Qu’est-ce qui va changer avec la fin de l’état d’urgence sanitaire ?

Jusqu’au 7 septembre, le gouvernement conserve la possibilité de prendre de nouvelles mesures en cas de retour de l’épidémie. Mais beaucoup de choses devraient changer et la situation revenir quasiment à la normale.

L’ÉTAT d’urgence sanitaire est une mesure exceptionnelle pouvant être décidée en cas de catastrophe sanitaire, notamment d’épidémie, mettant en péril la santé de la population. En République démocratique du Congo, l’état d’urgence sanitaire a été déclaré par Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le chef de l’État, pour une durée maximale d’un mois. L’ordonnance qu’il a signée détermine les mesures pour lutter contre la propagation de la pandémie de Covid-19 dans le pays. Au-delà de ce délai d’un mois, la prorogation de l’état d’urgence sanitaire devait être autorisée par la loi votée au Parlement. La loi de prorogation fixe la durée de l’état d’urgence sanitaire à 15 jours. 

Les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prennent donc fin dès qu’il est mis fin à l’état d’urgence sanitaire. Compte tenu des incertitudes liées à l’évolution de l’épidémie de Covid-19, le secrétariat technique du comité multisectoriel de riposte au Covid-19 (CMRC-19) est dans son rôle de recommander au gouvernement l’organisation d’un régime ad hoc transitoire à partir du 21 juillet. 

Un défi de plus

Logiquement, les mesures transitoires de sortie de l’état d’urgence sanitaire seront l’émanation des plans sectoriels proposés par les ministères, les entreprises et les autres entités concernés par la pandémie de Covid-19. Du 21 juillet au 7 septembre inclus, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, peut donc ordonner par décret plusieurs mesures afin de lutter contre l’épidémie de Covid-19, mais le Parlement peut en limiter la portée réglementaire à travers une loi de sortie de l’état d’urgence. 

En revanche, ce qui est sûr, explique un membre de l’équipe technique de riposte, « un confinement généralisé de la population ne peut plus être ordonné ». Par ailleurs, les gouverneurs de province peuvent être amenés à prendre d’autres mesures d’application, pour alléger les mesures nationales si les circonstances locales le permettent ou, à l’inverse, les renforcer en cas de nécessité. Ils peuvent également sanctionner les personnes et les établissements qui ne respectent pas les mesures barrières et sanitaires édictées.

Des sanctions, identiques à celles prévues par l’état d’urgence sanitaire, sont possibles en cas de non-respect des mesures (par exemple, amende forfaitaire en cas de non-respect du port des masques). Un arsenal juridique sera publié pour plus de clarté, a annoncé Albert Mpeti Biyombo, le vice-ministre à la Santé. Comme durant l’état d’urgence sanitaire, le Parlement doit être informé des mesures prises par le gouvernement et peut demander toute information complémentaire afin de les contrôler et de les évaluer. 

Après le 21 juillet, certaines dispositions de l’état d’urgence sanitaire vont cesser. Par exemple, la fermeture des frontières et de l’espace aérien ; la fermeture des établissements recevant du public tels les restaurants, les cinémas, les discothèques, les églises, les lieux de réunion (mesures barrières), l’interdiction des rassemblements et des réunions sur la voie publique et dans les lieux publics. Plus de confinement généralisé. Avec la fin de l’état d’urgence sanitaire, c’est aussi la fin de l’encadrement des prix et de la défiscalisation… 

Willy Bakonga Wilima, le ministre d’État, ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique (EPST), a déjà fait savoir « l’éventualité » d’un retour des élèves à l’école. Cette reprise prend d’abord en compte les classes des 6è année primaire et secondaire, et l’ensemble des autres classes pourra attendre en attendant la maîtrise de la situation sanitaire par l’équipe de la riposte.

Cependant, si l’essentiel de l’état d’urgence sanitaire disparaît, la prudence reste de mise. Ne pas conserver certaines mesures, ce serait faire comme si les risques de redémarrage de l’épidémie n’existaient pas. Pour le 1ER Ministre, la volonté du gouvernement est de poser des « diagnostics pertinents » sur la situation socio-économique du pays en cette période d’incertitudes occasionnées par la survenance de la pandémie de coronavirus, et surtout d’engager des actions appropriées en vue de sortir la République démocratique du Congo de cette crise sanitaire.

En effet, « le Covid-19 a mis à l’épreuve l’élan pris pour accélérer la marche vers l’émergence du pays à travers le Plan national stratégique de développement (PNSD), notamment par la prise de différentes mesures sanitaires et sécuritaires qui ont, quelque peu, occasionné le ralentissement de l’activité économique. Il s’agit là d’un défi de plus, compte tenu de la l’évolution de la situation socioéconomique du pays qui a connu durant les cinq dernières années quelques contreperformances. » 

Vigilance au quotidien

Le gouvernement peut toujours imposer un test virologique aux voyageurs en provenance d’un pays où circule le virus. Il peut également maintenir la possibilité de la mise en quarantaine ou à l’isolement des passagers en provenance de l’étranger. Le gouvernement peut aussi réglementer la circulation des personnes et l’accès aux transports collectifs (port des masques, etc.). La sortie de l’état d’urgence sanitaire vise un retour complet à la normale, mais pas dans l’immédiat. Un relâchement dans les comportements visant à limiter la transmission du Covid-19, risque d’être fatal. 

Pour rappel, les principales recommandations du président de la République en déclarant l’état d’urgence sanitaire étaient les suivantes: suspension, jusqu’à nouvel ordre, de tous les vols. Seuls les avions et les navires cargos et autres moyens de transport frets étaient autorisés à accéder au territoire national et leurs personnels soumis aux contrôles ; imposition à tous les passagers, à leur arrivée aux frontières nationales, de remplir une fiche de renseignements et de se soumettre, sans exception, à l’obligation de lavage des mains et du prélèvement de la température ; imposition d’une mise en quarantaine de 14 jours maximum à toute personne suspectée à l’issue du test de température, pour un examen approfondi et au besoin d’interner, dans les hôpitaux prévus à cet effet,  les personnes qui seront testées positives ; dotation de tous les postes d’entrée maritime, fluviale, lacustre et terrestre du territoire national du même dispositif de surveillance pour renforcer le contrôle des passagers en provenance de l’étranger ; soumission systématiquement à la prise de température des personnes en partance de Kinshasa vers les différentes provinces.

Pour les rassemblements des personnes : interdiction de tous rassemblements, réunions, célébrations, de plus de 20 personnes sur les lieux publics en dehors du domicile familial ; fermeture des écoles, des universités, des instituts supérieurs officiels et privés sur l’ensemble du territoire national à partir du 19 mars 2020 ; suspension  de tous les cultes à compter à partir du 19 mars 2020 ; suspension des activités sportives dans les stades et autres lieux de regroupement sportif jusqu’à nouvel ordre ; interdiction, jusqu’à nouvel ordre, de l’ouverture des discothèques, bars, cafés, terrasses et restaurants ; interdiction de l’organisation des deuils dans les salles et les domiciles. 

Les dépouilles mortelles seront conduites directement de la morgue jusqu’au lieu d’inhumation et en nombre restreint d’accompagnateurs…