LES RÉGIES financières et les services d’assiette l’ont appris à leurs dépens lors des échéances fiscales. C’en est un fait de trop pour les services percepteurs de recettes de l’État. Entre 2016 et 2017, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) avait été gelée dans le secteur minier pour effacer une ardoise de 360 millions de dollars de l’État auprès des minings. Et voilà que les grandes entreprises minières font toujours fi de nouvelles dispositions fiscales et de rapatriement de 60 % des recettes qu’elles réalisent ou encore du décret de Bruno Tshibala Nzenzhe, le 1ER Ministre, sur les minerais stratégiques.
Le code minier révisé n’est que partiellement appliqué, près de 15 mois après son entrée en vigueur, selon les experts du ministère des Mines. Lors du Séminaire d’orientation budgétaire (SOB 2020) présidé par Pierre Kangudia Mbayi, le ministre d’État, ministre du Budget, les délégués des ministères des Mines et du Portefeuille ainsi que ceux des régies financières ont fait part des difficultés rencontrées par l’administration pour recouvrer les recettes de l’État auprès des miniers qu’ils n’ont pas osé citer nommément.
L’on sait toutefois qu’un groupe de 7 entreprises minières s’étaient constituées en cartel pour s’opposer au code minier révisé en mars 2009 et ont même dû quitter la Fédération des entreprises du Congo (FEC) qu’elles accusaient de rouler pour l’État. Il s’agit de China Molybdenum, Ivanhoe Mines Ltd, MMG Ltd, Zijin Mining Group Co, Anglogold Ashanti, Glencore Plc et Rangold Ressources. Mais des sources généralement bien renseignées dans le domaine politique ont laissé entendre que le fameux G7 minier était plutôt favorable à Lamuka, le cartel politique regroupant Martin Fayulu, Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba, Olivier Kamitatu, Pierre Lumbi Okongo, etc.
En tout état de cause, quelque 44 entreprises minières étaient en phase d’exploitation du cuivre en 2018, selon la Cellule technique de planification minière (CTPM). Il est des miniers qui, aux dispositions (para)fiscales du code révisé, opposent des conventions particulières qu’ils ont signées avec l’État à travers les ministères des Mines et des Finances. Ces conventions soustrairaient ces miniers aux paiements de certains droits, taxes et redevances.
D’autres minings, par contre, évoquent, apprend-on, des mesures compensatoires convenues avec les autorités de la RDC. Des opérateurs miniers ont financièrement contribué à la tenue des élections présidentielle et législatives de décembre 2018. Par conséquent, l’État a, en retour, réduit considérablement leurs obligations fiscales et parafiscales en leur faveur sans jamais aviser les régies financières. La confusion est telle que le décret du 1ER Ministre, faisant du cobalt, de la cassitérite et du germanium, « minerais stratégiques » et relevant de 3 % à 10 % leur taux de perception des taxes parafiscales, peine à être appliquées. Et selon certaines confidences, il y a des provinces qui continueraient à appliquer sciemment le code version 2002, au terme des arrangements officieux avec certains miniers.
Arrêtés interministériels gelés
À ce jour, il est encore des arrêtés interministériels (Mines/Finances) en souffrance. Ce qui empêche l’activation de certaines taxes, rapportent des délégués des administrations précitées. La descente sur des zones minières pour des missions de contrôle par les inspecteurs des Mines et de la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et des participations (DGRAD) ne s’effectue qu’une fois l’an. Et cela, par les mêmes agents publics qui sont en pris en charge par l’entreprise contrôlée. Ce que les délégués de la DGRAD ont catégoriquement rejeté alors que ceux des Mines ont plutôt reconnu quoiqu’à demi-mots.
Bonne nouvelle d’après eux, dès le mois d’août 2019, le secteur minier sera davantage informatisé et équipé d’un logiciel qui informerait instantanément la DGRAD de tout versement perçu par l’administration minière sur n’importe quel coin du pays. Ainsi que la question d’harmonisation des recettes sera moins laborieuse. Mais aux Mines, l’on déplore encore et toujours la confusion entretenue par la DGRAD sur la délivrance des imprimés de valeur aux services d’assiette.
Régime de droit commun
Jusqu’à fin juin 2019, la Direction générale des douanes et accises (DGDA) ne disposait pas toujours de la liste exhaustive des entreprises minières qui ne doivent plus bénéficier des droits d’entrée au taux préférentiel.
Pourtant, après six ans d’exploitation, une entreprise minière jouissant d’un régime de privilège devrait formellement rentrer dans le régime de droit commun. Mais cette directive n’est guère d’application au point que les régies financières, particulièrement la DGDA, attendent des dispositions claires du gouvernement pour projeter les réalisations pour la période 2019-2021, dans la cadre du cadre budgétaire à moyen terme (CBMT).
À titre exemplatif, il y a six ans, suite à une recommandation expresse du gouvernement, la DGDA a accordé un régime préférentiel à la Société Anhui Congo d’Investissement Minier (SACIM). Il s’agit, en pratique, d’un chapelet des facilités au titre de partenariat stratégique sur les chaînes de valeur conformément au décret n°03/049 du 6 octobre 2013 dont l’exonération des droits de douane et la suspension de la perception de la TVA à l’importation, la suspension de la TVA sur les produits intermédiaires ou finis ainsi que sur les prestations des services produits par l’entreprise.
Autres facilités, l’allègement des coûts de la rémunération de certaines prestations dans le cadre institutionnel conformément au décret susmentionné. Depuis mi-2016, la production du diamant de la SACIM serait en moyenne de 300 000 carats le mois, contre 70 000 carats au début de la production. Il y a un peu plus d’une année, Roger Kalembo, le coordonnateur de cette société sino-congolaise, rassurait à un diplomate sud-africain que la production de SACIM irait crescendo.