Le diplôme n’est plus la clé qui ouvre la porte du travail

D’année en année, de nouveaux diplômés du supérieur viennent grossir les rangs des demandeurs d’emploi, rejoignant les plus touchés, ceux qui ont quitté l’école trop tôt et les désabusés de l’enseignement supérieur. Selon des évaluations, plus de 400 000 jeunes arrivent sur le marché du travail en RDC. Que faire pour qu’ils puissent trouver un job ?

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Un diplôme n’est pas synonyme d’un travail. Cette boutade lancée à la figure d’un jeune diplômé à la recherche d’un boulot par le responsable des ressources humaines dans une société de la place, est révélatrice de la situation en République démocratique du Congo. Les jeunes y sont les premières victimes du chômage. De plus en plus de jeunes poursuivent des études, et le nombre de nouveaux diplômés ne cesse d’augmenter, venant grossir les rangs de plus de 80 % de demandeurs d’emploi diplômés du supérieur. En outre, quand ces derniers trouvent du travail, il s’agit souvent de postes subalternes, mal rémunérés…

Les idées reçues

Ce constat se vérifie d’ailleurs dans la plupart des pays, où la quête d’une meilleure adéquation entre l’offre de formation et les besoins du marché du travail est au cœur des préoccupations. Des questions majeures se posent donc sur la formation, le chômage et l’emploi. À cet égard, le diagnostic de l’éducation, la formation et l’emploi permettrait de mieux identifier les caractéristiques, les faiblesses et les besoins du secteur. Certes, l’éducation est la voie royale qui mène à l’emploi, et les Congolais, comme beaucoup d’autres africains, continuent à croire qu’un diplôme universitaire garantit l’accès au travail. À la préoccupation relative à l’emploi des diplômés s’ajoute la volonté pressante de l’opinion publique pour que la priorité soit aussi donnée à la politique éducative. La corrélation diplôme-travail fut réel dans les années 1960-1970, puis les chemins respectifs du système éducatif et du marché de l’emploi ont commencé à se séparer. Cette évolution n’a fort heureusement pas remis en question la place primordiale donnée à l’éducation.

Cependant, les aspirations des Congolais se déplaçant vers des impératifs d’emploi, les missions du système éducatif ont été redéfinies avec, pour finalité, le métier davantage que le savoir. La problématique des débouchés se pose très tôt en amont et plus seulement en fin de cursus. Ainsi des spécialistes recommandent à l’État de mettre l’accent sur les formations professionnelles, sur le rapprochement du monde académique de celui de l’entreprise et du marché du travail. Si les jeunes déscolarisés (ayant quitté l’école entre 12 et 16 ans) restent les plus touchés par le chômage, les diplômés de l’enseignement supérieur les talonnent désormais dans cette galère. La plupart d’entre eux sont sans emploi, dont une partie issue des filières du tertiaire (économie, finance, droit…) avec un taux de chômage record de 87 %. Quant aux diplômés des filières courtes, pourtant réputées avoir une plus forte employabilité, ils sont les plus exposés.

Des comparaisons internationales révèlent la faiblesse dans la maîtrise des langues française et anglaise, qui décourage les entreprises à les recruter comme cadres supérieurs ; ainsi que le manque d’adéquation entre les connaissances acquises et les compétences requises par le monde économique. Très bien notée quant à l’alphabétisation, à l’accès à l’éducation, la RDC arrive en revanche loin derrière les pays à niveau de développement similaire sur les critères de qualité, efficacité et adéquation des formations avec le marché du travail. Les mêmes experts pointent aussi la peur du risque et le déficit d’esprit d’entreprise qui règne dans le milieu académique. Ils déplorent le manque de passerelle entre l’université et l’entreprise, concluant que le problème n’est pas d’avoir trop de diplômés – car le pays en a besoin – ; il est d’avoir pléthore de diplômés sans débouchés. Car malgré leur cursus, ils ne sont pas « prêts à l’emploi »…

Afin de combler cet écueil, d’aucuns préconisent la formation d’experts qualifiés pour que les étudiants acquièrent une expertise professionnelle qui soit validée par des certificats reconnus mondialement. Ils recommandent aussi la création de passerelles entre l’université et les professionnels des différents secteurs économiques, afin d’apprendre aux diplômés la réalité des métiers auxquels ils aspirent. Une pédagogie plus opérationnelle devrait être intégrée dans les cursus, et des formations construites conjointement par les universitaires et les professionnels devraient améliorer l’employabilité des diplômés et assurer une meilleure adéquation entre l’offre de formation et les besoins du marché du travail. Chaque province devrait par ailleurs élaborer un schéma provincial de développement des ressources humaines, piloté par les acteurs économiques du territoire…