Le COMESA veut dynamiser le commerce intra-régional

Il s’est tenu au Kenya un forum régional sur l’agriculture. Les assises des deux jours (17-18 mai) ont réuni plusieurs acteurs du secteur autour des problèmes liés à la résilience et à la croissance dans le secteur agro-industriel.

Le forum de Nairobi avait pour but d’attirer l’attention des États membres du Marché commun d’Afrique orientale et australe (COMESA) sur la nécessité d’accroître la production agricole nationale afin de dynamiser le commerce intra-régional. À l’ouverture du forum du Second Dialogue Agro-Industrial, la ministre kényane des Affaires étrangères, Amina Mohamed, a déclaré que la facture totale des importations de nourriture dans la zone COMESA s’élevait à 29 milliards de dollars en 2016. « Cela montre que nous pouvons accroître le commerce intra-régional si nous commençons à vendre des produits agricoles grâce à une meilleure production », a souligné Amina Mohamed.

Le commerce extérieur total de la zone COMESA pèse quelque 235 milliards de dollars, tandis que le commerce intra-régional ne représente qu’environ 7 %. Bien que le COMESA soit composé des 19 membres, les ressources dans le secteur agricole, l’industrie agro-alimentaire sont en dessous des capacités car la zone demeure un importateur net de nourriture. Au Kenya, il a été donc question de se pencher sur la question et de trouver des solutions sur la meilleure manière de sortir de l’agriculture de subsistance pour entrer dans l’agriculture commerciale afin d’accroître la production. « La question fondamentale est de savoir si nous pouvons mettre en place des politiques et des stratégies qui transforment et renforcent la participation des petites et moyennes entreprises  (PME) dans les chaînes d’approvisionnement agricoles afin d’éliminer le déficit commercial agricole », a insisté la ministre kenyane des Affaires étrangères, hôte du forum.

Réduire les importations 

La République démocratique du Congo est membre du COMESA. Elle affiche l’ambition de réduire ses importations en nourriture. Plus de 80 % des céréales consommés en RDC viennent de l’étranger… Les importations en nourriture coûtent chaque année 1.5 milliard de dollars. Les pouvoirs publics cherchent à se rapprocher d’un objectif : l’autosuffisance alimentaire. Mais comment y parvenir ? C’est la où réside le hic. À quelque chose, malheur est bon, dit un adage français. La crise financière internationale consécutive à la chute des cours mondiaux des matières premières a fait que le gouvernement décide de reprendre sa politique agricole.

Celle-ci a deux volets principaux : le soutien aux petits exploitants et les partenariats public-privé. Pour atteindre l’objectif de l’autosuffisance alimentaire, le gouvernement s’est doté des stratégies d’intensification de la production vivrière par la mécanisation agricole, l’amélioration des infrastructures (notamment routières), la mise à disposition des intrants agricoles aux agriculteurs… Bref, il s’agit de redynamiser l’agriculture à la base, par la mobilisation et l’encadrement des paysans (1 ha pour un ménage), de manière à intensifier la production du maïs, du riz, du manioc, des haricots, de la pomme de terre, de la patate douce, de l’arachide, de la banane… En ce qui concerne la mécanisation agricole, le gouvernement avait commencé de distribuer des engins (de 750 à 1000 tracteurs/an avec accessoires et pièces de rechange), de manière à exploiter 100 ha en moyenne par tracteur/campagne, et de relancer quelque 1 790 exploitations agroindustrielles existantes et/ou abandonnées. Mais ce programme s’est arrêté.

Outre l’appui aux petits exploitants, la politique de relance de la production agricole vise, à travers la formule partenariat public-privé, la mécanisation des grands blocs de champs (cultures industrielles : café, huile de palme, hévéa, coton, sucre, thé, cacao…) avec l’implication des privés et l’appui budgétaire gouvernemental. À cet effet, le complexe agro-industriel de Bukanga Lonzo est un exemple parfait de ce partenariat. Financé par l’État, le complexe est géré par une entreprise sud-africaine, Africom Commodities, qui s’est engagée à employer et à transmettre son savoir-faire à plusieurs centaines de travailleurs congolais.

Pour l’heure, ils produisent, transforment, conditionnent et distribuent localement 1000 tonnes de maïs par mois. Le maïs de Bukanga Lonzo est vendu un peu moins cher que la moyenne, (entre 12 000 et 15 000 francs). Doté de sa propre centrale électrique, le parc compte aussi accueillir des éleveurs – de porcs, de poulets -, de nouvelles usines de transformation des produits et un réservoir d’eau. Il faut dire que l’espace ne manque pas : le parc de Bukanga Lonzo s’étend sur 75 000 hectares.

Cette politique est en phase avec les recommandations des institutions financières internationales. Selon la BAD, par exemple, le développement marchand de l’agriculture en Afrique pourrait représenter un investissement très important, pourvu que les agriculteurs africains accèdent à des fonds supplémentaires, à l’électricité, à une meilleure technologie et avec le soutien des gouvernements. En décembre 2016, la Conférence économique africaine s’est tenu à Abuja (Nigeria) sur le thème : « Nourrir l’Afrique : vers une agro-industrialisation pour une croissance inclusive ». On y a parlé de l’élimination de la pauvreté, de la lutte contre la faim et de l’insécurité alimentaire… qui correspondent aux deux premiers Objectifs de développement durable (ODD) que les Nations unies ont adopté en septembre 2015.

La Commission économique pour l’Afrique (CEA) a lancé à cette occasion un appel à une nouvelle politique pour soutenir l’agro-industrialisation de l’Afrique. Les experts de cette institution sont d’avis que l’Afrique peut apporter beaucoup à l’industrialisation des produits de base et à l’agro-alliance avec de nouvelles approches politiques. Ce qui permettra de réduire la facture des importations, surtout de produits alimentaires. La CEA milite pour la planification, en faisant valoir que le rôle essentiel de l’État dans la transformation structurelle de l’Afrique.