Prime à l’incurie

La gestion de Matata aura été tout, sauf une gestion orthodoxe. Pour le commun des Congolais, Matata se présentait comme l’homme de la situation, à même de remettre la RDC sur les bons rails de la gestion publique. Cependant, à en juger par le débat fort passionné à l’Assemblée nationale sur la loi de reddition de comptes de l’exercice 2015, c’est tout le contraire !

Aubin Minaku, élu nouveau président de l'Assemblée nationale congolaise le 12/04/2012 à Kinshasa. Radio Okapi/ Ph. John Bompengo

Les viol ons sont loin de s’accorder à l’Assemblée nationale, où, depuis le 10 novembre, se tient un débat sur le projet de loi portant reddition de comptes de l’exercice 2015. Malgré l’appel des députés de l’opposition pour le rejet de ce projet, la plénière a déclaré recevable la mouture du gouvernement.

Pour le député FONUS (opposition), Emery Okundji, ce projet de loi est « un véritable copier-coller » des lois précédentes et consacre le dépassement budgétaire dans certains secteurs. Il reprend à compte des cas précis, dont celui du Domaine de la N’Sele. Sur la prévision de 268 005 dollars, la réalisation est à 10 540 054 dollars, soit un dépassement de plus de 9 millions de dollars.

Même au sein de la majorité présidentielle, on s’en offusque. « Si le gouvernement était à court de crédits, il était important qu’il revienne devant l’autorité budgétaire pour réclamer d’autres crédits. Il y a beaucoup de fautes qui ont été commises, alors nous ne pouvons pas nous dédouaner par rapport à nos obligations », a souligné Vicky Katumwa.

Le projet de loi sur la reddition de comptes est examiné à la suite de la motion incidentielle du député Henri-Thomas Lokondo alors que l’Assemblée nationale l’avait mis en sursis, estimant que le gouvernement qui l’avait proposé était sortant. D’après Henri Thomas Lokondo, la décision de l’Assemblée nationale n’était pas rationnelle parce que cette dernière avait pourtant accepté que le Premier ministre démissionnaire présentât le projet de loi de finances 2017.

« Il faut signaler que la reddition de comptes précède l’examen de budget. La constitution le dit et la loi sur les finances publiques le dit et notre règlement intérieur le dit aussi. J’ai donc pensé que ce n’était pas rationnel de refuser que le ministre des Finances vienne présenter la loi portant reddition de comptes et en même temps accepte que le Premier ministre vienne présenter le budget », avait fait remarquer Henri Thomas Lokondo sur les ondes de Radio Okapi.

Faiblesses

Il est de coutume parlementaire que c’est la Cour des comptes qui présente à l’Assemblée nationale le projet de loi sur la reddition de comptes. Ce n’est pas toujours le cas en RDC, où le gouvernement se charge de cet exercice, alors que  c’est lui l’auteur des dépenses dont les justifications ont été envoyées à la Cour des comptes. Les faiblesses  souvent reprochées au gouvernement dans l’exécution du budget sot la réalisation des recettes non prévues, la faible exécution de certaines dépenses, l’exécution des dépenses non prévues, en particulier des projets d’investissement et l’exécution des dépenses en dépassement de crédits. Plusieurs députés ont appelé à des sanctions, mais la majorité au Parlement a toujours protégé le Premier ministre et son gouvernement.

Le rapport de la commission économique et financière (ECOFIN) de l’Assemblée nationale, présenté le 30 novembre, a révélé des soupçons de détournement et des dépassements dans l’exécution du budget 2015.

Le président de cette commission, Jean-Luc Mitoka Mbali (Majorité présidentielle), a fait savoir que l’exécution du budget 2015 contient beaucoup d’irrégularités dans la réalisation de certains projets. « Les dépassements budgétaires sont au niveau des projets d’investissement, dans le secteur social. Le cas échéant, s’il y a eu des malversations avérées, qu’il puisse avoir des sanctions à l’encontre des gestionnaires », a-t-il déclaré devant ses pairs. Certains députés ont été virulents lors de leurs interventions, allant jusqu’à réclamer des poursuites judiciaires à l’encontre du Premier ministre sortant, Matata Ponyo, et de certains membres de son gouvernement.

La charge de Lokondo

Réagissant à la réplique du Premier ministre Matata Ponyo sur son bilan à la tête de la primature, le député Henri-Thomas Lokondo (Majorité) a déploré l’impunité des détourneurs des fonds en RDC. Il appelle le gouvernement à sanctionner les personnes citées à l’issue des travaux du séminaire sur le coulage des recettes. « Ce terme est venu du gouvernement, qu’il puisse non seulement contrôler mais sanctionner », recommande-t-il.