur le chiffre d’affaires (ICA) dont l’ancienne dénomination « Contribution sur le chiffre d’affaires » (CCA) demeure encore dans le code minier. Toutefois, les minings sont redevables de l’impôt sur le chiffre d’affaires à l’intérieur sur les ventes réalisées et les services rendus sur le territoire national. Les ventes de produits à une entité de transformation établie en RDC sont expressément exemptées. Les autres ventes de produits à l’intérieur de la RDC constituent l’assiette de cette contribution et le taux applicable est de 10%. Les services rendus par le titulaire sont imposables au taux de droit commun. Le titulaire du droit ou titre minier ou de carrière supporte la contribution sur le chiffre d’affaires à un taux préférentiel de 5% lorsqu’il est bénéficiaire des prestations des services liés à son objet social.
L’arrivée de la TVA
Mais, suite à l’instauration de la TVA, tous ces taux passent quand même à 16%. Avant l’instauration de la taxe sur la valeur ajoutée, l’acquisition par le titulaire de biens produits localement était imposable au taux de 3% pour les biens liés à l’activité minière. Selon le code minier congolais, le régime fiscal soumis à l’opérateur minier compte également l’impôt sur les véhicules qui n’est pas à confondre avec la taxe spéciale sur la circulation routière perçue par la Société nationale d’assurance (SONAS) au taux de 16%. Il y a aussi l’impôt foncier, l’impôt sur les revenus locatifs (22%) et l’impôt sur la superficie des concessions minières et d’hydrocarbures qui est de 0,02 dollar par hectare pour la première année, 0,03 dollar par hectare pour la deuxième année, 0,035 dollar par hectare pour la troisième année et de 0,04 dollar par hectare pour les années suivantes. Pour le titulaire d’un permis de recherche ou d’un droit minier d’exploitation, l’impôt sur la superficie va de 0,04 dollar à 0,08 dollar. Le taux de la redevance minière est de 0,5% pour les métaux ferreux, 2% pour les métaux non ferreux, 2,5% pour les métaux précieux, 4% pour les pierres précieuses, 1% pour les minéraux industriels, les hydrocarbures solides et autres substances non recensées dans le code minier. L’impôt professionnel sur les bénéfices est fixé au taux de 30% tandis que l’impôt professionnel sur les rémunérations à charge des employés est fixé au taux de droit commun, etc. Avant de commencer ses travaux ou son projet, le titulaire du droit ou titre minier et/ou de carrière dresse la liste comprenant le nombre et la valeur des biens mobiliers, des équipements, des véhicules, des substances minérales et d’autres intrants devant bénéficier d’un régime douanier privilégié. Ces biens et produits sont soumis à un droit d’entrée de 2%. Les biens et produits des sociétés affiliées et sous-traitants liés au projet jouissent également de ce taux préférentiel s’ils sont repris sur la liste que le titulaire transmet aux ministères des Mines et des Finances. Le taux du droit d’entrée (des biens repris sur la liste) passe de 2 à 5% dès que l’exploitation minière devient effective.
Pas de droit d’entrée pour les lubrifiants, les réactifs et autres consommables
Cependant les carburants, les lubrifiants, les réactifs et autres consommables destinés aux activités minières sont soumis à un droit d’entrée de 3% pendant toute la durée du projet minier.
La nouvelle loi portant sur la TVA supprime le droit d’entrée pour les lubrifiants et les réactifs. L’application du taux de droit commun aux minings relève plutôt de la sanction, selon l’esprit du code minier. Mais c’est seulement en cas de fraude sur la déclaration des importations dans le cadre des travaux d’extension d’un projet minier. La sanction porte sur les droits d’entrée et la contribution sur le chiffre d’affaires à l’importation.