FAIRE en sorte pour recréer un marché interne, rouvrir les campagnes, remettre les villes en relation les unes avec les autres, tel doit être l’objectif d’un plan national pour la mobilité. Tout cela peut très bien aller de pair avec la volonté de promouvoir la croissance économique de la République démocratique du Congo à l’échelle continentale, voire mondiale.
Sans infrastructures de transport performante, il n’y aura pas de développement économique significatif dans le pays. Et sans développement, pas de paix durable. Tout est donc intimement lié. Des transports qui remplissent leur fonction à tous les niveaux constituent indéniablement l’amorce du processus de développement et de pacification.
Par contre, le sous-équipement et la faiblesse des infrastructures de transport constituent un obstacle majeur à l’essor économique de la RDC à tous les niveaux. La faiblesse des échanges commerciaux, intérieurs comme extérieurs, en est la preuve. Les premiers se sont contractés sous l’effet de « l’archipelisation » du territoire, qui a atomisé le marché intérieur. La pauvreté s’est propagée du fait de la rupture entre les villes et les campagnes.
Quant aux échanges avec l’étranger (flux transfrontaliers et exportations), ils ne sont guère de nature à rendre vigueur au commerce extérieur du pays.
Avis d’expert : pour être efficace, la stratégie de la mobilité en RDC doit s’envisager dans la complémentarité des divers modes de transports (route, fleuve, rail, ciel). Les choix exclusifs, qui privilégient un mode sur un autre ne répondront que partiellement aux attentes des populations.
Programme d’urgence
Le réseau routier de la RDC compte 152 400 km dont quelque 3 000 sont asphaltés et gérés par trois organismes publics : l’Office des Routes (OR) qui a la responsabilité des 58 000 km de routes nationales et régionales reliant les provinces et desservant les grands centres urbains ; l’Office des Voiries et Drainage (OVD), qui a en charge les 7 400 km de routes urbaines ; et la Direction des Voies de Desserte Agricole (DVDA) qui a sous son contrôle 87 000 km de routes de desserte agricole et autres pistes rurales.
Des bailleurs de fonds internationaux (Banque mondiale, Union européenne, Banque africaine de développement, Coopérations belge, allemande, britannique, japonaise, chinoise, Fonds Koweitien, etc.), financent des projets de relance prioritaire en concertation avec le ministère des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction, les organismes responsables des infrastructures routières et le ministère des Transports et des Voies de communication.
La première étape de ce vaste programme d’urgence vise la construction d’un réseau qui relierait toutes les provinces du pays entre elles et en même temps à Kinshasa, la capitale. Les grands axes de ce programme consistent à mettre en relation les chefs-lieux de provinces et les principaux centres : Matadi-Kinshasa, Kinshasa-Bandundu-Mbandaka, Kinshasa-Kikwit-Tshikapa-Kananga-Mbuji-Mayi-Lubumbashi, Mbuji-Mayi-Bukavu, Bukavu-Goma-Beni, Beni-Bunia-Kisangani, Bukavu-Kisangani, Kisangani-Buta-Lisala-Gemena.
Ensuite, il est question d’étoffer ce premier maillage de routes prioritaires, avec des routes de desserte agricole permettant d’accéder aux milieux ruraux. La réhabilitation des voies de desserte est d’une importance capitale pour la lutte contre la pauvreté. Ces voies agricoles, qui sont autant de pistes intérieures, relient entre eux les villages, les marchés, les postes de santé ou encore les écoles. Comme l’a souligné Joseph Kabila Kabange, le président de la République, dans son discours sur l’état de la Nation, le 19 juillet, le gouvernement est engagé dans un partenariat avec les bailleurs de fonds internationaux afin de restaurer la mobilité et la fonctionnalité du réseau routier.
Le projet Pro-Route
Pro Routes est un projet important du gouvernement financé par la Banque mondiale et d’autres bailleurs. Il vise à rouvrir et entretenir quelque 3 000 km de routes en terre sur les 15 800 du réseau ultra-prioritaire du pays. Ces routes sont restées impraticables durant des décennies. En les réhabilitant durablement, elles contribuent à la relance socio-économique et à la réintégration du pays. Grâce aux travaux déjà réalisés, la population a retrouvé le rythme normal de vie et est encouragée à développer des activités socio-économiques : agriculture, commerce, santé, éducation… Partout où il passe, Pro Routes développe des programmes de gestion environnementale (lutte contre le braconnage et la déforestation) et sociale.
Grâce à Pro Routes, certains axes comme Kisangani-Buta-Dunia-Aketi et Kalemie-Fizi-Uvira sont complètement réfectionnés. On peut se rendre de Kalemie à Bendera en moto ou en minibus pour environ 3 heures, contre 5 jours auparavant. Les coûts ont également considérablement baissé, passant de 50 dollars à environ 10 dollars sur l’axe Kalemie-Uvira. Avant, on mettait 15 jours sur l’axe Kisangani-Buta, aujourd’hui, en un jour, voire quelques heures, le trajet est accompli.
Les performances sur les routes déjà réhabilitées ont donné un coup de fouet à l’économie, en favorisant l’essor de nouvelles activités avec l’ouverture de boutiques et de petits marchés dans les villages, bien achalandés en produits manufacturés. Grâce à la réouverture de routes désormais bien entretenues, les agriculteurs ont repris le chemin des champs avec la certitude de pouvoir écouler leurs produits.
Pro Routes est chargé du rétablissement durable d’un accès entre les chefs-lieux de provinces, les districts et les territoires dans trois ex-provinces : Province orientale, Sud-Kivu et Katanga démembrées. Pro-Routes devrait également aider l’État à se doter d’une industrie de construction routière.
Au Projet de transport multimodal (PTM), on explique que les infrastructures sont importantes parce que support de tout essor économique et complémentaires aux secteurs productifs. Elles constituent donc des préalables et des opportunités dans l’appréciation du climat des affaires par les investisseurs.
Le FONER pour l’avenir
Depuis 2001, les partenaires extérieurs de la RDC investissent dans le vaste chantier de réhabilitation des infrastructures de transport du pays. Mais à l’avenir, insistent-ils, il est important que ces efforts soient, doivent être pérennisés à l’aide d’un mécanisme de financement durable et indépendant des contraintes budgétaires du gouvernement. C’est dans cette perspective que le Fonds national d’entretien routier (FONER) a été créé au terme d’une loi. C’est une structure indépendante dotée de fonds destinés à couvrir les dépenses d’entretien des réseaux routiers (routes d’intérêt général, dessertes agricoles, voiries urbaines), fluvial et lacustre. L’ambition était d’assurer la maintenance de 15 000 km de routes en 2015.
La tâche du FONER consiste à entretenir en permanence les voies de communication, les bacs et les ponts ; à gérer et protéger le patrimoine routier ; à mener des campagnes de sensibilisation de la population, inspecter le réseau, contrôler les travaux déjà réalisés. Pour cela, le FONER peut compter sur des recettes alimentées essentiellement (90 %) par la redevance sur les produits pétroliers et les lubrifiants. D’autres redevances liées à l’usage de la route (droits de péage, taxe de circulation, etc.) servent d’appoint. Pour l’année 2008, les rentrées attendues étaient évaluées à quelque 47 millions de dollars. Aujourd’hui, selon des sources syndicales, ces recettes tournent autour de 13 millions de dollars.