Ces enjeux sur la dimension technique de l’entreprise ne doivent pas faire oublier les particularités propres au contexte national. L’environnement socioculturel a de fait une influence considérable sur la vie de l’entreprise. Il existe une grande perméabilité de l’entreprise à son environnement culturel et social. Cette perméabilité peut déboucher sur une difficile compatibilité entre ces facteurs et la rationalité capitaliste traduite dans le management des entreprises. L’esprit communautaire qui régit les relations familiales entre en conflit avec l’individualisme et la recherche du profit sur lesquels se fondent les principes de l’économie capitaliste. L’entrepreneur est bien souvent pris dans l’étau du « tributariat », sorte d’impôt de reconnaissance sociale, constitué de l’ensemble de transferts contraignants et de tout ordre en direction du groupe familial ou plus largement lignager. Les liens de parenté pèsent partout et obligent notamment à gérer les ressources humaines selon d’autres modèles que ceux que les entreprises des pays industriellement développés appliquent.
Cela renvoie d’ailleurs à un obstacle lié au fondement même de l’entreprise, dont le modèle de gestion est un modèle importé. L’enchevêtrement des rapports salariaux et des solidarités lignagères est une constante. La famille est l’élément de base des rapports de production. Une partie du fonctionnement interne des entreprises ne prend sens qu’une fois rapporté aux liens que les agents (promoteur, cadre, salarié) se reconnaissent avec l’espace rural ou urbain dont ils sont issus, autant qu’avec l’éthique et les représentations des collectifs auxquels ils appartiennent. L’entrepreneur est également l’otage d’une minorité de dignitaires détenteurs des leviers du pouvoir (ministres, députés, généraux…) et contrôlant la société pour veiller jalousement à la perpétuation de leurs privilèges. Les deux contraintes majeures à un management rationnel de l’entreprise proviennent donc de l’environnement familial au sens large et du clientélisme issu des relations avec le pouvoir politique. Cet ensemble enferme l’entrepreneur dans une gangue communautaire forte dont il est bien souvent impossible de s’extraire. Mais une vision plus positive amène également à constater que bien comprise et bien employée, le contexte local peut être un atout pour l’entreprise capitaliste. Le manager doit alors s’appuyer sur la mentalité communautaire et la solidarité pour créer un esprit de groupe.