Fortunes diverses pour les deux compagnies pétrolières ayant obtenu des permis d’exploration dans le Graben Albertine, dans l’Est du pays. Si le français poursuit tranquillement ses activités, le britannique, est confronté à une opposition farouche des défenseurs de la préservation de l’environnement.
Total E&P République démocratique du Congo, filiale du major pétrolier français Total peut se réjouir. La société a obtenu, il y a peu, du ministère des Hydrocarbures, la prorogation, pour deux ans, de son permis d’exploration sur le bloc III. Le nouveau bail pour l’exploration de ce bloc situé dans la région du lac Albert court jusqu’à janvier 2018, rapporte Sacoil Holdings Ltd, partenaire de Total. À ce jour, les partenaires de la joint-venture ont achevé avec succès l’acquisition et le traitement des relevés gravimétriques et magnétiques effectués sur la portion nord du bloc, hors du parc national des Virunga. Selon le pétro-gazier, coté aux Bourses de Londres et de Johannesburg, l’extension donne davantage de temps aux partenaires de la joint-venture pour acquérir et traiter des données sismiques en 2D. Total E&P RDC est opérateur sur ce bloc avec 60 % d’intérêts contre 15% pour la République démocratique du Congo et 25 % pour Sacoil Holdings Ltd.
Respect de la loi et des conventions
Le tiers de la surface du bloc III se situe à l’intérieur du parc des Virunga. La partie restante est à la lisière de cette aire, qui fait partie, depuis 1979, du patrimoine mondial de l’Unesco. Donc, à protéger. L’opérateur français se veut rassurant et s’est engagé à prospecter sur la partie du bloc située à l’extérieur du parc, conformément à la loi congolaise et aux conventions internationales sur la protection de la biodiversité. Le programme de prospection, tout comme l’ensemble des travaux, sont menés dans le respect de la politique environnementale du groupe, en associant les parties prenantes soucieuses du respect des écosystèmes de la région. Depuis 2013, Total évite de développer des projets sur les sites UNESCO.
En République démocratique du Congo, Total est principalement présent à travers son réseau de 27 stations-service ainsi que ses activités dans la distribution pétrolière, notamment dans l’aviation avec le ravitaillement aéroportuaire, la fabrication de lubrifiants ainsi que la logistique. Le permis d’exploration du bloc III du Graben Albertine lui a été attribué en janvier 2012. Dans le contrat de partage de production signé avec le gouvernement, la société doit débourser 3 millions de dollars pendant trois ans (un million par an) durant la période d’exploration en faveur de projets de développement au bénéfice des populations locales. L’essentiel de cet investissement sera consacré aux secteurs de la santé, de l’éducation et de la culture. Des projets à caractère social concernent également la province du Nord-Kivu, bien que les opérations de la société se situent essentiellement dans l’Ituri.
Soco dans l’impasse
Alors que Total poursuit son chemin, Soco est dans l’impasse dans le cadre de ses activités de prospection. La société britannique se trouve dans la ligne de mire des ONG, de la société civile et d’autres organismes internationaux qui l’accusent de corruption et de violences pour tout ce qu’elle a entrepris dans le parc des Virunga.
Soco a ainsi été la grande vedette d’un documentaire produit par une des stars de Hollywood, Leonardo Di Caprio et mis en cause par Global Witness dans un rapport paru en juin. L’ONG vient de rendre publics des documents écrits (chèques et reçus) montrant que, malgré ses démentis répétés, Soco International aurait versé plus de 42 000 dollars entre avril et mai 2014 à un officier de l’armée congolaise, accusé d’avoir intimidé ceux qui s’opposent à l’exploration pétrolière. En juin déjà, elle avait révélé l’existence de transactions financières entre des militaires et les représentants de Soco International. Ces derniers ont démenti toutes ces allégations. « Aucun militaire n’a jamais été employé par Soco. Tous les ordres reçus par les militaires émanent du gouvernement. De même, tous les engagements financiers ont entièrement été pris en accord avec le gouvernement et en toute transparence ».
En 2011, le groupe pétrolier avait obtenu un permis d’exploitation de pétrole au parc national des Virunga. Ce permis couvre une superficie de 7 500 km dont une grande partie du lac qui est, pour l’UNESCO « un des piliers de la valeur universelle du site des Virunga et dont dépend une population d’environ 50 000 personnes vivant de la pêche autour du lac ».