Le moins que l’on puisse dire est que l’accord de Vienne était très attendu par les pays producteurs de pétrole, notamment par l’Iran. Les États membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) se sont entendus, mercredi 30 novembre, dans la capitale autrichienne pour réduire leur production, scellant ainsi après des mois de dissensions un accord indispensable pour faire remonter les prix. Dans le concret, l’OPEP va diminuer sa production de 1,2 million de barils par jour, pour porter son plafond à 32,5 millions de barils par jour. En octobre, le cartel avait produit 33,64 millions de barils. L’objectif est de faire remonter le prix du baril de 49 dollars à 53 dollars au moins.
C’est pour la première fois, depuis 2008, que les 14 pays de l’OPEP s’engagent à limiter leur production, défiant le pessimisme de nombreux observateurs. L’accord en question entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2017, a annoncé le ministre qatari de l’Énergie, Mohammed Saleh al-Sada, qui préside la conférence de l’OPEP. Cette décision qualifiée d’« historique » va certainement aider à rééquilibrer le marché et à réduire la surabondance des stocks de pétrole, ont souligné presqu’à l’unisson les participants à cette conférence de Vienne.
L’OPEP devrait, comme elle le souhaitait, entraîner dans son mouvement la Russie, le plus grand producteur mondial de pétrole, qui s’est engagée à réduire de 300 000 barils sa production. Moscou a confirmé son intention de participer à l’effort si l’OPEP tient ses engagements. La Russie contribuerait ainsi pour moitié à l’objectif de réduction en volume (600 000 barils) demandé aux pays extérieurs au cartel. Les marchés ont réagi favorablement à ces annonces. Par exemple, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en janvier, valait 50,10 dollars à Londres, est monté de 3,72 dollars par rapport à la clôture de mardi 29 novembre, tandis que le WTI pour la même échéance prenait 3,92 dollars à 49,15 dollars… Bref, les cours ont atteint leur plus haut niveau en un mois.
Accord à l’arrachée
L’accord a été donc conclu après des semaines d’intenses tractations entre l’Arabie Saoudite, l’Irak et l’Iran. L’Arabie Saoudite avait clairement annoncé qu’il ne consentirait à réduire sa production que si l’Irak et l’Iran, respectivement 2è et 3è producteurs du cartel, faisaient de même. En pratique, notent les spécialistes, les plus fortes baisses de production seront supportées par l’Arabie Saoudite (-486 000 b/j), l’Irak (-210 000 b/j), les Émirats arabes unis (-139 000 b/j) et le Koweit (-131 000 b/j), les plus gros producteurs mis à part l’Iran, selon l’OPEP. L’Iran a obtenu gain de cause et va pouvoir augmenter sa production de 90 000 b/j à 3,8 millions.
Outre l’Iran, qui veut pouvoir profiter de la levée des sanctions économiques à son encontre, la Libye et le Nigeria sont exemptés des limitations en raison des conflits auxquels ils font face et de leur impact sur leurs finances. L’Indonésie, qui a refusé de souscrire à l’accord, a vu son adhésion à l’OPEP gelée. Enfin, l’accord de Vienne reflète les engagements pris par l’OPEP, fin septembre, à Alger où les ministres du cartel s’étaient fixé pour objectif de ramener leur production entre 32,5 et 33 millions b/j. L’accord va faire remonter l’inflation mondiale à un taux plus sain, y compris aux États-Unis, a estimé Mohammed Saleh al-Sada. Avec l’effort consenti par la Russie, sa mise en œuvre devrait aboutir à une résorption du surplus structurel de production, qui plombait les cours depuis deux ans. Des analystes sceptiques ont toutefois prévenu que l’application des limitations devra être surveillée de près, car aucune sanction n’est prévue pour les contrevenants. Si la perspective d’un carburant plus cher ne réjouira pas les automobilistes, la hausse attendue des prix devrait soulager les budgets des pays producteurs de pétrole. Les gros producteurs de l’OPEP, l’Arabie Saoudite en tête, avaient longtemps soutenu une stratégie de prix bas espérant ainsi évincer leurs concurrents, notamment les producteurs de pétrole de schistes américains, et regagner des parts de marché. Mais même les finances publiques de la riche Arabie Saoudite avaient fini par souffrir de l’effet des prix bas. La chute des revenus pétroliers a aggravé une situation économique déjà dramatique au Venezuela.