L’expérience est concluante au Ghana et l’initiative est tentante en Afrique subsaharienne. Tout est parti d’un constat : la diminution constante des subventions de l’État aux agriculteurs et de l’apport de l’agriculture dans l’économie du Ghana. En effet, plus de la moitié des Ghanéens sont des agriculteurs, mais le secteur agricole ne représentait que 19 % du produit intérieur brut (PIB) en 2015, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le projet initié par Kankam-Boadu vient à point nommé, ainsi pourrait-on dire.
Après avoir terminé des études en agriculture et gestion de projet à l’Université de Bradford (Royaume-Uni), Isaac Kankam-Boadu retourna dans son pays, le Ghana, dans le but d’aider les petits exploitants agricoles à devenir autonomes grâce à des pratiques agricoles durables. Isaac Kankam-Boadu, qui avait reçu de la Marshal Papworth, une organisation caritative britannique, une bourse destinée aux étudiants en agriculture et horticulture originaires de pays en développement, a commencé par apprendre aux agriculteurs comment améliorer leurs récoltes en ayant recours à des cultures à haut rendement résistant à la sécheresse. Il leur a également appris comment utiliser le fumier biologique et les engrais inorganiques pour améliorer la fertilité des sols. Il leur a aussi montré comment la rotation des cultures, et la culture, notamment de légumineuses, permettent de limiter l’érosion des sols en y apportant de l’azote.
Recette payante
Grâce aux plantations d’alignement, à l’emploi d’engrais et à une meilleure gestion des exploitations, les récoltes de maïs des agriculteurs sont passées de deux sacs par acre à six. « Avant, mes champs étaient labourés à la main et je ne pouvais cultiver qu’une seule acre de terre. Mais grâce au tracteur, la superficie de mes terres agricoles a doublé », a expliqué Ibrahim Biawurbi, un agriculteur de Kabilpe, à environ 500 km au Nord d’Accra, la capitale. Kankam-Boadu a supervisé, entre autres, la mise en œuvre de projets agricoles comme le Projet de renforcement de la sécurité alimentaire dans le Nord du Ghana (Northern Ghana Food Security Resilience Project) financé par l’Union européenne (UE) et le Projet intégré de commercialisation et d’amélioration de la productivité agricole (Integrated Agricultural Productivity Improvement and Marketing Project) financé sur trois ans par l’Agence danoise pour le développement international et la Fondation Rockefeller à travers l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA), qui promeut l’agriculture sur le continent.
Grâce au projet de renforcement, quelque 10 000 ménages ruraux, dans sept départements du Nord et du Nord-Ouest du Ghana, ont obtenu des fournitures agricoles – semences, outils, services de labourage – afin d’améliorer leurs productions, notamment celle du maïs, une denrée de base dans la région. Le deuxième projet a permis d’aider plus de 11 400 exploitations dans dix départements différents du Nord à produire du maïs, du riz, du soja et de l’arachide. Les agriculteurs ayant reçu une formation aux techniques de fertilisation notent des améliorations de leur rendement, qui est passé de 65,4 % en 2013 à 98,6 % en 2015, et de la fertilité des sols, grâce à l’usage du fumier de poule, qui est passée de 1,6 % en 2014 à 45,1 % en 2015.
Ces résultats sont encourageants, en particulier pour les agriculteurs. La plupart des exploitations bénéficiaires ne sont plus exposées aux risques de pénuries du fait d’une amélioration considérable des récoltes. En outre, elles vendent leurs excédents au marché, touchant ainsi un revenu supplémentaire. Dans la ville de Nwampe, les formations sur le traitement des récoltes ont permis aux agriculteurs de ne subir aucune perte de stockage.
Étendre à l’échelle régionale
Grâce à ces réussites, Kankam-Boadu espère que le gouvernement appliquera à l’échelle nationale les méthodes qu’il a pu appliquer à l’échelle régionale. « Les agriculteurs n’ont pas besoin de recevoir des dons du gouvernement. Tout ce dont ils ont besoin, c’est d’une aide de départ et d’une formation », a-t-il déclaré. « Nous constatons chaque jour les effets positifs des investissements dans l’agriculture ». Sandra Lauridsen, qui travaille pour Marshal Papworth, s’est rendue au Ghana pour voir les réalisations de Kankam-Boadu et s’est réjouie de ce que fait le jeune homme pour son pays. « Voir la manière dont les connaissances et les compétences acquises grâce aux bourses d’étude sont mises en pratique et l’impact que les étudiants ont sur leur communauté, est particulièrement inspirant », déclare-t-elle avec satisfaction.