JOHANNESBURG, Nelson Mandela fête jeudi ses 95 ans dans sa sixième semaine d’hospitalisation à Pretoria mais sa fille a fait état de progrès étonnants de l’ancien président qu’on avait dit au seuil de la mort.
Alors que le monde s’apprête à lui rendre hommage par des actions caritatives pour le “Mandela Day” annuel, le président américain Barack Obama a salué son “exemple extraordinaire de courage, de gentillesse et d’humilité”.
Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius s’est “associé à cet hommage, mondial, unanime, en faveur de cet homme qui a rendu au peuple sud-africain sa liberté et sa dignité”.
Sa fille Zindzi a déclaré mercredi à la chaîne Sky News que son père “faisait des progrès remarquables” et “regardait la télévision avec des écouteurs”.
Le héros de la lutte contre l’apartheid reconnait ses visiteurs et est aussi capable de communiquer. “Il réagit très bien (…) du regard et de la tête. Et il lève parfois la main comme s’il voulait nous serrer la main”, a-t-elle dit après l’avoir vu la veille.
Ces bonnes nouvelles font suite à la longue angoisse qui a suivi l’hospitalisation de Mandela le 8 juin pour une grave infection pulmonaire.
“Il y a eu un moment où nous étions tous extrêmement anxieux et inquiets et nous étions prêts au pire”, a dit Zindzi. “Mais il continue de nous étonner tous les jours”.
Son épouse Graça Machel, qui le veille jour et nuit, s’était déjà dite vendredi “un peu moins anxieuse” qu’une semaine auparavant.
Mandela l’avait épousée en troisièmes noces le jour de ses 80 ans et le couple fête ce jeudi ses 15 années d’union.
Dans ce contexte, une émotion particulière marque la journée d’hommage institutée en 2009 en Afrique du Sud.
“Nous avons décidé de ce jour en l’honneur de Mabida (nom de clan de Mandela ndlr), afin d’inspirer chacun de nous pour agir personnellement, et changer le monde pour le meilleur”, a rappelé le président Jacob Zuma.
L’année suivante, le 18 juillet 2010, l’ONU a décrété à son tour un “Mandela Day” où chaque citoyen du monde est appelé à consacrer symboliquement 67 minutes de son temps à une oeuvre au service de la collectivité, en mémoire des 67 années que Mandela a vouées à sa lutte pour l’égalité.
“Aujourd’hui, toutes nos pensées sont tournées vers le riche héritage qu’il nous a laissé, à nous Sud-Africains et au monde”, a ajouté M. Zuma: “Faites de chaque jour un Mandela Day”.
En Afrique du Sud, une association de motards va nettoyer des rues, des volontaires vont repeindre des écoles, les enfants de tout le pays à l’unisson vont chanter “Joyeux anniversaire” à 08h00 pile (06h00 GMT), et chaque homme ou femme politique ne manquera pas de se faire photographier les manches retroussées, prêtant la main à une oeuvre caritative.
Mais l’anniversaire est aussi péniblement marqué par la récente querelle de famille qui s’est sordidement étalée sur la place publique. La famille a attaqué en justice l’aîné de ses petits fils pour avoir fait déplacer dans son propre village et sans autorisation les tombes de trois enfants décédés de Mandela.
“C’était quelque chose qu’on ne voulait pas voir étalé en place publique”, a déclaré une petite-fille du héros national, Ndileka, dans une interview publiée mercredi par la BBC. “Mais parce que nous sommes ce que nous sommes, ça a débordé sur l’espace public”.
“Je ne dis pas que je ne pardonnerai jamais, mais (…) ça fait toujours mal”, a-t-elle déclaré.
Le Mandela Day n’est est pas moins devenu un jour important pour tous les Sud-Africains. Le président Zuma, au nom de la réconciliation entre les races voulue par Mandela, s’apprêtait à présider à une remise de maisons sociales à des blancs pauvres.
Dans le monde, quelques stars vont faire écho aux Sud-Africains.
“Je vais aussi donner 67 minutes de mon temps pour faire du monde un meilleur endroit”, a déclaré le milliardaire britannique Richard Branson, patron de la marque Virgin.
Mandela, emprisonné pendant 27 ans par le régime ségrégationniste d’apartheid, est ressorti de prison sans un mot de vengeance. Libéré en 1990, il a négocié avec le pouvoir en place une transition douce vers la démocratie. Une fois président, en 1994, il n’a jamais cherché à humilier ou à défavoriser la communauté blanche, prêchant au contraire en permanence la réconciliation.
“Jamais auparavant dans l’histoire un être humain n’avait été aussi universellement reconnu de son vivant comme l’incarnation de la magnanimité et de la réconciliation”, a dit de lui l’ex-archevêque anglican Desmond Tutu, lui même prix Nobel de la paix pour sa résistance à l’apartheid.