Alors que les prévisions sur le marché du mobile money présagent environs 250 millions de clients en Afrique subsaharienne à l’horizon 2019, les contrats d’interopérabilité entre les sociétés de téléphonie mobile ne cessent d’accroître sur le continent.
D’ordinaire réservés aux abonnés d’un même opérateur avec la restriction au seul périmètre national, les services financiers sur mobile sont depuis peu interconnectables et opérationnels en dehors des zones de couverture des opérateurs de la téléphonie mobile. Ce, grâce aux contrats de partenariat signés entre les sociétés de télécoms.
Selon une étude du cabinet américain Boston Consulting Group, rapportée par Jeune Afrique « en Afrique subsaharienne, les services financiers sur mobile pourraient rapporter au moins 1,5 milliard de dollars d’ici à 2019 et viser un marché de 250 millions de personnes. »
Profitant de cette opportunité, les sociétés des télécommunications ont axé leur stratégie d’accroissement de revenus, cette année, autour des finances sur mobile. C’est à celui qui trouvera le meilleur moyen d’accélérer l’inclusion financière des populations que se verra ravitailler son chiffre d’affaires. C’est donc un nouveau marché commun qui s’ouvre pour les télécoms en Afrique. Aucun opérateur ne veut rester en marge de ce marché porteur. Les annonces d’offres nouvelles en direction des clients africains deviennent légion.
Mise en place d’une plateforme interopérable
Tandis que le rapport de la GSM Association publié en début du mois d’avril à travers le programme Mobile Money for the Unbanked (argent mobile pour les personnes qui n’ont pas de compte bancaire) estime que « l’argent mobile devient une offre de service centrale pour les opérateurs de réseaux mobiles (ORM), l’intensification de la concurrence et de la demande des consommateurs a généré un intérêt accru pour le développement d’une interopérabilité de compte à compte. »
Le rapport renseigne qu’en 2014, les opérateurs au Pakistan, au Sri Lanka et en Tanzanie ont interconnecté leurs services pour que leurs clients puissent envoyer de l’argent directement à des portefeuilles mobiles sur d’autres réseaux, à l’instar des opérateurs d’Indonésie où l’interopérabilité a été mise en œuvre en 2013. Les opérateurs sur d’autres marchés se sont également engagés à interconnecter leurs services, ouvrant ainsi la voie vers la création d’un écosystème de services numériques omniprésents.
En Afrique, par exemple, l’innovation d’interconnecter les solutions « mobile money » entre opérateurs télécoms commence en Tanzanie (2014) avec Tigo. Cet opérateur avait créé une première sur le continent en rendant possible l’envoi d’argent entre deux pays, à savoir la Tanzanie et le Rwanda où il était présent. Quelques mois plus tard, l’opérateur Millicom (Tigo) retente la même chose avec ses concurrents Airtel et Zantel. Ensemble, ces trois opérateurs vont signer un partenariat permettant l’envoi d’argent entre leurs clients. Environ 16 millions d’abonnés étaient concernés par le service.
Après l’alliance Tigo, Airtel et Zantel, MTN lui emboîte le pas en concluant un partenariat similaire avec Airtel pour les transferts entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, puis les envois de fonds transfrontaliers entre ses abonnés ivoiriens et béninois. Depuis, c’est tous les ténors du secteur télécoms qui proposent des services similaires. Parmi eux le français Orange, avec Orange Money, qui s’allie avec l’indien Airtel pour l’envoi et la réception d’argent entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. L’opérateur français proposait déjà ce type de services entre la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Mali, où il est implanté.
Les opérateurs télécoms Vodafone et MTN sont les derniers depuis le 21 avril dernier à interconnecter leurs plateformes de paiement sur mobile à travers sept pays africains. Concrètement, ce sont les abonnés à l’offre M-Pesa de Vodafone au Kenya, en Tanzanie, en République démocratique du Congo et au Mozambique qui pourront échanger des fonds avec ceux de MTN Mobile Money en Ouganda, au Rwanda et en Zambie. Le partenariat Vodafone et MTN entend faciliter les transferts de fonds internationaux hors de leurs pays d’implantation respectifs.
Croissance et expansion des services
Le rapport de la GSM Association affirme que l’argent mobile a connu une croissance rapide ces dernières années. Avec 255 services dans 89 pays, l’argent mobile est maintenant disponible sur 61% des marchés en développement. Soit 84 marchés en développement sur 139, selon la liste des pays en développement de la Banque mondiale. Les opérateurs de réseaux mobiles ont fourni à eux seuls 149 de ces services, ce qui démontre le rôle important et croissant qu’ils jouent dans le développement du secteur de l’argent mobile. En Afrique subsaharienne, le berceau de l’argent mobile, plus de 50 % de l’ensemble des opérateurs de réseaux mobiles ont déjà lancé un service d’argent mobile et, avant décembre 2014, 23 % de toutes les connexions mobiles avaient été liées à un compte d’argent mobile.
L’argent mobile continue de transformer la manière dont les gens accèdent à des services financiers. Sur les trois quarts des marchés où l’argent mobile est disponible, le nombre de bureaux d’agents dépasse celui des succursales bancaires et, sur 25 marchés, il y a donc dix fois plus d’agents d’argent mobile que de succursales bancaires.
Le rapport indique que le nombre d’utilisateurs actifs de l’argent mobile continue de croître rapidement d’une année à l’autre, avec plus de 100 millions de comptes actifs en décembre 2014 par rapport à 73 millions en décembre 2013, soit une hausse de 41%. Les chiffres pourront tripler d’ici 2019.