LES RÉSEAUX sociaux intéressent particulièrement les annonceurs politiques. Grâce aux données personnelles récoltées par ces groupes, ils peuvent cibler plus finement leurs messages, par exemple, par affinités politiques ou par lieu géographique. Ainsi, aux États-Unis, sur les six derniers mois, 256,4 millions de dollars ont été dépensés en publicités politiques sur Facebook, a indiqué ce réseau social dans une étude. Cette somme a précisément servi à payer près de 1,7 million d’annonces destinées à soutenir soit un candidat à un scrutin, soit une mesure soumise au vote ou abordant « une problématique d’importance nationale ».
Selon les constats du groupe, les plus grosses dépenses (5,4 millions de dollars pour 6.024 pubs) sont venues du comité de soutien « Beto for Texas » d’un parlementaire démocrate, Beto O’Rourke, qui affronte le républicain Ted Cruz au Texas lors des élections législatives du 6 novembre. En deuxième position vient le comité de soutien pro-Trump « Make America Great Again », avec 3,1 millions de dollars de dépenses pour 50.148 messages.
À titre de comparaison, Facebook a engrangé au seul deuxième trimestre 13 milliards de dollars de recettes publicitaires à travers le monde. Autrement dit, la publicité politique sur Facebook représente une goutte d’eau dans le business du réseau social.
Éviter de nouveaux scandales
Facebook, qui vit une année noire ternie par les scandales (notamment Cambridge Analytica, son utilisation des données personnelles à des fins publicitaires et la récente fuite massive de données), est attendu au tournant pour les élections de mi-mandat aux États-Unis, dans un contexte de fortes tensions entre la majorité présidentielle de Donald Trump et ses opposants.
Pour sa propre image, le réseau social doit absolument éviter le fiasco de 2016, où par manque de contrôle, il avait laissé la propagande étrangère, notamment russe d’après les enquêtes du renseignement américain, utilise massivement ses outils pour tenter d’influencer le scrutin. De nombreux experts estiment ainsi que Facebook a contribué à diffuser des fake news qui ont profité à Donald Trump.
Nouvellement attaché à la transparence, le groupe multiplie donc les initiatives sur tous les fronts : lutte contre les fausses nouvelles, partenariats avec les médias, changement de l’algorithme pour réduire la part des contenus issus des médias, etc. Une véritable « War Room » pour surveiller la manipulation politique. Ce rapport sur la publicité à caractère politique est le tout premier sur le sujet. Facebook a aussi lancé un outil permettant de retrouver les archives des différentes publicités politiques aux États-Unis publiées sur sa plateforme et sur Instagram. Il sera mis à jour toutes les semaines, annonce le réseau social.
La firme de Menlo Park a promis d’être plus vigilante sur l’identité des annonceurs et de mieux surveiller les tentatives de manipulations, grâce à ses systèmes d’intelligence artificielle mais aussi via le doublement, à 20 000 personnes, du nombre d’employés chargés de la sécurité.
Facebook vient même de lancer une « salle de crise » (« War Room ») dans son siège, où une équipe est entièrement consacrée à détecter les signes suspects autour de scrutins majeurs. Il s’agit d’un véritable centre de commandement, avec des analystes de données, des ingénieurs informatiques, des juristes, des experts en menaces, tous réunis au même endroit pour réagir très vite à des tentatives de manipulation politique via le réseau social. Par exemple, le jour du vote pour le scrutin présidentiel au Brésil, la War Room a su détecter de nombreux messages annonçant un report de l’élection pour cause de manifestations et supprimer les relais de cette fausse nouvelle avant qu’elle ne devienne virale.