Cela fait dix ans que la République démocratique du Congo a décidé d’un moratoire sur le gel d’attributions de nouvelles concessions forestières. Mais l’ONG Geenpeace ne démord pas en accusant le gouvernement ne pas respecter ce moratoire. Selon l’ancien ministre de l’Environnement, Robert Bopolo, mis en cause par l’ONG pour avoir « violé » le moratoire en attribuant des concessions à des membres de la Majorité au pouvoir, les accusations de Greenpeace ne sont pas fondées. Au contraire, il revient à la communauté internationale de « concrétiser ses promesses de compensations financières » vis-à-vis de la RDC pour le gel de l’exploitation de son massif forestier, deuxième poumon mondial après celui de l’Amazonie.
La COP21 a reconnu pour la première fois de manière officielle et sans équivoque l’importance de la forêt et de la réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation forestière (REDD). Un article de l’Accord de Paris sur le climat est spécifiquement consacré à la gestion durable des forêts et au renforcement des stocks de carbone forestier. Les 196 parties signataires de la COP21 reconnaissent l’importance des forêts dans la lutte contre les changements climatiques, d’une part, et, d’autre part, l’importance de renforcer les financements destinés à assurer une conservation efficace des forêts.
Les retombées financières
La RDC jouit déjà des avantages financiers spécifiques liés au gel des activités forestières. Un ensemble des projets et programmes REDD + sont mis en œuvre en RDC et d’autres sont dans le pipeline, soit 375 millions de dollars, avait indiqué Robert Bopolo, alors ministre de l’Environnement de retour, fin novembre 2016, de la COP 22 à Marrakech au Maroc. Quelque 60 millions de dollars de cette enveloppe sont destinés au Programme d’investissements pour les forêts (PIF) et 25 autres millions aux projets REDD + géographiquement intégrés du Fonds forestier du bassin du Congo (CBFF).
Des projets concernant les femmes et les enfants sur le plan communautaire ont été sélectionnés pour un montant d’environ 13 millions de dollars. Ainsi, le Projet de renforcement des capacités d’adaptation de la production agricole face aux menaces des changements climatiques et de la sécurité alimentaire en RDC (PANA-SA) a bénéficié de 3 millions de dollars. Le Projet de renforcement de la résilience et de la capacité d’adaptation des femmes et des enfants au changement climatique (PANA-AFE), quant à lui, a reçu 4 725 000 dollars, et le Projet de renforcement de la résilience des communautés de Muanda à l’érosion côtière (PANA-Zone côtière) a obtenu 5 355 000 dollars.
Par ailleurs, la RDC a engagé une campagne de mobilisation des financements à long terme pour l’accès aux financements du Fonds vert climat pour 800 millions de dollars. La Banque mondiale a inscrit en 2016 la RDC dans son portefeuille des Fonds carbone (FCPF) pour son programme de réduction des émissions de Maï-Ndombe. La RDC devra recevoir quelque 90 millions de dollars. Mais le décaissement n’est pas de sitôt. De même, la RDC devait déjà bénéficier de la cagnotte de 200 millions de dollars dans le cadre de l’Initiative des forêts d’Afrique centrale (CAFI) en mode urgence.
En février, la CAFI n’a versé que 10 millions de dollars, à travers le Système national de surveillance des forêts (SNSF) pour lutter contre le changement climatique, a indiqué le porte-parole de la MONUSCO, Félix-Prosper Basse, lors du point de presse hebdomadaire de cet organisme onusien à Kinshasa.
Appui technique de la FAO
D’après lui, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) va apporter son appui technique pour la mise en œuvre du SNSF, conçu grâce au financement du Fonds national REDD (FONAREDD). « Cet appui permettra de produire des données fiables et de qualité sur les forêts afin de lutter efficacement contre le changement climatique causé par la déforestation et la dégradation des forêts », a déclaré Basse. Le SNSF devra faire le monitoring de l’évolution de la couverture forestière en RDC, ainsi que de la déforestation afin de produire des informations essentielles et permettre à la RDC de répondre aux « exigences des conventions internationales », telle que la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).
En outre, ces informations sont cruciales pour la mise en œuvre du mécanisme de réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+) qui nécessite des évaluations fiables des stocks de carbone forestier et des changements des stocks de carbone. La CAFI a également contribué au financement du FONAREDD, à hauteur de 200 millions de dollars, pour lutter aux côtés d’autres partenaires contre les pratiques non durables, telle que l’exploitation forestière illégale. La CAFI regroupe six pays partenaires d’Afrique centrale, à savoir le Cameroun, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République Centrafricaine, la République du Congo et la RDC.
La RDC abrite plus de 60 % des forêts denses du bassin du Congo, avec une biodiversité très riche. Le pays possède ainsi la deuxième forêt tropicale primaire de la planète, avec 86 millions d’hectares, dont près de 60 potentiellement exploitables. Plusieurs ONG de défense de l’environnement s’inquiètent de l’accélération du rythme de la déforestation en RDC depuis quelques années, due essentiellement aux coupes artisanales (exploitation illégale de charbon de bois, agriculture sur brûlis) alors que les recettes de l’État sont insignifiantes.