PLUS DE 1,2 million de personnes dans le monde ont perdu la vie à la suite des catastrophes naturelles dans le monde au cours de ces vingt dernières années. Le coût des dégâts est évalué à plus de 3 000 milliards de dollars. La Chine et les États-Unis sont les pays qui ont signalé le plus grand nombre de catastrophes. La Chine a connu une variété de plus de 500 catastrophes, y compris des événements géophysiques, hydrologiques et météorologiques. Par rapport à la Chine, les États-Unis connaissent moins d’événements géophysiques et hydrologiques, mais plus d’événements météorologiques et climatologiques, tels que les tempêtes et les incendies de forêt. La Chine et les États-Unis sont suivis par l’Inde, les Philippines et l’Indonésie, pays qui ont des densités de population relativement élevées dans les zones à risque, selon le rapport publié le mardi 13 octobre le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe.
À l’occasion de la célébration de la Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe, cet organisme a publié un communiqué dans lequel Mami Mizutori, la représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU pour la réduction des risques de catastrophe, a été très tranchante : « La pandémie de Covid-19 n’est que la dernière preuve en date que les dirigeants politiques et économiques ne sont pas encore à l’écoute du monde qui les entoure. » Lors d’une conférence de presse, le lundi 12 octobre, au Palais des Nations à Genève, elle a souligné que le nouveau coronavirus a fait prendre conscience aux gouvernements et au public en général des risques qui nous entourent. « Ils peuvent voir que si la Covid-19 est aussi terrible, l’urgence climatique peut être encore pire », a-t-elle fait valoir.
Face à ce sombre tableau que peint le rapport, Mami Mizutori invite la communauté internationale à suivre les recommandations des scientifiques et à investir dans les programmes de prévention et d’adaptation au changement climatique. « La bonne gouvernance des risques de catastrophes dépend du leadership politique et de la réalisation des promesses faites lors de l’adoption de l’Accord de Paris et du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe il y a cinq ans », a-t-elle fait remarquer.
Pour sa part, Debarati Guha-Sapir, du Centre de recherche belge sur l’épidémiologie des catastrophes de l’Université de Louvain, note qu’il existe de nombreuses mesures pratiques qui peuvent être prises pour réduire le fardeau des pertes dues aux catastrophes alors que le monde devra « vivre avec les conséquences des niveaux actuels de changement climatique pendant longtemps encore ».
Très sombre avenir
Le rapport en question couvre les vingt premières années de ce siècle et n’inclut pas les risques épidémiologiques comme la pandémie de Covid-19. Mais il met clairement en évidence le niveau de souffrance humaine et de pertes économiques qui résultent de l’incapacité à s’adapter au changement climatique et à réduire les émissions de gaz à effet de serre », explique Debarati Guha-Sapir, auteure du rapport. Ne portant pas sur les risques épidémiologiques comme le coronavirus, ce rapport montre que la progression des catastrophes naturelles est surtout liée à l’augmentation des catastrophes climatiques, qui sont passées de 3 656 (1980-1999) à 6 681 (2000-2019), une forte hausse par rapport aux vingt dernières années.
« Nous sommes délibérément destructeurs. C’est la seule conclusion à laquelle on peut arriver lorsqu’on passe en revue les catastrophes survenues au cours des vingt dernières années », a indiqué Mami Mizutori. L’illustration de ces phénomènes météorologiques extrêmes, ce sont ces inondations qui ont doublé et les tempêtes, qui ont été les catastrophes les plus fréquentes au cours des deux dernières décennies. Le rapport fait état aussi d’une augmentation importante dans d’autres catégories de phénomènes, dont les sécheresses, les incendies de forêt et les températures extrêmes. Il y a eu également un accroissement des événements géophysiques, notamment les tremblements de terre et les tsunamis, qui ont tué plus de personnes que tous les autres risques naturels examinés dans le rapport.
Pour la décennie à venir, l’ONU redoute surtout les vagues de chaleur. « Si ce niveau de croissance des phénomènes météorologiques extrêmes se poursuit au cours des vingt prochaines années, l’avenir de l’humanité s’annonce très sombre », a averti la Professeure Guha-Sapir. Le nombre moyen de décès de 2000-2019 s’est élevé à environ 60 000 par an. Sur le plan économique, les coûts des catastrophes naturelles sont évalués à près de 3 000 milliards de dollars depuis 2000 mais le montant réel est plus élevé, en raison du problème de la collecte des données dans certaines régions, comme en Afrique où prévaut le secteur informel. En attendant, les pays développés comptabilisent la plupart des pertes économiques (67 %), avec un total de 1 990 milliards de dollars entre 2000 et 2019. En comparaison, les pays appartenant à d’autres catégories de revenus ont enregistré des pertes économiques totales nettement inférieures.
Par ailleurs, le nombre de personnes touchées par les catastrophes, y compris les blessures et la perturbation des moyens de subsistance, en particulier dans l’agriculture, et les dommages économiques qui y sont associés augmentent, contrairement à la diminution de la mortalité. Le nombre de morts est ainsi passé de 1,19 million sur la période 1980-1999 à 1,23 million sur la période 2000-2019, alors que le nombre de personnes touchées par ces catastrophes naturelles a bondi (passant de 3,25 milliards à 3,9 milliards). Les années 2004, 2008 et 2010 ont été les plus dévastatrices, avec plus de 200 000 morts à chacune de ces années. Le tsunami de 2004 dans l’océan Indien a été le plus meurtrier, faisant plus de 220.000 victimes.
Le deuxième événement le plus important a eu lieu en 2010, lorsqu’un tremblement de terre a causé la mort de plus de 200 000 personnes, et blessé plus de 300 000 autres à Haïti. En 2008, le cyclone Nargis a lui tué quelque 138 000 personnes au Myanmar. Depuis 2010, il n’y a pas eu de « méga-catastrophe » pouvant engendrer plus de 100 000 morts. Les pays en développement représentent 23 % du total des décès dus aux catastrophes, bien qu’ils comptent moins de 10 % de la population mondiale. « Davantage de vies sont sauvées mais davantage de personnes sont touchées par l’urgence climatique croissante. Le risque de catastrophe devient systémique », a souligné Mami Mizutori. S’agissant de la répartition géographique, l’Asie – où se trouvent huit des dix premiers pays enregistrant le plus grand nombre de catastrophes – est la région la plus touchée, suivie par le continent américain et l’Afrique.