LA RÉFORME de l’Administration publique est le pilier majeur pour soutenir les autres réformes d’envergure dans les autres secteurs. L’opération de mise à la retraite envisagée va se faire conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur en République démocratique du Congo. Cette année 2020, plus de 17 000 fonctionnaires et agents de l’État sont concernés par cette opération qui bénéficie du soutien de la Banque mondiale, précise Yolande Ebongo Bosongo, la ministre de la Fonction publique. Il s’agit notamment des personnes âgés d’au moins 65 ans ou ayant accompli 35 ans de carrière révolus dans le secteur public.
Les fonctionnaires et les agents de l’État concernés viennent des cinq ministères pilotes : la Fonction publique, le Plan, le Budget, les Finances et le Portefeuille. Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, accorde une grande importance au succès de l’opération de ce grand projet, en sa qualité de président du Projet de réforme et de rajeunissement de l’Administration publique (PRRAP). Selon les dernières statistiques communiquées par la ministre Ebongo, la Fonction publique compte à ce jour environ 1.5 million de travailleurs.
Gestion saine du processus
D’après elle, les causes sont connues : recrutements fantaisistes sur la base du clientélisme, la pléthore des agents fictifs, et la non actualisation des fichiers. Des agents déjà décédés figurent encore sur les listes de paie. La Banque mondiale est prête à travailler avec le gouvernement pour accélérer les activités.
Les grands défis du processus de la réforme de l’Administration publique en RDC sont notamment le vieillissement des effectifs, nécessitant ainsi la mise à la retraite des fonctionnaires et agents de l’État ayant atteint ou dépassé l’âge légal, et de son corolaire, c’est-à-dire le rajeunissement des effectifs à travers les mécanismes de recrutement et de redéploiement des jeunes à travers le territoire national.
La Banque mondiale est pour une gestion saine du PRRAP dans le respect des clauses de l’accord de don. Elle encourage les avancées dans le processus de réforme en cours et l’engagement du gouvernement à conduire jusqu’au bout ce processus. Sur la question des JPO, la Banque mondiale souhaite que le gouvernement confirme son engagement d’éponger les arriérés dus au titre de la prime de performance des JPO.
La réforme et la modernisation de l’Administration publique dans notre pays est un processus que le gouvernement met en œuvre avec le concours de ses partenaires pour une administration qui soit à la hauteur de ses ambitions. Le pari est de hisser, dans un délai raisonnable, la RDC au rang de pays à revenu intermédiaire et préparer ainsi les conditions de l’émergence du pays et même de développement vers les années 2050. Le gouvernement s’est, pour se faire, aligné sur cette ambition au travers d’un programme d’action qui préconise la poursuite et la finalisation des réformes institutionnelles en vue de renforcer l’efficacité de l’État.
Il ne fait l’ombre d’aucun doute que la réforme et la modernisation de l’Administration publique sont un passage obligé vers l’émergence. Le gouvernement veut faire de l’Administration publique un véritable instrument de développement et de fourniture des services de qualité. Il faut alors impérativement que les différents acteurs de cette réforme en saisissent la quintessence, en comprennent le bien-fondé et y adhèrent pour qu’ensemble on atteigne les objectifs assignés.
Résistances et préjugés
En tant que processus, toute réforme suscite non seulement des résistances du fait des habitudes et zones de confort, mais surtout du fait des préjugés et de la peur de l’inconnue. Dès lors, seule une communication pertinente peut aider à dissiper les malentendus et mettre tous les acteurs au même niveau d’information pour une appropriation de cette réforme qui n’est plus une opinion mais une nécessité. Une nécessité profonde et incontournable pour la transformation des mentalités et de notre société.
La réforme qualifiée de « fondatrice » parce que l’Administration publique est « le bras séculier de l’État », touche tous les secteurs des institutions publiques et repose sur les principes suivants : premièrement, une plateforme de pilotage et de coordination. En vue de donner l’impulsion politique de haut niveau nécessaire, a déclaré Jean-Paul Mabaya, il a été créé une structure de pilotage politique, le Comité de pilotage et de coordination de la modernisation de l’Administration publique (CPMAP). Il rassemble, autour du 1ER Ministre, les ministres des secteurs centraux au vu du caractère transversal de leurs missions (Fonction publique, Finances, Budget, Plan et Décentralisation).
Deuxièmement, un pilotage technique par le ministère de la Fonction publique. Une structure de pilotage et de coordination technique de la mise en œuvre de la réforme de l’Administration publique (CMRAP) a été mise en place.
Une restructuration des unités en charge de la réforme créées en 2003 au profit d’une structure souple et efficace était nécessaire pour coordonner la mise en œuvre de cette réforme, avec un indicateur de performance bien précis, qui mesure la qualité et le niveau d’appui accordé aux services chargés de la réforme de l’Administration publique (RAP) et les résultats obtenus à chaque étape du processus.
Troisièmement, un rôle clé du ministère des Finances et du ministère de l’Intérieur. Les ministères de la Fonction publique, des Finances et du Budget peuvent jouer un rôle de catalyseur et d’appui aux activités de réformes engagées par l’administration publique à travers la modernisation des systèmes d’organisation, de fonctionnement, de gestion et de contrôles des ressources humaines et d’engagement des rémunérations, des ressources budgétaires, des finances publiques et de la fiscalité et la mise en œuvre de la décentralisation qu’ils exercent respectivement, chacun selon ses attributions et responsabilités sur les services publics…
Quatrièmement, un relais des autres ministères. Il s’agit ici de privilégier une approche participative et une démarche inclusive dans l’appropriation des mesures de changement dans chaque ministère. Cinquièmement, une mise en œuvre qui procède par séquençage et phasage. Comme toute réforme institutionnelle, Jean-Paul Mabaya a expliqué que la RAP revêt « un caractère à la fois dynamique et flexible » pour mieux s’adapter aux évolutions des contextes national, sous-régional, régional et mondial et s’ajuster aux nouvelles contraintes, aux défis et enjeux qui peuvent s’imposer au processus tout en restant en adéquation avec d’autres réformes qui concourent au renforcement de l’efficacité de l’État.
Par exemple, l’École nationale d’administration (ENA) est un outil de cette mise en œuvre pour « garantir la qualité et l’égalité des chances pour l’intégration dans l’Administration publique », a déclaré le coordonnateur du PRRAP.
Sixièmement, des mécanismes d’évaluation et de suivi intégrés. Il s’agit de définir et de mettre en place un système approprié de suivi-évaluation avec des indicateurs de processus et de résultats. Ceci permet également de cerner les risques d’échecs et de proposer, soit des modalités crédibles de contournement, soit des ajustements nécessaires pendant la mise en œuvre en vue de consolider les acquis de la réforme et d’en assurer la pérennité.
Comme ailleurs, la réforme devra s’inscrire sur le long terme avec des ajustements nécessaires… Ce mécanisme doit être défini au départ pour mieux mesurer les résultats en termes d’effets et d’impacts sur les citoyens ou les usagers des services publics à la suite de l’action de la réforme.