Snel : maigres résultats pour les compteurs électriques intelligents

On les dénomme « les smart grids », capables de contribuer à résoudre des gros problèmes de déficit énergétique en électricité. Ils font déjà l’objet d’un projet pilote à Kinshasa et à Lubumbashi, mais sans une grande satisfaisantion chez les abonnés. 

Les compteurs communicants aident à produire des factures sur la consommation réelle. (Photo Wikipédia)
Les compteurs communicants aident à produire des factures sur la consommation réelle. (Photo Wikipédia)

Les entreprises Connecte Africa (Afrique du Sud) et Conolog (Egypte), en collaboration avec la Société nationale d’électricité (Snel), ont choisi des quartiers huppés de Kinshasa pour tenter l’expérience : Cité Verte, Cité Marie Olive Lembe, Cité Maman Mobutu, dans la commune de Mont Ngafula, et le quartier GB, à Gombe. Ce sont près de 7.000 compteurs qui ont été placés dans le but de permettre aux congolais d’économiser l’énergie électrique à travers la carte prépayée. Cette stratégie a été également adoptée pour donner accès à l’électricité au plus grand nombre en limitant la fraude et le vol. Ces pratiques étaient courantes dans de nombreux quartiers. D’après les experts en énergie, les habitants devraient avoir ainsi la possibilité de souscrire à des offres adaptées à leurs habitudes de consommation et à leur pouvoir d’achat. Mais à la cité Maman Mobutu, les avis sont partagés.

Nous n’avons juste utilisé que les ampoules économiques mais la carte s’est épuisée en moins d’une semaine. Ce qui n’est pas normal.

Un abonné Snel

Un médecin habitant ce quartier dénonce le dysfonctionnement de ces compteurs. « Nous n’avons juste utilisé que les ampoules économiques mais la carte s’est épuisée en moins d’une semaine. Ce qui n’est pas normal », s’exclame-t-il. Au quartier GB, un consommateur pointe du doigt le mauvais état des câbles électriques. « Ma carte est toujours chargée, mais l’électricité n’arrive pas dans la parcelle, suite à l’état de délabrement de nos lignes », déclare-t-il, recommandant qu’il faut d’abord procéder au renouvellement des infrastructures de distribution avant d’amorcer ce genre de projet.

Visiblement, le projet bute à de nombreux obstacles, empêchant aux clients l’accès, en temps réel, aux informations sur la consommation d’électricité. C’est un des objectifs visés. Le système, en lui, seul ne suffit pas. Nombre de bénéficiaires reconnaissent, certes, les avantages de la régularité de la desserte, mais les difficultés, selon eux, se situent au niveau de la vétusté des réseaux de distribution. « Le système de carte prépayée nous pousse à un usage modéré du courant électrique. Plus de facturation forfaitaire, une certaine régularité dans la fourniture de l’énergie s’installe, peu à peu, sauf en cas de coupure généralisée, de panne de câble ou d’intervention dans la cabine », témoigne un journaliste résidant à la Cité verte.

Coût élevé des compteurs

Le grand désavantage du projet, reconnu par les experts, réside dans le coût excessif pour l’achat et le déploiement des compteurs. Bien que les fonds mis en jeu pour ce projet à Kinshasa restent encore un mythe, en Afrique du Sud, le manque de moyens demeure l’un des verrous. Seules, trois entreprises, City Power, Itron et EDISON Power Group, ont réussi à investir 150 millions de dollars, montant prévu pour quadriller la ville de Johannesbourg. L’objectif est de placer un compteur, par foyer, et par entreprise, d’ici à 2015.

Le continent africain n’est électrifié qu’à 42%. Ce taux d’électrification est très disparate, selon les régions, 29% en Afrique subsaharienne. La RDC, bien que dotée des potentialités énergétiques énormes, peine à les exploiter. 9% de la population bénéficie d’une énergie électrique dont les infrastructures sont vieilles de plus de 50 ans. La Snel tente de sensibiliser la population sur l’importance de l’économie, de l’énergie électrique en vue d’augmenter la capacité.

Une campagne sans échos

C’est surtout lors de la Coupe du monde 2014, que les annonces de la Snel ont défilé sur l’écran de télévision publique. Les agents de cette société ont expliqué l’importance de l’économie de l’électricité. Cet appel à la modération dans la consommation de l’électricité n’a pas eu d’échos au sein de la population congolaise. Très peu des kinois se sont procurés des ampoules économiques, les estimant très couteux.

En réalité, la ville éprouve un besoin d’au moins 800 mégawatts, tandis que la ligne actuelle est limitée à 420. Un expert de l’entreprise Pavie Holding, spécialisée en étude et réalisation en électricité, Chambangi, indique que les économies d’énergie électrique visent la récupération de près de 250 mégawatts sur l’ensemble des réseaux de distribution de Kinshasa.

A l’instar de l’Ouganda, l’Etat congolais devrait accorder des facilités auprès des importateurs ou des fabricants locaux des ampoules à faible consommation, voire procéder à l’interdiction des ampoules à forte consommation pour le remplacer gratuitement par celles de faible consommation.