De nouvelles taxes pour les passagers et les marchandises à ce poste frontalier empoisonnent le climat des affaires. La société civile est montée au créneau pour dénoncer une situation qui risque d’avoir des répercussions sur les prix des articles importés d’Angola.
Le dernier arrêté du gouverneur Jacques Mbadu, daté du 1er août, sur le petit commerce a pris commerçants, passagers et voyagistes de court. Pour beaucoup de services à la frontière avec l’Angola, les coûts sont passés du simple au triple. La traversée de la frontière, qui coûtait 1 000 francs par personne, se négocie actuellement à 6 000 francs pour les nationaux et 50 000 pour les étrangers contre 15 000 précédemment. Pour tout véhicule de transport, de marchandises, il faudra désormais débourser 30 000 francs par jour, contre 15 000 dans le passé, et 1 million pour les grands trucks. Le permis obligatoire d’exercer une activité commerciale à la frontière coûterait dorénavant 50 000 francs par an aux nationaux, alors qu’il était gratuit avant, excepté le jeton qui était délivré à chaque commerçant par les services économiques au prix de 1 000 francs, par jour. La nouvelle a fait l’effet d’une bombe au niveau de Lufu, important poste de commerce par lequel passe une grande partie de l’approvisionnement en produits alimentaires et industriels du Bas-Congo en provenance d’Angola et à des prix abordables pour les commerçants de cette province et de ceux de la capitale. La société civile a, dans une lettre, dénoncé cette situation qui risque d’avoir des répercussions négatives sur la structure des prix des marchandises de première nécessité importées d’Angola. Selon un opérateur économique, « c’est la conséquence prévisible de la carence de la décentralisation financière qui devait accompagner la décentralisation politique. »
Combler le vide créé par les 40% de rétrocession invisibles
Toutes les entités territoriales décentralisées font face à la pression et aux exigences financières prévues par la Constitution : salaires du personnel, frais de fonctionnement, construction d’infrastructures de base (routes de desserte agricole, voiries urbaines, écoles hôpitaux…), alors que la retenue à la source de 40% des recettes n’est toujours pas appliquée. « En quête d’argent pour faire face aux urgences, toutes les provinces s’inventent de nouvelles taxes ou alourdissent celles qui existent déjà. La situation est assez paradoxale là où le gouvernement manifeste la volonté d’en supprimer davantage pour, dit-on, améliorer le climat des affaires. Ignorant sans doute que celui-ci passe aussi par le respect strict des textes et des lois qui régissent le pays », relève un entrepreneur. Cette augmentation du montant des taxes aura, à coup sûr, des répercussions négatives sur les prix. La population, prisonnière de cette situation, voit chaque jour son pouvoir d’achat s’effriter à cause de l’augmentation inéluctable des prix des biens de première nécessité. Avec le marché de Lufu, l’onde de choc va certainement se faire ressentir partout ailleurs. Le poste frontalier de Lufu est le deuxième poste frontalier routier le plus important du pays après Kasumbalesa, avec une affluence de plus de 500 voyageurs transfrontaliers par jour, une moyenne de 80 véhicules en provenance d’Angola par jour. Le marché attire chaque week-end pas moins de 20 000 commerçants et visiteurs qui viennent de tous les coins d’Angola et du Congo.