L’Agence nationale de renseignement (ANR) a, enfin, neutralisé, le présumé kidnappeur en chef du Nord-Kivu. Il s’agit d’un certain Abou Mugisha, la trentaine révolue, d’un tempérament plutôt mélancolique mêlée à une certaine timidité. « Un vrai léopard », s’accordent à dire des criminologues à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Activement recherché par les services, Abou Mugisha et sa bande de kidnappeurs se sont retranchés de longues semaines durant dans la chefferie de Bambo, dans le territoire de Rutshuru. Mais l’homme qui s’est embourgeoisé en clin d’œil dans son business peu recommandable, a sans doute voulu se refaire une seconde vie… d’honnête citoyen.
Pisté grâce à son mobile
Fin décembre 2016, il débarque à Goma pour se lancer dans l’immobilier. Selon des sources, Abou Mugisha achète même une maison. Le voilà qui veut rouler carrosse. Le kidnappeur le plus redouté du Nord-Kivu se fait prendre par les services lors d’une transaction d’achat d’un véhicule de luxe. Il a en effet remis les services sur sa piste en utilisant le même numéro de mobile avec lequel il opère. Probablement mis sur écoute, Abou Mugisha sera appréhendé et cuisiné. Le kidnappeur, selon la mairie de Goma, aurait avoué détenir dix armes à feu qu’il a cachées dans un sous-bois au sortir de la ville de Goma et être à l’origine de nombre de cas de rapt dans le chef-lieu du Nord-Kivu et dans d’autres agglomérations de la région (Beni, Butembo…).
Parmi ses victimes, une femme commerçante bien connue à Goma répondant au nom de Maman Patrick. Abou l’a libérée après que sa famille lui a payé une rançon de 6 000 dollars. Autre victime, ce transporteur routier, Muhire, kidnappé à bord de son poids-lourds, entre les bourgades de Mabenga et Kazaroho, avait recouvré la liberté à la veille de la Saint-Sylvestre, après que ses kidnappeurs, en fait la bande à Abou Mugisha, eurent perçu 4 000 dollars. Comme si cela ne suffisait, le kidnappeur en chef a voulu se servir de sa victime comme un hameçon en vue d’attirer d’autres gros transporteurs dans son filet. Craignant pour sa vie, le chauffeur Muhire a entrepris d’appeler ses collègues avec le téléphone du kidnappeur. Il tomba sur Kakule à qui il sollicite une aide de 5 000 dollars. Mais Kakule ne s’est pas présenté au lieu du rendez-vous. Finalement libéré par son ravisseur, le camionneur Muhiri est allé raconter son infortune auprès des agents de renseignement auxquels il a communiqué le numéro téléphonique de son kidnappeur Abou Mugisha. Ce qui permettra son arrestation.
Cependant, d’autres réseaux de kidnappeurs sévissent encore dans la région. Les ravisseurs d’un agent de la Direction générale de migration (DGM) exigeraient la somme de 1 000 dollars pour sa libération, selon les autorités du Sud-Kivu. Longa Mude a, en effet, été kidnappé, fin décembre 2016, par des personnes non autrement identifiées dans la localité de Nyagoma dans la cité de Sange, territoire d’Uvira. Selon la DGM locale, les ravisseurs utiliseraient l’un des réseaux de communication du Burundi. La DGM n’a pas encore pu établir les raisons de son enlèvement. Le rapt du directeur financier de l’Université de Bunia (UNIBU) en Ituri, Robert Metukazi, fin janvier, dans le quartier de Bankoro par des hommes armés, semble être lié au conflit qui a opposé les membres de l’ancien comité de gestion aux professeurs de cette université sur une affaire de 138 millions de francs détournés, selon son avocat Nagi Godi. Quant aux trois jeunes filles d’une même famille enlevées à Kamanyola, elles ont été retrouvées dans une maison de tolérance dans la banlieue de Bukavu, début février. On rapporte aussi dans le chef-lieu du Sud-Kivu que la petite amie, sinon la fille, d’un acteur politique majeur de la province aurait été enlevée puis libérée après paiement d’une rançon de 15 000 dollars. Aux dernières nouvelles, il fait état d’un enlèvement de deux journalistes dans la région.