Lors d’une discussion de haut niveau qui s’est tenue à la Conférence des ministres de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) de l’ONU, le secrétaire exécutif adjoint de l’organisation, Abdalla Hamdok, a indiqué que l’argent transféré illégalement entre les pays et l’évasion fiscale représentaient aujourd’hui une perte de 100 milliards de dollars par an pour les États africains. « Je pense que personne ne remet en cause la gravité de la situation. Il s’agit de savoir comment y mettre fin », a-t-il expliqué. « C’est un problème africain. L’unique façon de le résoudre est de collaborer avec nos partenaires ». La directrice de la Recherche au Forum africain sur l’administration fiscale, Dr Nara Monkam, quant à elle, a mis en lumière la destination des fonds et le profil des personnes impliquées dans le transfert de fonds : « Certaines multinationales utilisent l’évasion fiscale, les fausses factures et des transferts de bénéfices abusifs ». Selon la directrice, la coopération internationale au niveau continental est nécessaire pour lutter contre ces pratiques. En outre, compte tenu du fait que les flux financiers illicite impliquent des acteurs du monde entier, et que les lois et réglementations des États non africains ont des répercussions sérieuses sur ces flux en provenance d’Afrique, il est devenu urgent de revoir la pertinence des cadres internationaux de lutte contre les flux financiers illicites.
Question de volonté politique
Dr Monkam a ajouté que des financements étaient nécessaires pour renforcer l’assistance technique sur les questions fiscales et améliorer les administrations fiscales. Le conseiller juridique du vice-président du Nigeria, Akingbolahan Adeniran, a appelé à davantage de mobilisation pour obtenir le retour des fonds illicites. « Sur le plan national, recevoir de l’argent volé est un délit. Pourquoi recevoir de l’argent d’un autre pays n’est pas un délit ? », a-t-il lancé. Outre la perte de revenus pour les États concernés, les mouvements d’argent ont d’autres effets négatifs : ils minent les efforts pour une meilleure gouvernance, contribuent à la dégradation de l’environnement, déséquilibrent la répartition des revenus, renforcent les inégalités et exacerbent les conflits, en particulier dans les pays riches en ressources.
La participation des gouvernements a été jugée cruciale. Le professeur Annet Wanyana Oguttu, experte en droit fiscal à l’Université d’Afrique du Sud, a exhorté les gouvernements à lutter contre les flux financiers illicites. « Cela est une question de volonté politique », a-t-elle affirmé. « De nombreux pays se sont montrés réticents ». Abdalla Hamdok a remercié l’État norvégien d’avoir financé le débat de haut niveau de la CEA sur les flux financiers illicites en provenance d’Afrique, présidé par l’ancien président sud-africain, Thabo Mbeki. Il a souligné le fait que le pays représentait un « partenaire extrêmement progressiste ». Les pays africains se sont engagés à lutter contre l’argent illicite dans le cadre du point 16.4 des Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU et de la Déclaration spéciale de l’Assemblée de l’Union africaine sur les flux financiers illicites de 2015.