Les chefs d’entreprise et l’avenir

Les élections sont un moment important dans la vie d’un peuple. C’est le moment de doutes, de populismes, de tentations, de bouleversements... Et le monde observe. Dans ce moment d’incertitude, il faut redonner confiance à tous et faire en sorte que le futur profite à chacun.

 

Dans quelques mois, les Congolais vont se rendre aux urnes pour élire leur futur président de la République et leurs députés. Quelques candidatures sont déjà déclarées, mais il faudra attendre la publication de la liste officielle des présidentiables par la Commission électorale nationale et indépendante (CENI). Il faudra surtout attendre la campagne électorale pour connaître les intentions et les programmes de gouvernement de chaque candidat.

Ailleurs, cependant, on assisterait déjà, en attendant la campagne électorale, à une sorte d’ « ententes secrètes » ou d’intelligence entre les candidats pressentis et les milieux d’affaires ou les organisations patronales et syndicales. Comme l’a dit Joris-Karl Huysmans, « la réalité ne pardonne pas qu’on la méprise ». Contrairement aux colons belges, les politiciens congolais ne comprennent pas ou méconnaissent que l’avenir de la République démocratique du Congo sera économique ou ne le sera pas.

Depuis son accession à l’indépendance et à la souveraineté nationale et internationale, la RDC est en proie à des bouleversements politiques. Le monde change, tout bouge et se transforme de plus en plus vite… Dans cet environnement de bouleversements, dans ce monde de « ruptures », pensent des intellectuels, il nous faut repenser nos modèles et surtout inventer de nouvelles logiques économiques pour transformer l’incertitude en avantage concurrentiel et faire en sorte que la mondialisation profite à chacun. Il nous faut redonner confiance à tous. Seule la confiance permettra en effet de retrouver durablement le chemin de la croissance.

Le futur de ce pays est à inventer ! 

Contrairement à ce que pensent les pessimistes, la RDC n’est pas morte ! Le pays demande à être bien gouverné. Le futur de ce pays est à inventer ! Dans ce nouveau contexte que tout Congolais appelle de ses vœux, les milieux d’affaires ont un rôle de tout premier plan à jouer dans la construction de cet avenir. Mais pour jouer, pleinement et entièrement, ce rôle, ils doivent influer sur la gestion ou la gouvernance du pays, en libérant l’audace créatrice et en assurant à la RDC un leadership dans les filières majeures. Pour cela, un changement radical de méthode s’impose.

Confiance et croissance, c’est l’avenir sur fond d’optimisme, de réalisme et d’action. « Une enquête sur l’avenir des entreprises et des institutions montre que les Congolais ont pour leur pays le goût et l’envie d’aller de l’avant, le goût et l’envie d’entreprendre, la fierté d’être Congolais. » Les chefs d’entreprise interrogés attendent beaucoup du tout nouveau gouvernement, ils insistent sur les moyens et les réformes à engager (en priorité dans la lutte contre l’impunité et la corruption, dans l’établissement de l’État de droit, dans le respect des droits de l’homme) sans tarder pour libérer en RDC toutes les énergies.

Les chefs d’entreprise insistent également sur l’importance de l’entrepreneuriat, sous toutes ses formes, pour résoudre enfin le problème du chômage et permettre à chacun de devenir acteur de sa vie. Bref, dans un monde qui bouge, ils souhaitent enfin un vrai changement en RDC. Les élections sont donc un événement incontournable de la vie politique, économique et sociale. Elles mettent chef d’État et ministres, leaders politiques, intellectuels, chefs d’entreprise, scientifiques et artistes, bref tout le monde, sur le même pied d’égalité pour débattre sur les grands enjeux de la société et de l’époque sans tabous ni faux-fuyant dans un esprit d’ouverture et de créativité.

Crise de morale politique

Selon la Fédération des entreprises du Congo (FEC), le pays ne compte plus actuellement beaucoup de grandes entreprises et industries comme dans les années 1960 et 1970. La plupart de ces unités de production en activité sont des capitaux étrangers : occidentaux, chinois, indiens, libanais… Le constat est que l’économie de la RDC est aujourd’hui « une économie blessée et déchirée ». Les poches de pauvreté sont visibles, tout comme le triste sort des jeunes. Sans avenir, ils sont devenus d’« insupportables geignards ». Dans cette situation socio-économique de précarité, l’entreprise est sans nul doute l’une des « planches de salut » parce que pourvoyeuse d’emplois pour les jeunes.

La crise de conscience dans le pays a fait voler en éclats la société en tant que civilisation. C’est-à-dire en tant qu’ensemble des connaissances, des mœurs et des idées d’un pays considéré comme civilisé. Sur l’inaction de l’État à réprimer sa propre instrumentalisation par ses propres mandataires à travers leurs pratiques vis-à-vis des chefs d’entreprise, les patrons ne savent plus trop quoi en penser. Et ça finit par faire beaucoup. Comme le dit un chef d’entreprise, ce qui reste à faire, c’est de « réconcilier les Congolais avec l’entreprise ». « Si l’État ne consacre pas d’efforts particuliers à assainir l’environnement économique, ce n’est pas par désintérêt, dit cet entrepreneur. Ou par peur, comme le disent certains détracteurs, de ne pas bien maîtriser devant les patrons les sujets économiques. Il s’agit de stratégie : le gouvernement qui ne fait pas preuve de bonne gouvernance économique, sait que le monde patronal ne le porte pas à cœur ».

Les chefs d’entreprise devraient par principe avoir une oreille attentive à l’évolution du processus électoral. Aujourd’hui, le comportement de la plupart des grands patrons ne fait pas mystère de leur choix, du moins en privé : le changement de leadership économique. Ils vont soutenir celui qui est à même de préserver leurs « intérêts ». Certains d’entre eux regrettent amèrement que l’esprit libéral (de faire des affaires) qui a soufflé sur le pays jusque dans les années 1970, soit en train de disparaître définitivement.