LES TIC qui sont attestées aujourd’hui comme un moteur de croissance économique, ne doivent plus être considérées en République démocratique du Congo comme « un amas de gadgets accessibles uniquement aux plus nantis et aux adeptes des technologies ». Le gouvernement a décidé d’en faire un outil indispensable et utile du vécu quotidien des Congolais. Bien plus, les technologies de l’information et de la communication (TIC) doivent être considérées désormais comme un levier de développement intégral de la nation.
Pour réaliser cette noble ambition, cela va sans dire que le pays doit se doter des infrastructures des TIC. Lesquelles constituent le fondement des nations et des sociétés numériques. Il faudra donc une bonne dose de volonté politique pour mettre en branle l’ambitieux programme gouvernemental. Car l’année prochaine, à la même période, les participants à la première édition reviendront pour évaluer la situation : qu’est-ce qui a été fait et comment ? Qu’est-ce qui n’a pas été fait et pourquoi ? C’est l’avis unanime à l’issue de cette rencontre voulue sans le moindre tabou.
Le prix du changement
La volonté, tout court, suffit pour transformer. Car, dit-on, qui veut peut. Pour cela, il faut oser pour réformer, et commencer quelque part. Surtout, il ne faudra pas perdre de vue que toute réforme a un coût. C’est le coût du changement, c’est-à-dire le changement de culture et de mentalité. La transformation de la société est avant tout un processus qui ne doit plus s’arrêter quand il est déclenché. Il ne reste plus que de saisir les faiblesses qui ont été méthodiquement identifiées par les panelistes pour les transformer en opportunités exploitables, ont-ils insisté.
Augustin Kibassa Maliba, le ministre des Postes, des Télécommunications et des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (PT&NTIC), quant à lui, est optimiste. Il a rassuré qu’il n’y aura ni reculade ni remise en question du processus, parce que Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le président de la République, lui-même, a été le premier à percevoir la nécessité et l’urgence de doter le pays d’un écosystème numérique. En effet, la digitalisation est le moyeu de grandes réformes attendues dans le pays, notamment dans les secteurs du foncier et du fisc.
C’est dire que la volonté politique est non seulement affichée mais aussi affirmée au sommet de l’État. À charge donc du gouvernement de faire avancer le processus, en faisant, par exemple, voter une nouvelle législation, illico presto, a fait remarquer un participant venu d’Afrique du Sud, afin qu’elle contribue à la croissance économique et au développement social en RDC.
C’est dans cette perspective que le ministre des PT&NTIC a mis en place l’e_DRC comme une plateforme d’échanges entre investisseurs (privés et institutionnels) et les différentes parties prenantes de l’écosystème numérique.
À l’ouverture de la 1è édition de l’e_DRC dédiée à la présentation de la cartographie des opportunités d’investissements dans ce secteur dans le pays, Augustin Kibassa a rappelé que la tenue de ces assises cadre avec la vision présidentielle de « faire du numérique congolais un levier d’intégration, de bonne gouvernance, de croissance économique et de progrès social ». Sous cet angle, le programme du gouvernement préconise notamment la construction du réseau de base (Backbone) à fibre optique, en vue d’augmenter le taux de pénétration des TIC, améliorer sensiblement la qualité des services offerts à la population et de diminuer le coût des communications. Il vise également l’interconnexion de toutes les 26 provinces du pays et le renforcement des capacités du personnel de l’État, en vue de son perfectionnement dans l’usage de l’outil informatique.
Point n’est besoin de rappeler que le secteur des PT&NTIC est un faisceau kaléidoscopique d’industries et d’activités de services. Parmi lesquelles la fourniture des services postaux, des services de téléphonie (fixe et mobile), des services et d’accès internet ; les services et équipements de télécommunications ; les équipements et services informatiques ; les médias et la radiodiffusion ; l’électronique ; les fournisseurs d’informations ; les services d’informations sur réseau ; l’hébergement des données numériques ; les fournitures d’infrastructures passives des réseaux ainsi que les services professionnels de câblodistribution, etc.
Données chiffrées
De l’état des lieux que le ministère des PT&NTIC a fait et ayant conduit au programme du gouvernement, il ressort que ces industries ne sont pas toutes développées en RDC. L’essentiel des activités du secteur, a dit Augustin Kibassa, se fait grâce à l’apport de l’industrie de téléphonie mobile. D’ailleurs, celle-ci connaît depuis son avènement en RDC une croissance assez remarquable, mais limitée par plusieurs facteurs techniques et environnementaux, endogènes et exogènes.
Selon les rapports des organismes internationaux et nationaux dont l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications du Congo (ARPTC), le taux de pénétration de téléphonie mobile est encore à moins de 40 % de la population, avec un revenu moyen par utilisateur de 3 dollars. Le taux d’accès à l’internet est encore à moins de 15 % de la population, avec un revenu moyen par utilisateur de 1 dollar. Le taux de pénétration de la monnaie électronique, lui, est de 7 % avec un revenu moyen de 1 dollar. Par ailleurs, le taux de couverture des réseaux est à moins de 25 % du territoire national.
Pour pallier cette situation de déficit, le gouvernement a prévu, via le ministère des PT&NTIC, des « actions concrètes », pour atteindre à moyen terme huit objectifs. Un : une infrastructure nationale de télécommunication développée, moderne et fiable. Deux : une administration publique efficace utilisant les TIC pour améliorer le fonctionnement et les services aux citoyens. Trois : une informatisation efficiente des services générateurs de recettes. Quatre : un taux élevé d’échange de biens et de services TIC. Cinq : un secteur des services en TIC et une industrie numérique importants et dynamiques. Six : une population instruite et largement familiarisée avec les TIC. Sept : une abondante main-d’œuvre jeune encadrée et qualifiée en TIC. Huit : un environnement propice à la libre entreprise, à l’innovation et attractif pour les investisseurs.
Dans une approche privilégiant le dialogue et la participation, le ministre des PT&NTIC a souligné que cette rencontre avait pour objectif d’« éclairer la lanterne des investisseurs désireux de participer à l’exécution dudit programme et de contribuer ainsi au développement du secteur des PT&NTIC en RDC », d’une part, et, d’autre part, d’« informer les acteurs de l’industrie et l’opinion des possibilités du programme tout en donnant une orientation claire à nos partenaires ».
Augustin Kibassa a particulièrement remercié des partenaires qui ont contribué au succès des assises, particulièrement African Union Developpment, Huawei et Africa Pipes. Il a également invité les partenaires techniques et financiers potentiels à se joindre à son ministère dans cette marche vers la matérialisation de ce grand projet. « L’État congolais, sous la haute direction du président de la République, chef de l’État, et la coordination du 1ER Ministre, chef du gouvernement, est disposé à accompagner activement les investisseurs dans leurs participations respectives, pour la mise en œuvre par segment et par axe constituant l’intégralité de ce projet. L’État congolais s’engage à apporter sa part pour la mise en œuvre opérationnelle et ainsi garantir l’encadrement des investissements dans un format », a-t-il conclu son discours à l’ouverture du forum.