INTENSIFIER l’action. C’est ce prône l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans sa revue forestière internationale. L’initiative ne se limite pas qu’aux arbres, elle présente des avantages sociaux et économiques tels que l’amélioration du bien-être et des moyens d’existence des populations, a déclaré Mette Wilkie, la directrice du Département des forêts de la FAO. « Elle contribue à la réalisation de nombreux Objectifs de développement durable, notamment l’atténuation du changement climatique et la conservation de la biodiversité », a-t-elle ajouté.
La nouvelle édition de la revue forestière internationale de la FAO, Unasylva, intitulée « Restaurer la terre – la prochaine décennie », souligne que des progrès considérables ont été accomplis en matière de restauration des forêts et des paysages au cours des dix dernières années. À ce jour, 63 pays et autres entités se sont engagés à restaurer 173 millions d’hectares – soit une superficie égale à la moitié de celle de l’Inde – et les réponses régionales telles que l’Initiative de restauration des paysages forestiers africains (AFR100) et l’Initiative 20×20 en Amérique latine font des progrès significatifs.
Le défi de Bonn
Toutefois, la revue avertit qu’il reste encore beaucoup à faire à l’échelle nationale, régionale et mondiale pour respecter les engagements pris dans le cadre du défi de Bonn, qui vise à restaurer 350 millions d’hectares de terres dégradées et déboisées d’ici 2030, et d’autres engagements internationaux. Lancée lors de la conférence numérique sur la biodiversité du Forum mondial des paysages : Un monde – une santé, la dernière édition d’Unasylva présente une série de nouvelles initiatives et de programmes de restauration qui augmentent les financements, renforcent les capacités des acteurs locaux et améliorent l’assistance technique pour la restauration des forêts et des paysages.
La publication présente également des approches techniques, telles que la régénération naturelle assistée (ANR), pour accroître l’adoption de la restauration des forêts et des paysages, et souligne les facteurs qui sous-tendent sa mise en œuvre. Parmi les histoires positives mises en avant, on peut citer la réussite de la Chine à inverser des siècles de dégradation et de perte des forêts grâce à son leadership politique, à l’implication de plusieurs parties prenantes et à une approche de gestion adaptative.
Unasylva présente également le mouvement de conservation communautaire du Nord du Kenya, qui montre que la restauration des terres est plus efficace lorsque la paix, la gouvernance, l’entreprise et la conservation de la faune sont également prises en compte. Des études de cas au Brésil, au Cambodge, à Madagascar et à Sao Tomé-et-Principe illustrent, quant à elles, l’éventail de possibilités de mécanismes de coordination institutionnelle en matière de restauration des forêts et des paysages. Les exemples du Niger et du Burkina-Faso montrent l’importance de la responsabilisation des autorités locales et des communautés pour la planification et le financement de la restauration et de la gestion durable des terres.
La publication décrit également les actions nécessaires pour concrétiser l’élan offert par la prochaine décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes (2021-2030) afin d’intensifier la restauration des forêts sur des centaines de millions d’hectares. Ces mesures comprennent l’élaboration d’analyses de rentabilité détaillées pour les gouvernements et les investisseurs du secteur privé, de nouvelles politiques et législations pour soutenir les investissements dans la restauration, et des protocoles de restauration adaptés à des paysages spécifiques.
Un suivi efficace à l’échelle mondiale, du paysage et du projet est également essentiel pour maintenir la restauration sur la bonne voie. « Les sociétés du monde entier devront être convaincues de l’impératif de restauration mondiale par un argument économique rationnel, la compassion pour les générations actuelles et futures, et un lien émotionnel avec la nature », selon les auteurs d’un article de la revue.
La Décennie d’action
Cette année, la session du Comité des forêts s’est tenue du 5 au 9 octobre à distance et a eu pour thème « Les forêts et la Décennie d’action pour les ODD : des solutions en faveur de l’adaptation au changement climatique, de la biodiversité et des populations ». Selon la directrice générale de la FAO, la pandémie de coronavirus a montré que les forêts pouvaient servir de filet de sécurité – en particulier aux personnes pauvres et vulnérables – en période de crise, en offrant de nombreuses possibilités de « reconstruire en mieux ».
Étant donné que la déforestation et la dégradation des forêts se poursuivent à un rythme alarmant, en grande partie à cause de l’expansion agricole, il faudra trouver des moyens d’accroître la production agricole et d’améliorer la sécurité alimentaire sans réduire la superficie forestière. Il faudra aussi modifier notre état d’esprit en profondeur et repenser nos modèles d’activité. L’arrêt de la déforestation et le renforcement du reboisement doivent être un élément fondamental de la transformation durable des systèmes alimentaires, préconise la FAO.
Qui exhorte à redoubler d’efforts pour exploiter pleinement le potentiel des forêts et de la diversité alimentaire et à accroître les investissements dans le secteur des forêts durables. En effet, ces actions sont cruciales pour la réalisation des objectifs mondiaux tels que l’élimination de la faim et de la pauvreté, l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, ainsi que la conservation de la biodiversité. La FAO a lancé l’Initiative villes vertes dont l’objectif est de transformer les systèmes agroalimentaires, d’éliminer la faim et d’améliorer la nutrition en zone urbaine. Les villes sont essentielles pour « reconstruire en mieux » car elles disposent « des capacités, des technologies, des investissements, des informations et du pouvoir d’achat ». Elles peuvent être à la fois le promoteur et le moteur de la transformation. Le Covid-19 a appris à renforcer les capacités d’intervention en cas d’urgence. Un rétablissement respectueux de l’environnement après la pandémie devrait passer par la promotion des forêts saines et restaurées à l’issue de la transition préconisée par la Convention sur la diversité biologique, en mettant la priorité sur la préservation des écosystèmes intacts, la restauration des écosystèmes dégradés et le ralentissement de la dégradation.
Toutefois, pour que cette transition s’opère, nous devons transformer nos systèmes alimentaires, qui sont la principale cause de la déforestation et de l’appauvrissement de la biodiversité. Virginijus Sinkevičius, le commissaire européen à l’environnement, aux océans et à la pêche, déclare que « les forêts et les arbres contribuent aux quatre piliers de la sécurité alimentaire que sont la disponibilité, l’accès, l’utilisation et la stabilité ». Si on ne parvient pas à concrétiser l’ODD 15, en particulier à gérer les forêts de manière durable, à endiguer l’appauvrissement de la biodiversité et à inverser la tendance dans ce domaine, nous n’arriverons pas non plus à libérer le monde de la faim ni, plus largement, à réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030.