LE MONDE est en passe de connaître ses cinq années les plus chaudes jamais enregistrées et n’est pas sur la bonne voie pour atteindre l’objectif convenu de maintenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels ou de limiter la hausse à 1,5°C. Le rapport intitulé « United in Science 2020” (Unis autour de la science 2020) rassemble les dernières données sur le climat d’un groupe de partenaires mondiaux : l’Organisation météorologiques mondiale (OMM), le Projet mondial sur le carbone, la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et le Met Office du Royaume-Uni.
Ce rapport met en évidence les effets croissants et irréversibles du changement climatique, qui touchent les glaciers, les océans, la nature, les économies et les conditions de vie et se manifestent souvent à travers des aléas hydrologiques tels que les sécheresses ou les inondations. Il démontre aussi comment le Covid-19 a entravé notre capacité à surveiller ces changements dans le cadre du système mondial d’observation.
« Les concentrations de gaz à effet de serre, qui n’ont jamais été aussi élevées depuis 3 millions d’années, ont continué à augmenter. De vastes étendues de la Sibérie ont connu une vague de chaleur prolongée et exceptionnelle au cours du premier semestre 2020, ce qui aurait été très improbable sans un changement climatique d’origine anthropique. Et la période 2016-2020 est en passe de devenir la période de cinq ans la plus chaude jamais enregistrée », a déclaré Petteri Taalas, le secrétaire général de l’OMM. Selon lui, le rapport montre que si de nombreux aspects de notre vie ont été bouleversés en 2020, « le changement climatique quant à lui s’est poursuivi sans relâche ».
Lors d’une conférence de presse le mercredi dernier, António Guterres, le secrétaire général de l’ONU, a noté que « comme le souligne ce rapport, les confinements à court terme ne peuvent remplacer l’action climatique soutenue dont nous avons besoin pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris » sur le climat.
« Les conséquences de notre incapacité à faire face à l’urgence climatique sont partout : des vagues de chaleur records, des incendies de forêt dévastateurs, des inondations et des sécheresses », a-t-il ajouté. « Et ces défis ne feront qu’empirer ». Selon le chef de l’ONU, il n’y a pas de temps à perdre si on veut ralentir la tendance et limiter la hausse de température à 1,5°C.
« L’action climatique est le seul moyen d’assurer une planète vivable pour cette génération et les générations futures », a-t-il dit. « Que nous nous attaquions à une pandémie ou à la crise climatique, il est clair que nous avons besoin de science, de solidarité et de solutions décisives ». Le secrétaire général de l’ONU a appelé à se servir des efforts de relance de l’économie mondiale après la pandémie de Covid-19 pour construire un monde meilleur et durable.
Six actions liées
Antonio Guterres appelle à six actions liées au climat pour façonner la reprise. Premièrement, alors que nous dépensons d’énormes sommes d’argent pour nous remettre du coronavirus, nous devons créer de nouveaux emplois et de nouvelles entreprises grâce à une transition propre et verte », a-t-il dit. Deuxièmement, lorsque l’argent des contribuables est utilisé pour sauver des entreprises, il doit être lié à la création d’emplois verts et à une croissance durable. Et troisièmement, la puissance fiscale doit conduire à un passage de l’économie grise à l’économie verte et rendre les sociétés et les individus plus résilients.
Le chef de l’ONU estime également que les fonds publics devraient être utilisés pour investir dans l’avenir, et non dans le passé, et aller vers des secteurs et des projets durables qui contribuent à l’environnement et au climat. « Les subventions aux combustibles fossiles doivent cesser, les pollueurs doivent payer pour leur pollution et aucune nouvelle centrale au charbon ne doit être construite », a-t-il dit.
Cinquièmement, les risques et opportunités climatiques doivent être intégrés dans le système financier, ainsi que dans tous les aspects de l’élaboration des politiques publiques et des infrastructures. Et, enfin, nous devons travailler ensemble en tant que communauté internationale, a-t-il conclu.
Le coronavirus demeure toujours une menace à la paix et à la sécurité internationales. Trois hauts responsables de l’ONU ont mis en garde le mercredi dernier le Conseil de sécurité sur l’impact de la pandémie de Covid-19 sur la paix et la sécurité internationales. Près de neuf mois après son apparition, le nouveau coronavirus demeure toujours un obstacle au travail des Nations Unies en faveur de la paix et de la sécurité. Rosemary DiCarlo, la cheffe des affaires politiques et de la consolidation de la paix de l’ONU, a alerté sur trois risques liée à la pandémie : une plus grande érosion de la confiance dans les institutions publiques, l’aggravation de certains défis en matière de droits de l’homme et la fragilisation des processus politiques et de paix.
Le 23 mars dernier, Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, avait lancé un appel à un cessez-le-feu mondial afin de mieux lutter contre la pandémie de Covid-19. « La réponse initiale était encourageante. Plusieurs cessez-le-feu temporaires ont été annoncés (…) Cependant, beaucoup ont expiré sans avoir été prorogés, se traduisant par peu d’amélioration sur le terrain », a déploré DiCarlo. « Dans l’ensemble, les opérations de maintien de la paix ont continué de prévenir et de répondre aux menaces contre les civils, qui n’ont malheureusement pas diminué au cours des six derniers mois malgré l’appel du secrétaire général à un cessez-le-feu mondial », a, pour sa part, constaté Jean-Pierre Lacroix, le chef des opérations de paix de l’ONU. « C’est notamment le cas au Mali, en République centrafricaine (RCA) et en République démocratique du Congo (RDC) », a-t-il précisé.
Lacroix a reconnu que la pandémie de Covid-19 a eu un impact significatif sur la conduite des opérations de maintien de la paix de l’ONU. « Cela a créé des défis opérationnels, nous obligeant à ajuster le déploiement de personnel en uniforme, mettre en place des modalités de travail à distance et fournir une gamme de services supplémentaires au personnel sur le terrain », a-t-il expliqué.
Le coronavirus a également compliqué les efforts de l’ONU pour soutenir les autorités et d’autres acteurs, l’obligeant à adapter les modalités de son engagement à faire progresser processus politiques et de paix. « Il nous a obligés à recalibrer notre protection des civils et d’autres domaines d’activités en appui aux populations que nous servons, tout en veillant à ce que ces les activités se poursuivent », a détaillé le chef des opérations de paix.
Les pays dans lesquels des opérations de maintien de la paix de l’ONU sont déployées souffrent d’une combinaison de la faiblesse des structures de santé et de gouvernance et du manque de ressources nécessaires pour lutter efficacement la pandémie. « Dans ces environnements, la propagation du Covid-19 peut non seulement entraîner une exacerbation des tensions socio-économiques », a prévenu Lacroix. « Ses effets peuvent également miner la gouvernance et les institutions locales, ralentir ou faire dérailler des processus politiques fragiles, aggraver des situations de sécurité déjà instables et contribuer à une récurrence des conflits intercommunautaires ». Mark Lowcock, le chef des affaires humanitaires de l’ONU, a, de son côté souligné les effets indirects de la pandémie sur les pays les plus vulnérables : économiques d’abord, mais aussi sur les services publics.