LES finances publiques affichent un déficit de 114 milliards de nos francs, soit plus de 66 millions de dollars, au 31 janvier, selon que le renseigne la fiche synthétique des finances publiques du ministère de Finances. Les dépenses engagées se sont situées à 556 milliards de nos francs tandis que les recettes n’ont été que de 432 milliards. Ce qui dégage un solde négatif de 96,5 milliards sur un déficit programmé de 17,8 milliards. Il faut en déduire que le niveau des engagements financiers contraignants de l’État a augmenté et a dépassé largement le niveau des recettes mobilisées. D’où, le déficit structurel permanent que le ministère des Finances s’emploie à réduire.
D’après la fiche synthétique du ministère des Finances publiques, la proportion des dépenses contraignantes dans les dépenses totales est passée de 78 % en janvier 2019 à 92 % en janvier 2020, soit une hausse de 14 %. Mais en considérant ces dépenses, à partir de 2018, il s’observe une hausse de 32 %. Les dépenses contraignantes de l’État de plus de 72 % concernent les salaires. Avec la gratuité de l’enseignement de base, le Trésor public a pris en charge en janvier dernier la paie de nouveaux enseignants, en plus de ceux qui étaient mécanisés en octobre 2019. Plus de 36 % portent sur le fonctionnement des institutions ; plus de 4 % sur les rétrocessions aux régies ; et 65 % du taux d’accroissement de paiement de service de la dette intérieure comparé à 2018. Le paiement s’élève à 21 millions de dollars, contre une prévision de 27 millions en 2019, soit un taux de réalisation de 80 %. En 2019, la hauteur de prise en charge par le gouvernement a été donc trois fois plus élevée que le niveau de 2018.
Une restriction budgétaire s’impose : en tenant compte de l’exiguïté des ressources face à des engagements financiers accrus, l’exécution du budget se fait selon les ressources disponibles et la survenance des recettes. Afin de préserver la stabilité du cadre macro-économique, les paiements de l’État se font sur base caisse. En clair, ce sont les recettes courantes, les appuis budgétaires et les revenus du Bons du Trésor qui vont déterminer les dépenses à effectuer.
D’après un sondage du centre de recherches Alter, 54 % des Congolais interrogés se disent intéressés par la situation de l’État, et les finances publiques sont le premier sujet économique sur lequel ils souhaiteraient être informés (34 % le citent), devant l’emploi. Plus de la moitié des Congolais interrogés (53 %) se préoccupent de l’inflation. Ils craignent que l’inflation n’augmente encore au cours de l’année. Plus de la moitié des Congolais (67 %) considèrent que la technologie (le digital) va créer autant d’emplois qu’elle va en détruire. Près d’un tiers (36 %) se montre plus pessimiste, estimant qu’elle va plutôt en détruire. Les changements technologiques ou numériques vont exiger l’accompagnement ou la formation pour s’y adapter…
Ils voient la vie en rouge
Face aux défis économiques, les Congolais se montrent plutôt circonspects sur les réformes envisagées. Ils voient en revanche comme prioritaire la lutte contre la corruption, la lutte contre la fraude douanière et fiscale, etc. Dans un contexte marqué par un débat de plus en plus important, les Congolais considèrent les inégalités sociales (le pouvoir d’achat) comme le principal défi économique (67 % le citent), devant, le chômage, la pauvreté (53 %) et la question environnementale (32 %).
Le centre de recherches Alter a fait le point sur la perception de l’évolution du pouvoir d’achat des Congolais, sur leur comportement face à la hausse des prix, et sur les nouveaux modes de consommation… Parmi les enseignements de cette infographie, une impression généralisée d’une hausse des prix, principalement dans les domaines de l’énergie, de l’alimentaire et des impôts, tandis que les salaires semblent stagner, voir même baisser pour certains. Il s’ensuit une incapacité d’épargner, et l’apparition de nouveaux comportements.
Le taux de chômage en RDC reste dramatiquement élevé. En réalité, c’est le travail précaire qui est encouragé, voire favorisé. Pourquoi ? Les entreprises préfèrent souvent utiliser les contrats temporaires, parce que cela leur donne de la flexibilité dans la gestion de leur personnel. Aujourd’hui, presque 90 % des créations d’emplois se font en mode temporaire.
Les contrats en mode temporaire sont de mauvais emplois, parce qu’ils ne génèrent pas assez de formation, créent de l’instabilité pour le salarié (avec, de manière concomitante, un accès limité au logement) et l’entreprise, et parce qu’ils provoquent du chômage.
De plus en plus, ces emplois sont « permittents » : quinze jours de travail, quinze jours de chômage. Ce n’est pas bon pour le salarié, mais ce n’est pas une bonne chose pour l’entreprise non plus, parce qu’elle se sépare souvent de gens qui donnent satisfaction.
Les réformes vont-elles donner des résultats ? Une réforme met souvent du temps pour produire des effets, ne serait-ce que parce que les agents économiques veulent s’assurer de sa pérennité. Ensuite, les réformes de l’exécutif actuel sont encore incomplètes. Enfin, il ne faut pas juger les réformes d’un seul point de vue, il faut prendre en compte beaucoup d’autres indicateurs.
Le bien commun commande d’augmenter constamment le niveau de vie. L’économie doit être au service du bien commun. Les Congolais veulent plus de croissance, de pouvoir d’achat. Une politique de développement économique ambitieuse est la seule à pouvoir générer les ressources budgétaires nécessaires pour répondre aux besoins récurrents de l’État.
Cela vaut surtout pour un pays, comme la RDC, qui tire principalement ses recettes budgétaires de l’exploitation de ses ressources naturelles, par nature non renouvelables.
Il est fort à craindre qu’à l’issue de leur exploitation, le pays n’aura pas pu et su capitaliser sur cet avantage unique pour financer la diversification de son économie et créer un modèle de développement durable, indépendant des richesses de son sous-sol.
Économie pauvre
L’économie de la RDC est aujourd’hui bien plus pauvre qu’elle ne l’était à l’indépendance. Depuis les années 1970, elle se trouve dans une spirale de la prédation, voire de la criminalisation. Aujourd’hui, le secteur informel représente plus de 80 % des activités économiques selon certains chiffres. La population œuvrant dans l’économie informelle avoisine les 80 % de la population en âge actif.
Bien que le volume de production de ce secteur a grandement augmenté, le secteur informel en RDC ne joue pas un rôle essentiel dans l’économie nationale, fournissant des revenus minimum à ses employés. Par conséquent, le secteur privé évolue, depuis environ trois décennies, dans un environnement particulièrement difficile. Les pillages de 1991 et 1993 ainsi que les guerres de 1996 et 1998 ainsi que les conflits armés ont conduit à la destruction de l’outil de production, au découragement des investisseurs étrangers et donc à la désindustrialisation du pays.
Du recul de l’investissement, il en résulte la perte d’emplois et la baisse des revenus, accentuant ainsi le chômage et la pauvreté dans le pays. Les petites et moyennes entreprises (PME) sont confrontées à un environnement politique et économique défavorable ainsi qu’à un cadre réglementaire inadapté et mal appliqué.
Cette situation les met dans un état d’essoufflement. La plupart des PME et PMI ont été créées dans le but d’exploiter les opportunités que présente un environnement protectionniste. Au stade actuel de la mondialisation, de libéralisation et la diversification de l’économie et d’intégration régionale, les PME et PMI souffrent d’un manque de compétitivité face aux produits extérieurs à cause des difficultés d’approvisionnement et de l’étroitesse du marché national et local.