L’heure est à l’évaluation des mesures d’encadrement des effets pervers du Covid-19

Des propos d’une légèreté d’esprit tendant à nuire aux efforts de Sylvestre Ilunga Ilunkamba se répandent dans les réseaux et certains médias, selon lesquels il ne dit rien quand il s’agit de l’économie. Pourtant, chaque mardi, il réunit le comité de conjoncture économique pour évaluer la situation et prendre des dispositions appropriées.

LA SEMAINE dernière, par exemple, la commission ad hoc, C26, de l’Assemblée nationale regroupant 26 députés nationaux, représentant les 26 provinces du pays, est allée s’enquérir de la situation socio-économique et sécuritaire dans le pays auprès de Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, qui les a reçus, le jeudi 23 juillet, à l’hôtel du gouvernement. Le chef de l’exécutif avait à ses côtés Jean Baudouin Mayo Mambeke, le vice-1ER Ministre, ministre du Budget ; Jacqueline Penge Sanganyoi, la ministre près le 1ER Ministre ; Junior Mata M’Elanga, le vice-ministre aux Finances ; et Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, le gouverneur de la Banque centrale du Congo.

Gratien Iracan, le président de cette commission, a indiqué qu’au moment où les députés s’apprêtent à aller en vacances parlementaires, ils ont voulu rencontrer le chef du gouvernement pour échanger sur « divers sujets » qui préoccupent les provinces mais aussi sur la situation des finances publiques. D’après lui, la commission C26 de l’Assemblée nationale a reçu du 1ER Ministre « une matière consistante pour pouvoir faire la restitution auprès de la base », étant donné que les députés nationaux et le gouvernement travaillent comme des alliés.

De l’état des finances publiques, justement, il en a été question au cours de la réunion hebdomadaire du comité de conjoncture économique du gouvernement que Sylvestre Ilunga a présidée, lui-même, le mardi 21 juillet à l’hôtel du gouvernement. Après un tour d’horizon de la situation, le comité de conjoncture économique qui a été élargi au patronat (Fédération des entreprises du Congo et l’Association nationale des entreprises publiques) depuis que la pandémie de Covid-19 a été déclarée au pays, a fait le constat suivant : « les efforts fournis par le gouvernement et la Banque centrale pour la stabilisation de la monnaie nationale n’ont pas encore atteint la majorité. »

Le comité de conjoncture économique continue d’espérer et met les bouchées doubles pour y parvenir, a déclaré Jean Baudouin Mayo. En effet, a-t-il poursuivi, il s’observe encore « quelques frémissements » sur le taux de change. Ce qui implique, a-t-il souligné, par ailleurs, l’augmentation des prix, surtout des denrées de première nécessité sur le marché. Selon l’Institut national de la statistique (INS), à la troisième semaine de juillet, l’inflation nationale hebdomadaire s’est établie à 0,775 %, contre 0,725 % la semaine précédente, et à 0,845 %, contre 0,783 % une semaine plus tôt à Kinshasa. En cumul, l’inflation a atteint 10,903 % au niveau national et 11,569 % à Kinshasa.

Directives à la BCC

« C’est dans ce cadre que le 1ER Ministre a instruit la Banque centrale qui pilote le secrétariat technique ayant élaboré les mesures d’encadrement des effets pervers de la Covid-19 de préparer très rapidement l’évaluation de ces mesures ». Il s’agit en fait d’apprécier la situation : quelles mesures il faudra conserver et quelles mesures il faudra abandonner. Dans la note de conjoncture qui a été présentée par Élysée Munembwe Tamukumwe, la vice-1ER Ministre, ministre du Plan, il est fait mention que « la Covid-19 est encore là ». Et que la levée de l’état d’urgence ne signifie pas la fin de la maladie. « Même s’il y a un léger ralentissement de l’évolution de la pandémie, les chiffres sont quand même importants », a fait remarquer Mayo Mambeke. D’après lui, le 1ER Ministre est très préoccupé de la conjoncture actuelle. C’est pourquoi il a insisté sur le respect strict des gestes barrières, ainsi sur les prescriptions du corps médical dans la riposte à la fièvre à virus Ebola qui sévit dans la province de l’Équateur. « Le gouvernement s’en occupe. » Par ailleurs, la note d’information présentée par Willy Kitobo Samsoni, le ministre des Mines, est rassurante : la production minière se maintient à « un très bon niveau », les cours des métaux comme le cuivre, le cobalt et le zinc que produit la République démocratique du Congo, « progressent lentement mais sûrement ». Par exemple, le prix du cuivre vaut 6 400 dollars la tonne métrique, son niveau atteint en 2018, tandis que le cobalt est à 28 500 dollars la tonne métrique. « Avec un bon encadrement et une bonne application des mesures, il devrait y avoir le rapatriement des devises au pays pour soutenir l’activité économique », a déclaré le ministre du Budget.

Et donc, « les Congolais ne devraient pas perdre espoir », et surtout ne pas penser que le 1ER Ministre ne fait rien quand il s’agit de la situation économique de l’heure dans le pays. Au contraire, a-t-il soutenu, « nous devons tous faire bloc contre la Covid-19 ». En effet, selon des observateurs avisés, le contexte de Covid-19 est un « moment exceptionnel ». On retiendra utilement que la pandémie est à l’origine d’une « accélération soudaine de l’inflation » en Afrique, qui, dans certains cas, dépassait déjà 5 % au premier trimestre de 2020. 

Dépenses budgétaires

Pour sa part, la Banque mondiale souligne dans Perspectives africaines 2020 : « Les dépenses budgétaires expansionnistes pourraient doubler des déficits budgétaires déjà élevés. Il est probable que la pandémie et ses conséquences économiques ouvrent la voie à des réponses de politique budgétaire expansionniste dans toutes les économies africaines, ce qui creuserait davantage les déficits budgétaires du continent ».  C’est dire que l’inflation actuelle n’est pas vraiment la faute des gouvernements dans le monde. « C’est un cas de force dû à la pandémie », explique un analyste. « En 2020, ces déficits devraient doubler, et atteindre 8 % du PIB dans le scénario de base et 9 % dans le scénario pessimiste. Cette évolution défavorable de la situation budgétaire aurait pour origine une augmentation des dépenses budgétaires en raison de la prise en charge sanitaire de la Covid-19… ainsi que des réductions et des reports d’impôts », souligne encore la Banque mondiale. 

Qui avertit : « Les déficits budgétaires structurellement importants et résultant principalement d’une faible mobilisation des ressources intérieures et d’un effort fiscal généralement insuffisant ne manqueront pas de rester à court et moyen termes une source de préoccupation dans la région. »