LA PROBLÉMATIQUE de financement des partis politiques et des campagnes électorales est un enjeu central de la vie politique et démocratique dans un régime de pluralisme. Le financement des partis est en général un ensemble de moyens permettant d’assurer les ressources financières nécessaires à l’activité de ces partis.
La constitution du 18 février 2006 consacre le principe de financement public des partis politiques, et la loi 08/005 du 10 juin 2008 définit les modalités de ce financement. Qui est prévu en fonction des résultats aux élections législatives et du nombre de parlementaires. Par ailleurs, la loi réglemente le financement privé des partis.
D’une manière générale, les partis sont d’abord financés par des ressources privées. Il s’agit notamment des cotisations des adhérents et des élus (qui sont traditionnellement la source de financement des partis de masse). D’un montant généralement peu élevé, elles ne suffisent pas à faire face aux dépenses de fonctionnement. Il y a aussi des dons des personnes privées, généralement obtenus au moment des élections et non dans le cadre normal du fonctionnement des partis. En France, par exemple, les dons des personnes morales sont interdits.
Jean-Marie Kidinda, politologue et sociologue, souligne que les partis politiques sont supposés être aujourd’hui « des organisations très structurées dont le statut et le financement doivent être régis par la loi ». Mais ceci n’a pas toujours été le cas dans la pratique, surtout en Afrique subsaharienne : « Ce que l’on observe, les partis et les regroupements politiques sont des organisations aux contours mal définis, au point que le clivage idéologique n’apparaît pas dans le paysage politique ».
La loi 08/005 du 10 juin 2008
Henri Mova Sakani, vice-1ER Ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, était convoqué, en mai, à l’Assemblée nationale pour expliquer pourquoi la loi n°08/005 du 10 juin 2008 portant financement public des partis politiques en République démocratique du Congo n’est pas encore appliquée. Au Palais du peuple, il était allé répondre à une question orale avec débat de Fidèle Babala, député sur le banc du MLC, le parti de Jean Pierre Bemba. Il a dit aux députés que le financement public n’est que « subsidiaire » aux ressources propres des partis politiques et ne peut, de ce fait, être « source d’enrichissement personnel ». Il a aussi indiqué que le financement public est constitué « des fonds prévus au crédit budgétaire de l’État ».
Il concerne aussi bien les dépenses couvrant les activités permanentes des partis politiques que celles consacrées à l’organisation des campagnes électorales. D’après lui, « les fonds tiennent compte des impératifs du cadrage budgétaire et des priorités de l’État ». À ce jour, a-t-il précisé, aucune allocation budgétaire relative au crédit alloué au financement des partis politiques n’a été dotée par le Parlement. Le propos de Mova a semblé laisser perplexe Fidèle Babala, qui a affiché une certaine détermination à ne pas être baladé et qui n’a pas voulu relancer la polémique. Si la loi sur le financement public des partis n’est pas appliquée, dans les rangs de l’opposition dite « radicale », on pense que « la raison est éminemment politique ». Selon un membre de l’UDPS, « le gouvernement a peur de donner à l’opposition les moyens de sa politique. Cette loi ne sera jamais appliquée ». La loi 08/005 du 10 juin 2008 définit les critères d’éligibilité au financement public. Selon Henri Mova, au stade actuel, les conditions ne sont pas réunies pour qu’il y ait effectivité du financement des partis politiques et aucun parti n’a réuni les conditions prescrites par la loi pour en bénéficier.
Ministère de l’Intérieur
Selon cette loi, les partis peuvent se financer (art. 22-25 de la loi du 15 mars 2004 sur les partis politiques) au moyen des ressources provenant de cotisations de leurs membres; dons et legs; revenus réalisés à l’occasion des manifestations ou des publications; opérations mobilières et immobilières; subventions éventuelles de l’État.
Les dons et legs doivent faire l’objet d’une déclaration au ministère de l’Intérieur, mentionnant leurs provenance, nature et valeur. Ils doivent provenir des personnes identifiées et être d’origine non délictueuse. Il est interdit, sous peine de dissolution, aux partis politiques de recevoir directement ou indirectement un soutien financier ou matériel provenant d’un État étranger. Par ailleurs, la loi laisse la possibilité aux individus, entreprises ou groupes d’intérêts étrangers de financer les partis, et prévoit le mécanisme de contrôle de financement des partis politiques. Le parti politique enregistré peut bénéficier des subventions de l’État, dans certaines conditions.
Aucun parti politique ne peut user des biens ou du personnel de l’État sous peine de dissolution. Tout parti politique doit tenir une comptabilité et un inventaire de ses biens meubles et immeubles conformément à la législation en vigueur ; présenter ses comptes annuels à l’administration compétente et justifier, le cas échéant, la provenance de ses ressources financières. Les biens mobiliers et immobiliers ainsi que les revenus des partis politiques sont soumis au régime fiscal de droit commun (art. 26 et 27).
Le financement public vise les dépenses de fonctionnement du parti (article 4) et les dépenses des campagnes électorales (art. 8). L’État octroie cette aide par le biais d’une commission interinstitutionnelle (art. 11). Le financement est accordé aux partis politiques représentés à l’Assemblée nationale, au Sénat, dans les Assemblées provinciales, aux Conseil urbain, municipal et de secteur ou de chefferie (art. 7). Les partis qui n’ont aucun siège, qui ne participent pas aux élections et les nouveaux partis n’ont pas droit à cette subvention.
En ce qui concerne le financement des campagnes électorales, les partis peuvent demander la prise en charge d’une partie de leurs dépenses de campagne qu’après celle-ci et pour autant qu’ils aient obtenu des sièges (art. 8). La loi ne dit pas de manière claire les montants du financement public. S’agissant des dépenses de fonctionnement, la subvention ne peut être inférieure à 0,5 % ni supérieure à 1 % de la totalité des recettes à caractère national de l’État. Ces montants sont répartis proportionnellement au nombre des élus des partis représentés au moins à une des Assemblées délibérantes (art. 7). La subvention pour les dépenses des campagnes électorales est fixée à 2 % de la totalité des recettes à caractère national revenant à l’État. Ces montants sont répartis proportionnellement au nombre des élus des partis représentés au moins à une des Assemblées délibérantes (art. 10). Plus un parti a des élus, plus est importante le montant auquel il a droit…